Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
par Antoine Champagne - kitetoa

USA : après l'élection présidentielle, le mois de tous les dangers

Une société clivée par un populiste sans foi ni loi

Il l'avait annoncé, Donald Trump s'est auto-déclaré vainqueur de la présidentielle. Cette annonce risque de polariser encore plus une société déjà au bord du gouffre après quatre année de délires et de politique clivante.

Donald Trump - D.R.

Les votes ne sont pas encore tous dépouillés, mais qu'importe ? Donald Trump a annoncé, comme il l'avait dit auparavant, qu'il était le vainqueur de la présidentielle américaine. Il évoque une « fraude majeure » pour la nation américaine, comme si le camp de Joe Biden tentait de lui voler sa victoire. Donald Trump est un homme acculé. Les affaires judiciaires l'entourent, comme Nicolas Sarkozy en France. Il pourrait même, selon certains observateurs, être le premier ancien président à intégrer une prison. Tente-t-il le tout pour le tout avec ces déclarations qui ne manqueront pas d'inciter quelques fans illuminés à défendre leur idole au prix de quelques vies ? De nombreux Américains prennent acte, dans chaque camp, de la fracture profonde qui est née dans le pays. Une nouvelle guerre civile n'a jamais été aussi proche, préviennent les plus inquiets. D'ailleurs, au delà des milices d'extrême-droites, toujours très armées et qui n'hésitent pas à verser dans la violence, les électeurs de « gauche » ont dévalisé les magasins d'armes en prévision d'un contexte post-scrutin dangereux.

Tweet de Donald Trump - Copie d'écran
Tweet de Donald Trump - Copie d'écran

En annonçant sa victoire avant l'heure, Donald Trump ouvre la voie à une bataille juridique - les deux camps ont engagé une armée d'avocats - et dans ce laps de temps, les deux camps hystérisés pourraient être menés à l'affrontement violent. Les États-Unis où les armes circulent massivement dans la population, ne sont pas l'abri d'un massacre, le nombre d'illuminés augmentant par ailleurs violemment ces derniers temps. Le phénomène QAnon qui voit en Donald Trump un sauveur de l'humanité, en guerre secrète contre les élites américaines et mondiales, elles qui veulent asservir nos enfants car elles sont pédophiles, pourrait bien être à l'origine d'un dérapage sanglant.

En attendant, Donald Trump ne fait rien pour apaiser la situation. Il conforte dans leur délire les dingos de QAnon. Il encourage ses supporters à intimider les gens de la campagne de Biden quand ils coupent les routes. Il demande à ses supporters de faire en sorte qu'il n'y ait pas de vote dans les bureaux de vote... Il suffirait d'un supporter un peu trop enthousiaste pour que tout bascule. Ce n'est pas arrivé pendant le vote, cela pourrait arriver après, Donald Trump ayant décidé de jouer les prolongations et d'annoncer publiquement qu'il avait gagné, que les votes contre lui étaient le résultat d'une fraude, qu'il allait saisir la Cour suprême (qui lui est acquise après la nomination controversée d'une juge conservatrice).

Le monde au bord de l'abime encore quatre ans ?

« Trump a un certain moment a fait passer un tweet concernant une femme pasteure Mme Stella Immanuel, à la fois médecin qui gérait une "clinique", qui vient du Cameroun et qui est citoyenne installée aux Etats-Unis. Elle avait fait l'apologie de l'hydroxychloroquine, la potion magique du Dr Raoul. Avec un groupe de pasteurs et de médecins, ils s'étaient présentés devant la Cour suprême, vantant les mérites de l'hydroxychloroquine et Trump les avaient trouvés géniaux et avait fait un tweet. Et quand on regarde de plus près le CV de Stella Immanuel, elle appartient à une secte qui fait de l'exorcisme, qui traite les maladies, surtout les maladies gynécologiques, en faisant sortir du corps les incubes et les succubes, ces démons qui abusent sexuellement des personnes endormies... C'est une exorciste plus que louche, pas loin de la sorcellerie, pourtant Donald Trump était enthousiaste et avait retweeté son action. On rappelle qu'il s'agit du président des Etats-Unis... », indique Denis Lacorne, politologue au Centre de recherches internationales de Sciences-Po

« Les méthodes de Trump sont une forme d'autoritarisme. Cela consiste à remettre en cause la légitimité des élections, de dire d'avance que s'il perd, c'est parce qu'il y a de la fraude. Il y a là un comportement autoritaire qui est très antidémocratique, qui est choquant. Ce qu'il y a d'inquiétant aux États-Unis, c'est que les gens ont tellement peur qu'il y ait une crise, que même dans les toutes petites villes, par exemple à Alamo, une toute petite ville au nord-est de San Francisco, comme à Washington, à New York ou comme à Los Angeles, les commerçants ont couvert leurs vitrines avec des planches de bois de peur qu'il y ait des émeutes et qu'on détruise leurs boutiques. Le fait de se barricader la veille d'une élection, c'est du jamais vu. Cela veut dire qu'il y a une peur, une angoisse et en même temps cela montre l'importance de l'enjeu », précise Denis Lacorne.

Mercredi en fin d'après-midi, heure française, le résultat de l'élection restait incertain. Joe Biden compte 238 grands électeurs contre 214 pour Donald Trump. Joe Biden est en passe de gagner le Wisconsin qui offre dix grands électeurs de plus. Trump a immédiatement annoncé qu'il allait demander un recomptage des voix.

Va-t-on devoir vivre quatre ans de plus avec un fou, un inculte, dénué de toute forme d'intelligence, incapable de diriger une entreprise, encore moins un pays comme les États-Unis, au pouvoir ? Le niveau intellectuel, la versatilité de Trump, son incohérence et sa propension à prendre des décisions dangereuses qui engagent des milliers ou des millions de personnes sur la base d'analyses farfelues ont été détaillés par Bob Woodward, le journaliste d'investigation à l'origine du scandale du Watergate dans un livre : Peur - Trump à la Maison Blanche. Quatre ans de plus, c'est le risque de précipiter la planète dans l'abime à tout instant...

Quelque soit le résultat de cette élection, c'est une Amérique fracturée qu'il faudra gouverner.

2 Commentaires
Une info, un document ? Contactez-nous de façon sécurisée