Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
par Antoine Champagne - kitetoa

Facebook, Youtube et autres plateformes...

Arrêtez de crier à la censure et fermez vos comptes

Faire reposer son modèle de publication et de diffusion sur des plateformes privées est un risque. Celles-ci peuvent décider à tout moment de faire disparaître les contenus. Se placer dans une telle position est du masochisme.

Il faut chercher la définition de "social" dans le dictionnaire avant d'écrire "réseau social" - D.R.

Ils étaient en colère, après le G7, les collectifs de gauche qui œuvrent comme médias alternatifs. Facebook les a fait "disparaître" des fils d’actu des gens. Facebook, ses algorithmes, ou une petite main chargée de la modération… Qui sait ? A peu près tous avaient publié des informations sur une personne infiltrée par les forces de l’ordre dans les instances d’organisation du contre-sommet du G7 et chez les gilets jaunes. Ont-ils été censurés ? Quoi qu’il en soit leurs publications suivantes sur le réseau social n’ont touché que quelques personnes contre plusieurs dizaines ou même centaines de milliers auparavant. De quoi crier à la censure... Rebelote mercredi 23 octobre quand CGT cheminots et Sud Rail crient à la censure, leurs comptes Facebook ayant été limités ou bloqués. Même punition pour l'excellent JuiceMedia dont une vidéo a été retirée de Youtube à la demande de l'Indonésie pour les internautes de ce pays...

@TheJuiceMedia sur Twitter - Copie d'écran
@TheJuiceMedia sur Twitter - Copie d'écran

Mais la colère de ces collectifs et syndicats est infondée. Ils sont pleinement responsables de ce qui leur arrive et cela devrait d'ailleurs servir d’avertissement pour la presse classique qui se repose de plus en plus sur Facebook, Youtube ou Google pour toucher son public.

Tweet de Sud Rail - Copie d'écran
Tweet de Sud Rail - Copie d'écran

Passons rapidement sur le paradoxe qui consiste à lutter contre le grand capital tout en se rendant totalement dépendant de ce dernier pour véhiculer ses messages... Déléguer totalement à une entreprise privée la diffusion de son message est une hérésie. Par principe, et c'est très logique, elle décidera de ce qui peut être diffusé ou pas sur ses serveurs, procèdera à une modération des contenus qui ne répond qu'à ses propres besoins ou sa vision du monde. Pour l'instant, il faut se rendre à l'évidence, ce sont plutôt les créateurs de contenus qui pensent à gauche qui se font laminer...

Adieu contenus...

Mieux, l'entreprise privée peut décider de vous exclure en un instant. Conséquence ultime : tous les contenus créés depuis des années peuvent ainsi disparaitre en un clin d'oeil. Décider de se placer dans une telle position de dépendance est déjà un choix masochiste. Ce qui n'est pas hébergé chez vous, est voué à disparaître. Ne pleurez pas si votre contenu hébergé chez Facebook disparaît. C'est dans l'ordre des choses.

Méchants censeurs... - Copie d'écran Facebook
Méchants censeurs... - Copie d'écran Facebook

Fais pas ton Jean-Marie Cavada...

Pleurer parce que les problèmes - dont on savait qu'ils allaient surgir, sont apparus, c'est triste. On dirait Jean-Marie Cavada faisant semblant de découvrir que le texte poussé par les lobbies ne va pas forcer Google à faire vivre les patrons de presse.

Vous avez fermé vos blogs. Vous avez réduit la production de contenus sur vos sites Web. Vous avez privilégié la diffusion de contenus sur des plateformes comme Youtube ou Facebook. Vous vous êtes pliés à toutes les lubies de Google ou de Facebook sur les formats de publication. Vous avez offert les données personnelles de vos visiteurs à Google au travers des statistiques de visites ou des polices. Vous avez vendu vos visiteurs au travers des boutons de partage. Comment pouvez-vous imaginer un instant que l'on va vous plaindre le jour où ces plateformes vous envoient paître ?

Vous n'avez pas su fidéliser vos lecteurs en leur ouvrant les portes de vos serveurs, en les accueillant, vous avez fait le choix de les "monétiser" en les aiguillant vers les plateformes. Vous êtes désormais incapables de conserver vos lecteurs sans l'aide de ces plateformes ? C'est que quelque chose est complètement raté dans votre modèle de publication.

Facebook, Google, Youtube et toutes les plateformes, en règle générale, ont compris une chose qui a fait leur succès : les utilisateurs sont des fainéants. Ils préfèreront une opération en un clic plutôt que quelque chose d'un peu compliqué, même si c'est au prix de la vie privée, des données personnelles, ou de la propriété des contenus. Il est plus facile d'uploader une vidéo sur Youtube que de mettre en place un serveur de medias, un serveur Web... Et ça mange moins de bande passante. La simplicité rend les utilisateurs fainéants.

Mais cela peut aussi les empêcher de communiquer et de s'organiser. A titre d'exemple, les auteurs de l'application Tsunami Democratic en Catalogne on eu la mauvaise surprise de voir :

  • les principaux fournisseurs d'accès à Internet en Espagne faire du DNS menteur pour leur site, puis de le voir tomber sur demande judiciaire.
  • Github mettre hors ligne le compte de l'application qui est désormais disponible sur Telegram. Là, il s'agit d'une demande de la Garde Civile, qui accuse les auteurs de pousser les gens à commettre des "actes terroristes". En d'autres termes, un pur délire.

Au début des Internets, il y avait eu des réponses activistes à ce genre de pressions. Elles s'appelaient l'Autre, No-Log... Il va peut-être être urgent de relancer des alternatives...?

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