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par drapher

Emmanuierre Macraz : la gouvernance française bicéphale

Emmanuiere Macraz : la créature bicéphale révélée par @GuillaumeTC de #CroisonsLes C'est une première dans l'histoire de la Vème République : le président élu partage désormais le pouvoir avec un représentant de la "société civile". Ce sont deux personnalités, l'une élue, l'autre non, qui désormais sont aux manettes du pays, se félicitent mutuellement et surtout décident de concert de ce qui doit "changer".

Emmanuiere Macraz : la créature bicéphale révélée par @GuillaumeTC de #CroisonsLes

C'est une première dans l'histoire de la Vème République : le président élu partage désormais le pouvoir avec un représentant de la "société civile". Ce sont deux personnalités, l'une élue, l'autre non, qui désormais sont aux manettes du pays, se félicitent mutuellement et surtout décident de concert de ce qui doit "changer". Cette alliance dans la gouvernance, entre Pierre Gattaz, le "patron des patrons" (étrange appellation si l'on y pense bien) et Emmanuel Macron, le "patron des recettes publiques" (en fin de compte, il est surtout censé gérer "l'argent de tous" et arbitrer les grandes orientations de la sphère publique) est affichée sans aucun complexe. Ce pouvoir bicéphale, d'un représentant du "peuple" (enfin, disons d'une minorité qui a adhéré et d'une majorité qui a voté dans l'effroi médiatique pour empêcher l'accès au trône républicain de la bête immonde version 3.0) et d'un représentant d'une minorité de décideurs économiques (tous les chefs d'entreprises ne sont pas adhérents du MEDEF, loin de là) est un choc de culture. Un changement saisissant dans le partage des pouvoirs.

Journalistes économiques encartés chez Emmanuierre Macraz ?

Les journalistes éditorialistes adhérents virtuels du MEDEF, tels un Dominique Seux, n'arrivent plus à cacher leur emballement pour les réformes par ordonnances concoctées par Emanuierre Macraz : ils en parlent depuis des années, ils en rêvent, ils en ont fait leur leitmotiv. Pour Seux, il n'y a d'avenir économique et de réduction du chômage que dans : — La réduction des déficits publics — La baisse des cotisation sociales (appelées "charges" par l'éditorialiste) — L'assouplissement du code du travail pour apporter de la flexibilité aux employeurs — La baisse de l'ISF (les riches devraient être moins taxés, ce qui leur permettrait d'investir plus) — L'application du "modèle du travail anglo-saxon et/ou nordique" dans la société française.

N'importe quel observateur de l'histoire économique des 10 dernières années peut démontrer à Dominique Seux que partout autour de la France, dans des pays voisins, les grandes réformes de flexibilisation, réduction des déficits, assouplissement du code du travail et autres baisses pour les plus riches n'ont pas réduit le chômage. Les cas de l'Espagne et de l'italie sont assez marquants. Celui de la Grèce (même si son histoire économique est particulière) frappant par sa puissance destructive, sociale et économique.

L'éditorialiste des Échos se méfiant de ces exemples — désormais un peu cramés — il dégaine donc (encore une fois) les Etats-Unis ou le Royaume-Uni. Pas de chance, dans les deux cas, si les chiffres officiels du chômage sont bas, la réalité sociale du travail y est catastrophique : emplois sous-payés, smic minable ou absent, travail précaire massif, protection sociale en passe de devenir inexistante, pauvreté galopante, endettement massif des ménages. C'est pourquoi Dominique Seux et ses amis membres virtuels du MEDEF (mais encartés), passent vite à d'autres modèles pour appuyer leur thèse du "précariser et fragiliser plus les salariés pour gagner plus et baisser le chômage plus".

L'histoire improbable des modèles

L'Allemagne est encore un modèle pour Macraz et Dominique S, avec son quasi plein emploi, ses comptes publics positifs, ses exportations plus que bénéficiaires (hors-la-loi en réalité selon le droit européen), et son "dialogue social" fantastique. Certes, Dominique S. sait aussi qu'aujourd'hui l'Allemagne a été débunkée sur sa "réussite" (et que les auditeurs savent ce qu'il en est) qu'il a pourtant vendue à l'antenne d'Inter et dans les colonnes des Echos de si nombreuses années : mini-jobs, retraités forcés de travailler (sous le seuil de pauvreté), emplois à temps partiels sous-payés, protection sociale abaissée, investissements publics gelés (avec des manques criants dans les services publics), pauvreté des salariés qui a explosé. La sociologue Dominique Méda, spécialiste du travail, invitée à la suite de la chronique de notre bon docteur Dominique, rappelle un chiffre très frappant et potentiellement prophétique pour la France des années Macraz (après application des réformes par ordonnance, 1, 2 et 3) : 23% de salariés pauvres en Allemagne contre 8% en France.

Il serait donc — selon Macraz, Dominique S. et d'autres — positif d'appauvrir les salariés dans des proportions incomparables pour parvenir à obtenir d'hypothétiques bons résultats sur les chiffres du chômage, basés sur un changement de règles qui forcerait en réalité les personnes à travailler pour moins cher, avec moins de protection sociale, sans possibilités de refus d'un travail même minable, avec moins de protection salariale donc sans garanties fortes de pouvoir se défendre à l'encontre des décisions patronales ? Oui, mais non. Puisque le modèle désormais un peu contesté de l'Allemagne fait tâche, c'est le modèle danois, suédois ou norvégien que l'on appelle à le rescousse. Ce que n'a pas osé faire Dominique dans sa chronique hier matin, peut-être par manque de temps, ou bien parce qu'il se réserve cette munition pour plus tard ? Toujours est-il que la sociologue, elle, l'a fait, pour dénoncer l'escroquerie allemande, mais surtout prévenir du leurre nordique : si la flexisécurité est appliquée là-bas, les conditions du rapport de force entre entreprises et salariés n'a absolument rien à voir avec celles du pays gouverné par Macraz (moins de 10%). En Suède, ou en Norvège, les représentants syndicaux sont membres du CA de leur entreprise à un tiers, et les salariés sont syndiqués à plus de 60% (72% en Finlande). Il faut donc imaginer que licencier, ou changer le temps de travail, les salaires, là-bas, ça se fait, mais dans un rapport de force qui n'a rien à voir avec celui présent en France.

Gouvernance bicéphale : des petits fours pour Jean-Claude

La nouvelle gouvernance à deux têtes du Macraz commence déjà à faire un peu tâche. Après le jupiterisme, la pensée complexe, le labrador, les déguisements, le très jeune président de "pas tous les Français du tout" commence à fatiguer déjà sévèrement la population. En moins de 4 mois. Un exploit. Mais laissons la parole à l'un des figurants de la farce en cours s'exprimer, la partie "Az" de l'hybride : "Le modèle social français est à bout de souffle".

Ah oui ? Et la faute à qui ? A la gôche ? A l'immobilisme français ? Aux syndicats ?

Ou bien aux 30 ans de politique de l'offre toujours en direction des entreprises et au détriment des salariés ? Et au fait, Jean-Claude, dans tout ça, il reprendra bien des petits fours ?

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