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par Antoine Champagne - kitetoa

Libye : silence bancaire

Le secret bancaire suisse est souvent brocardé de ce côté des Alpes. Pour autant, avez-vous vu une banque dans ce pays annoncer qu'elle gère ou détient des avoirs Libyens ? Non. Il n'y a pas grand monde dans le petit village financier pour se lever et dire publiquement : nous détenons quelques millions (milliards) de dollars d'avoirs libyens, nous avons prévenu les autorités et ces montants sont désormais gelés.

Le secret bancaire suisse est souvent brocardé de ce côté des Alpes. Pour autant, avez-vous vu une banque dans ce pays annoncer qu'elle gère ou détient des avoirs Libyens ? Non. Il n'y a pas grand monde dans le petit village financier pour se lever et dire publiquement : nous détenons quelques millions (milliards) de dollars d'avoirs libyens, nous avons prévenu les autorités et ces montants sont désormais gelés. A défaut de permettre aux banquiers d'alléger leur conscience, ce serait une opération de communication intéressante. Laurent Wauquiez a expliqué hier sur RMC qu'il fallait surveiller de près tous ces avoirs. Fort bien. Dans les faits, que se passe-t-il ?

Si la moitié environ de la production pétrolière du pays est arrêtée, il reste une autre moitié qui continue d'être vendue. Et pour vendre du pétrole, il faut des banques pour faire circuler les sous qui sont liés à ces transactions. Ne perdons pas de vue que 10% des exportations de pétrole libyen atterrissent en France. A qui sont réglés ces barils de pétrole ces derniers jours ? Sur quels comptes en banque et dans quel pays ? Par quelles entreprises pétrolières françaises ?

Autant d'informations qui pourraient intéresser l'ONU. Il faudrait être naïf pour penser que ces sommes ne sont pas utilisées par le gouvernement libyen pour réprimer avec la violence que l'on sait la rébellion en cours.

Reflets.info a adressé ce matin un mail au service de presse de Christine Lagarde (sur leur recommandation) avec quelques questions simples. A l'heure où nous publions, le service de presse, qui mange ses ChocoBN© du quatre heures comme tout le monde, n'a pas répondu. Nous ne manquerons pas de modifier cet article en fonction des éventuelles réponses que nous recevrons. Bien entendu, ami lecteur, rien ne t'empêche de demander à Bercy via Twitter (nous le ferons aussi) de nous répondre. Si nous voulions faire un peu d'anticipation, nous poserions les mêmes questions pour l'Arabie Saoudite. Mais, une chose à la fois, on ne voudrait pas que le service de presse de Bercy soit débordé.

En attendant, voici la liste de nos questions :

  • Sait-on quel est le montant des avoirs libyens détenus par des banques françaises ou ayant une présence en France ?
  • La répartition de ces avoirs (appartenant directement au colonel Kadhafi ou sa famille, au gouvernement libyen, aux entreprises libyennes, etc.) ?
  • Quelles banques françaises gèrent des avoirs notamment détenus par la Libyan Investment Authority (LIA) ?
  • Pour quels montants et dans quelles activité (gestion de fonds, participations) ?
  • La répartition des avoirs de la LIA en France (participations dans des entreprises) ?
  • La France a-t-elle gelé des avoirs libyens et si oui, quelle est la répartition de ces avoirs ?

En ce qui concerne les importations de pétrole :

  • La France est destinataire d'environ 10% des exportations de pétrole libyen. La production libyenne a été réduite d'environ 50% ces derniers jours. Il reste donc 5% des Exportations qui continuent d'arriver en France. Quelles sont les procédures administratives et financières qui encadrent les importations de pétrole ?
  • Des autorisations de l'Etat sont-elles nécessaires ?
  • Les entreprises pétrolières sont-elles totalement libres d'importer ce pétrole. Comment sont effectués les règlements financiers et auprès de qui en Libye ?

A la Fédération française des banques, on ne dispose d'aucune information sur les avoirs libyens en France. En revanche, la FBF souligne que Bercy a demandé le 26 février aux banques d'être particulièrement vigilantes et de signaler tout mouvement suspect à Tracfin. La FBF ne sait pas si des avoirs ont été gelés.

Aux Etats-Unis, 30 milliards de dollars d'actifs libyens ont été gelés.

Pour autant, aucune banque n'est venue expliquer publiquement qu'elle gérait des centaines de millions de dollars pour le compte de la LIA. Ce qui est le cas de plusieurs établissements. Le Huftington Post a fait ce travail et rendu publiques une parties des informations. Il y a par ailleurs quelques différences de taille entre le "communiqué de presse" de Bercy et "l'executive order" signé par Barak Obama. Encore un effort M. Sarkozy...

 

Quelques liens Wikileaks :

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