Non, Sébastien Lecornu n'est pas le pire épisode de la macronie
Attendez-vous à de nouvelles surprises
L'agonie de l'épisode Macron est lente et douloureuse. Le pays et ses habitants vont de Charybde en Scylla. À chaque gouvernement qui tombe, le camp démocrate espère : et si le président respectait le verdict des urnes et nommait un premier ministre issu du Nouveau front populaire ? Mais non. C'est chaque fois pire. La démission de Sébastien Lecornu 24 heures après la désignation de son gouvernement ne laisse rien présager de bon.

L'économie est au bord du gouffre. La démocratie s'est offerte à l'extrême droite avec la complicité active du parti au pouvoir et du président de la république. Tout est désormais prêt pour l'arrivée au pouvoir du Rassemblement national, émanation du Front national, lui même fondé par d'anciens nazis. Le système (cliquez pour comprendre ce que ce terme recouvre) se félicite parce que, pour lui, tout est préférable à « la gauche ». Les médias classiques ne sont pas en reste. Les déconstructions du récit médiatique sont nombreuses et laissent toutes apparaître un traitement différent (négatif et infantilisant) pour la gauche par rapport au reste du spectre politique. L'incompétence économique des journalistes vedette est patente et s'illustre à chaque fois qu'ils interrogent une voix dissidente de la doxa habituelle. « Mais comment ? Vous déviez de l'école de Chicago ? Vous rendez-vous compte que les marchés vont nous sanctionner ? ». Comme si l'on pouvait rassurer des marchés... Dans tout cela, la démission de Sébastien Lecornu moins de 24 heures après la désignation de son gouvernement est un épiphénomène. Il ne reste plus que quatre voies pour Emmanuel Macron. Et vu son parcours, il ne fait aucun doute qu'il choisira la pire. Ou quelque chose de totalement loufoque que personne n'aura vu venir.
Première solution pour sortir de ce qui devient un mauvais remake de la fin de la quatrième république : quitter son poste et rappeler les Français aux urnes (ou lancer une constituante). Être au service du pays, c'est aussi savoir quand il faut l'épargner. Savoir surpasser son ego, écouter les citoyens qui vous lâchent depuis des années et en tirer les conséquences... Mais ce n'est pas le genre de l'éborgneur en chef qui a toujours préféré utiliser le LBD et les grenades de désencerclement plutôt que le dialogue démocratique.
Deuxième solution : nommer un premier ministre issu du Rassemblement national en espérant que LR et une partie de son camp accepteront l'inacceptable. Il finirait ainsi de s'essuyer les pieds sur le choix des français aux dernières législatives de 2024. Ceux-ci avaient en effet majoritairement voté pour le Nouveau front populaire. Ce n'est pas une option impossible si l'on se base à la fois sur le choix du système : « tout sauf la gauche » et sur les liens nombreux entre macronistes et RN.
Troisième solution : nommer, seize mois après le résultat des élections législatives, quelqu'un issu du camp qui les a remportées, comme le veut l'usage républicain. Souvenez-vous, en août 2024, Emmanuel évoquait l'instabilité institutionnelle qui naîtrait s'il nommait Lucie Castets première ministre... Comment qualifier un gouvernement qui annonce sa composition le soir et sa démission le lendemain matin ?
Enfin, il reste la possibilité d'une dissolution, avec tous les risques pour la démocratie que cela sous-entend. Dans une société aussi fracturée, un boulevard pour le RN tracé par le rejet des politiques ayant déjà été aux commandes, la bascule est possible. D'autant que le président peut secrètement espérer que les Français ne voteraient pas pour le RN lors de la présidentielle de 2026 après une gestion des affaires courantes pendant un peu plus d'un an.
Si l'on se base sur les dernières législatives, on peut se rassurer en se disant que le front républicain contre l'extrême droite reste fort. Mais il y a des signes très inquiétants. Le Rassemblement national, est désormais « dédiabolisé ». Ses représentants sont partout, sur tous les plateaux de télévision et de radio, dans tous les journaux. Un empire de presse (Bolloré) s'est mis à son service. Dans la rue, l'extrême droite extra-parlementaire ne retient plus ses coups et les actes de terrorisme d'extrême droite grimpent dangereusement.
Dans l'esprit d'une population exsangue après huit ans d'ultra-libéralisme contre-productif, le « dégagisme » fait son chemin. La désinformation bat son plein et les youtubeurs rémunérés par des intérêts privés ont une meilleur audience que les journalistes, eux-mêmes souvent victimes des balles tirées par leur propre camp. La rationalité a quitté une bonne partie des populations mondiales puisque les opinions remplacent les faits. L'exemple vient d'en haut tant les politiques, ici comme ailleurs ont abandonné tout sens commun au profit d'un militantisme qui ne s'embarrasse pas des mensonges les plus grossiers. Et parfois, cela marche. À tel point que des imbéciles incapables parviennent à se faire élire à la tête de pays comme les États-Unis ou l'Argentine...
Ni dieu ni maître, ce n'est malheureusement pas encore pour demain.