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par redg

Tyrannie de la centralisation énergétique (1/2)

En amont du débat sur le nucléaire civil, se profile un changement de paradigme en matière de production d'électricité, à la fois motivé par des innovations techniques, par la durable crise énergétique à laquelle sont confrontés nos sociétés, et par une conscience écologique de plus en plus consensuelle.

En amont du débat sur le nucléaire civil, se profile un changement de paradigme en matière de production d'électricité, à la fois motivé par des innovations techniques, par la durable crise énergétique à laquelle sont confrontés nos sociétés, et par une conscience écologique de plus en plus consensuelle.

Dans le contexte d'une raréfaction des énergies fossiles et de l'apparition de véhicules électriques, l'électricité bon marché appartiendra bientôt au passé, l'indexation du prix du kilowatt/heure électrique avec celui du pétrole se fera au rythme du déploiement du nouveau parc automobile.

Les récents déboires du nucléaire alimentent déjà la tendance haussière (+6% par an planifiés pour tenter de sécuriser nos charmantes bouilloires), malgré que les coûts réels de la filière ne soient pas encore cernés, y compris par la scrupuleuse Cour des Comptes qui se penche actuellement sur cette problématique, qui concerne jusqu'à des populations qui ne sont pas encore sorties des maternités...

Sombre tableau, mais il y a là peut-être une occasion pour les populations de reprendre en main, au moins en partie, la production énergétique actuellement gérée par d'opaques systèmes technocratiques.

 

Complicité passive de l'homo electricus

Dans notre France Atomique, il est bon de rappeler de quoi on se rend complice en payant sa facture d'électricité. La part de l'électricité dans notre consommation d'énergie primaire était de l'ordre de 40% en 1998, soit un enjeu du même ordre que le pétrole, qui comme chacun sait est la cause de nombreux désordres géopolitiques, et ce n'est qu'à la faveur de la crise que l'on a vu en 2011 se contracter de 7% nos besoins électriques, baisse inédite depuis que le 220 volts abreuve nos foyers. Ce dernier point a son importance car les zélotes de l'électronucléaire insistent généralement sur le fait que notre consommation est en perpétuelle augmentation.

Sans reprendre l'argumentaire quasi exhaustif du dossier du Canard Enchainé sur la question du nucléaire, on évoquera rapidement quelques éléments illustratifs de l'obscénité de notre système actuel, à la lumière des avancées récentes de la radiobiologie.

Mesurons tout d'abord le danger atomique. L'unité en vigueur est le Sievert, sorte de mètre élastique censé quantifier le «risque». Elastique car pondéré selon le type de rayonnement, et selon le type de tissu vivant considéré. Ces facteurs de pondérations évoluent au fil des découvertes scientifiques et probablement du lobbying de l'industrie nucléaire, première utilisatrice de cette unité, que ce soit pour cerner l'exposition des travailleurs de la filière, ou pour communiquer avec le grand public quand des fuites diverses se produisent. L'unité de mesure se prête donc aisément à l'enfumage du public, dans tous les sens du terme.

Car l'effet sur le vivant des faibles doses de rayonnements ionisants et des contaminations internes était censé suivre docilement une courbe dite «linéaire sans seuil», théorie fort pratique pour les exploitants de centrales qui envoient au casse pipe leurs personnels en cumulant des évaluations de «dose», mais qui est reconnue comme étant approximative, y compris par l'ICRP, l'organisme international qui s'occupe notamment de définir ces fameux facteurs de pondération du Sievert.

Mais voici que l'on découvre récemment de forts facteurs de non linéarité. Les cellules soumises à un rayonnement ne répondent pas seulement de manière individuelle, mais communiquent avec leurs voisines à priori non impactées, avec pour résultat d'éventuels suicides collectifs par apoptose, ou pire, des dommages chromosomiques sur des cellules non concernées par l'irradiation! Se produisent ainsi des effets dits «non ciblés» en sus des classiques et déterministes atteintes à l'intégrité de l'ADN , certains n'apparaissant que longtemps après l'irradiation (instabilité génomique), tout ceci ouvrant la voie à la cancérisation ou à des maladies auto-immunes.

D'autre part la réponse des individus diffère notablement, en raison de disparités subtiles au niveau de la régulation des «erreurs» génétiques . On a donc affaire à une radio-sensibilité individuelle délicate à quantifier dans l'état des connaissances.

Il s'ensuit que la «relation linéaire sans seuil» ne rend plus compte correctement de cette loterie morbide. L'évaluation officielle des risques telle que pratiquée en devient coupable, car déconnectée des avancées scientifiques.

On reprendra la conclusion à mots couverts d'un rapport par un expert de la Division Production Nucléaire d'EDF: "Ces faits scientifiques pourraient, si les législateurs en tiennent compte, avoir une conséquence sur l’évolution future des limites d’exposition réglementaires."

Ce sont ces mêmes limites d'exposition réglementaires qui ont été relevées d'un facteur 20 par les autorités japonaises.

Le problème des déchets, des fuites inévitables, et du démantèlement des réacteurs devient soudain plus aigu, comment justifier un tel cadeau à nos descendants, juste pour assouvir les besoins en électricité de deux ou trois générations...

 

Ne rien attendre des puissants.

Car le mal est profond, il touche nos élites de plein fouet, sous la forme d'un «biais industrie lourde» typique du sérail des Grandes Ecoles, ou des Etats fortement centralisés .

La complicité passive du public est aussi palpable, les réactions populaires se montrent étrangement complaisantes, quand le problème n'est pas tout simplement ignoré. Qui se soucie du lien tangible qui relie le chauffe-eau et la playstation aux déchets nucléaires français entreposés à ciel ouvert en Sibérie?

Pour couper l'herbe sous le pied de ces lobbies protéiformes, responsables mais jamais coupables, passons à l'action individuelle, car si le peuple n'a jamais été démocratiquement consulté en France, c'est aussi à chaque facture EDF que l'on vote.

En Allemagne, la cogénération se développe techniquement et quantitativement car subventionnée depuis 2009, soit bien avant l'electro-nucleo-choc de Fukushima, via un tarif avantageux de rachat par le « réseau ». S'ils ferment leurs centrales, ce n'est pas par idéalisme hippy, mais plutôt grâce à un positionnement stratégique, une maturité des procédés industriels, et un électorat sensible à l'écologie.

Face à nos autorités autoritaires, et à la sensibilité politique généralement plutôt Marine qu'Eva, on adoptera une tactique différente. En effet il est peu judicieux de miser sur un rachat par le réseau de nos vertueuses productions électriques décentralisées (les bobos qui ont cru bien faire en couvrant leur toit de modules photovoltaïques en sont pour leurs frais avec l'évolution négative du prix de rachat du kilowatt/heure).

Et bien soit. On se déconnectera du réseau.

 

Des réseaux qui séparent, au lieu de relier.

Cette énergie en apparence illimitée, diffusée par EDF par une coûteuse toile de béton et de métal, nous déresponsabilise, ces innocentes factures sont en fait des chèques tirés sur le compte des générations futures, mais aussi de ces enfants surexposées aux leucémies autour des centrales «sans que l'on puisse mettre en cause les rejets des réacteurs», chose toutefois constatée dans trois pays européens... ( France, Allemagne, et Grande bretagne )

Dans un mécanisme similaire, et à titre illustratif, le réseau d’adduction d'eau nous dédouane de la qualité des sols environnants, en reportant à des entités centralisatrices la responsabilité de fournir de l'eau supposée saine, mais c'est un autre débat...

Un réflexe citoyen, en désespoir de cause face aux prises de positions pro-nucléaires irresponsables des présidentiables peut être de couper cet indécent cordon ombilical.

Définitivement.

Comment y parvenir  ? Nous aborderons cette question dans le deuxième opus de cette série sur l'énergie :

Pratiquer la guérilla électrique citoyenne (2/2)

 

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