Chiffrement : les temps paniquent
« Les lois mathématiques sont louables, mais la seule loi qui s'applique en Australie est la loi australienne ». Interrogé à propos de la cryptographie lors d'une conférence de presse organisée à l'occasion d'une énième proposition de loi visant à civiliser Internet-zone-de-non-droit, c'est par ses mots que répondait un premier ministre australien un brin fâché avec la science, Malcolm Turnbull.
Toute la conférence est à l'avenant, le ministre enfilant les perles avec une impressionnante constance. Comme de bien entendu, ses déclarations furent accueillies avec force quolibets. Ce n'est, après tout, pas parce qu'on inscrirait que la Terre est plate dans la Constitution australienne que notre belle planète perdrait soudainement de sa rotondité.
Pourtant, aux USA, en Allemagne, en France ou au Royaume-Uni, on entend dorénavant ce genre de bruits de bouche de manière tristement fréquente jaillir de la gorge de nos dirigeants. Le développement d'un chiffrement devenu facile d'accès, voire ubiquitaire — notamment grâce aux messageries chiffrées, telles Signal ou WhatsApp, inquiète la classe gouvernante. Si les Etats autoritaires, comme l'Égypte de Sissi à laquelle nous vendons des stylos, n'y vont pas par quatre chemins, dans les « démocraties occidentales », on fait donc montre d'un peu plus de subtilité. Notre président en exercice, Emmanuel Macron, demandait par exemple la création d'un « système de réquisition légale de leur service crypté comparable à celui qui existe aujourd’hui pour le secteur des opérateurs de télécom. » Pédopornographie, terrorisme, ce sont toujours les mêmes épouvantails qui sont sortis des placards. Bien sûr, l'opinion publique étant sensible à ces sujets, les entreprises concernées sont ainsi mises sous pression.
Dans le cas du chiffrement de bout en bout, il est impossible pour ces intermédiaires...