Qui veut être l'associé d'Anthony Bourbon ?
Le Blast Club : des investissements qui pourraient être périlleux
Ce « club » permet d'investir dans les levées de fonds de startups y compris pour des particuliers avec peu de moyens. Mais ses membres n'ont souvent aucune expérience de ce type de marché. Ont-ils vraiment conscience que si l'on peut gagner beaucoup, on peut aussi tout perdre ? Enquête sur une nouvelle tendance, la démocratisation de l'accès au financement des futures licornes ou des futures oubliées de l'histoire du Net...
Depuis deux ans, Anthony Bourbon est jury de l’émission « Qui veut être mon associé » sur M6. Il est présenté, ce qui est logique, comme le patron de sa plateforme d'investissement « Blast ». Ces passages télé ne peuvent manquer de faire croitre la notoriété d'Anthony Bourbon et d'inciter, ne serait-ce que par curiosité, de nombreux téléspectateurs à se renseigner sur ce « club » qui semble avoir fait la fortune de ce membre du jury. D'autant qu'un autre juré, le célèbre basketteur Tony Parker en est également membre. Mais les risques liés à ces investissements ne sont jamais mentionnés à l’antenne, où investissement et divertissement se mélangent.
« Avec mon mari on a découvert le Blast Club en regardant par plaisir "Qui veut être mon associé ? " (QVEMA) où Anthony Bourbon était juré ». C'est ainsi que Camille, comme toutes les personnes que nous avons interviewées, a découvert le Blast Club. Depuis 2023, elle a investi plus de 5.000 euros avec son mari dans divers projets sur la plateforme, dont 1.000 euros dans le rachat de parts de Blast, directement auprès de ses fondateurs. Le 12 juillet 2024, Anthony Bourbon et son co-fondateur, Samuel Guez, ont mis en vente 20% de leurs parts auprès de leurs 8.000 membres pour un montant total de 30 millions d’euros. Les fondateurs ont valorisé leur entreprise à 150 millions d’euros, sans expertise indépendante.

Blast est une plateforme d'investissement collectif et revendique être un club permettant à ses membres de co-investir dans des startups aux côtés d'entrepreneurs expérimentés et cela à partir de 1.000 euros. Le nombre d'adhérents ne cesse de croître, passant de 500 membres en 2022 à 8.000 membres en 2024. Cette augmentation est en bonne partie liée à la médiatisation d’Anthony Bourbon et donc du Blast Club dans l'émission de M6, QVEMA. Dans cette émission, des entrepreneurs présentent leurs projets à un panel d'investisseurs stars dont font partie Antony Bourbon mais aussi Tony Parker, ancienne star de la NBA ou encore, Éric Larchevêque, entrepreneur à succès. Ces derniers peuvent, s'ils le souhaitent, soutenir les idées proposées par les entrepreneurs en achetant une part du capital de l’entreprise.
Exposition de Blast sur M6 : risques négligés
En prime time, le mercredi 31 janvier à 21h30, le co-fondateur de Blast, Anthony Bourbon, est présenté comme un entrepreneur en pleine ascension « Fort de son succès et de sa notoriété, Antony est demandé partout. Du Chinese Business Club, au BIG, l'événement entrepreneurial annuel de la BPI, en passant par la couverture de Forbes ».

En tant que membre du jury de l’émission, il profite de l’occasion pour mentionner sa plateforme d’investissement dans les startups, adressant une invitation indirecte aux deux millions de téléspectateurs hebdomadaires: « Blast est un club d'investissement où des particuliers peuvent investir à mes côtés à partir de 1.000 euros. ».
Si sur le site, les avertissements sur les risques sont présents, ce n'est pas le cas lors de l'émission, qui est pourtant le premier contact avec de futurs potentiels clients. Bien que cette séquence n'ait été diffusée qu'une seule fois, son impact a été significatif, et Blast en est pleinement conscient. Lors de l'inscription sur la plateforme, un conseiller client prend contact pour effectuer une présélection. Sa première question est révélatrice : « vous nous connaissez surement par l’émission QVEMA ? ». Partout, Anthony Bourbon mentionne sa qualité de membre du jury de « Qui veut être mon associé ? ». Sur Instagram, sur le site du Club, dans des interviews...


Cette séquence pose deux problèmes juridiques importants : d’une part, il n'y a pas d'avertissement sur les risques liés aux investissements, et d'autre part, l'émission ne distingue pas clairement la publicité du contenu, ce qui est pourtant exigé par la loi sur les pratiques commerciales trompeuses.
À chaque diffusion, un encart souligne le statut de co-fondateur du Blast Club d'Anthony Bourbon. Le Blast Club ne manque pas d'exploiter cette visibilité médiatique, multipliant les communications à ce sujet. Sur son site, plus de 30 articles sont consacrés à l'émission, servant à informer les membres du club comme si l'actualité du club et celle de l'émission étaient étroitement liée.
Chez M6, les réponses à nos questions se sont limitées à une courte déclaration : « Afin de ne pas nuire au concept et à la réputation de l’émission, du producteur et /ou de la chaîne commanditaire, l’investisseur s’engage à assurer une séparation totale entre les offres d’investissements réalisées au cours de l’émission et les activités de levées de fonds qu’il peut y avoir par ailleurs dans le cadre de clubs et/ou de réseaux d’investissements privés. »
Interrogée, l'ARCOM indique que « si la tonalité générale de cette présentation est élogieuse, il est toutefois habituel que des intervenants, choisis pour des émissions en fonction de leurs compétences, soient présentés de manière laudative pour mettre en avant leur parcours et leur expertise. ». L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique indique ne pas avoir « reçu de saisine sur cette séquence, néanmoins, le régulateur prévoit d’échanger avec l’éditeur concerné. ».

« Investissez avec nous » : une promesse qui s'effrite
Anthony Bourbon déclare dans une interview que le Blast Club est née de son passage dans QVEMA « quand j’ai fait QVEMA la première saison je recevais des tas de messages sur les réseaux "mais moi j’aimerais investir avec toi" puis je me suis demandé comment tout le monde peut investir avec moi et l’idée elle part de ça en fait ».
Blast affiche fièrement sa promesse sur son site : « Investissez avec Anthony Bourbon et Tony Parker ». C’est un argument central qu'il martèle lors de ses interviews : il investit dans tous les dossiers. « on est tous les deux mouillés [avec Samuel Guez] dans l’investissement ».
L'investisseur potentiel pourrait s'attendre à ce que les deux entrepreneurs investissent systématiquement avec lui.
Or règne une certaine opacité. Nous avons contacté le club en nous faisant passer pour un potentiel investisseur afin de vérifier quelles informations sont fournies aux particuliers. Lorsque nous avons demandé si Tony Parker investissait dans tous les deals ou seulement dans certains, la chargée de clientèle a refusé de répondre, sans fournir ni précisions ni détails sur les montants investis par Tony Parker. Elle a simplement déclaré que ces informations étaient « de l'ordre privé » et qu'elle ne pouvait en dire plus à ce sujet.
Pourtant, sur LinkedIn, Anthony Bourbon, dans un post annonçant l'arrivée de Tony Parker à ses côtés, affirme : « Tony investira son argent personnel dans tous les deals proposés ».

En fait les choses ne sont pas aussi simples. Interrogé, Samuel Guez précise que si Anthony Bourbon investit dans tous les dossiers présentés par le Blast Club, les montants peuvent varier :
« Je ne comprends pas pourquoi, ne pas savoir combien investit M. Bourbon sur une Startup, pourrait entraîner de la confusion chez un investisseur ? Nous pensons que c’est justement le fait de communiquer le montant investit par M. Bourbon qui créerait un biais chez les potentiels investisseurs. C’est la raison pour laquelle ces montants ne sont pas communiqués. En effet, si M. Bourbon annonce qu’il investit moins sur une des startups, les membres pourraient penser que le dossier est moins bon. Alors qu’en réalité, cela peut-être pour différentes raisons (liquidités disponibles, exposition au secteur, etc). Par exemple, parfois, des deals sont très "sur-souscrits", et Anthony va volontairement baisser son ticket pour faire un maximum de place aux membres. A l’inverse, un dossier qui ne serait pas complètement rempli pourrait être complété par les fonds d’Anthony. Je vous confirme par ailleurs que M. Bourbon investit son argent personnel (via ses holdings) dans TOUS les dossiers présentés par Blast. »
Pour ce qui est de Tony Parker ou d'Eric Larchevêque, la certitude de leur investissement aux côtés des membres est visiblement limitée aux dossiers qu'ils apportent :
« Il en est de même pour CHAQUE dossier apporté par nos experts sectoriels. Tony Parker et Eric Larcheveque ont par exemple tous deux investi dans les dossiers qu’ils ont apporté au club. »
« J'ai présenté trois dossiers aux membres de Blast : Wheere, Latitude et Pony. J'ai investi à titre personnel (via ma holding) dans ces trois projets, à hauteur de plusieurs dizaines de milliers d'euros chacun. », nous explique Éric Larchevèque.
Lors d'une interview pour le podcast « Little Big Things », Anthony Bourbon confirme investir aux côtés des particuliers. Cependant, le montant exact qu'il engage reste flou, évoquant des sommes variables comme « 10.000, 15.000 ou 20.000 euros », parfois plus lorsqu'il s'agit de « combler l'investissement », créant ainsi un flou persistant sur ce sujet. Selon Camille, « On ne sait pas toujours quel investisseur a investi lorsque l'on investit ». Cependant, cela ne la dérange pas, car elle apprécie surtout l'accès à des startups selon elle de qualité, triées et à fort impact.
Tony Parker est-il rémunéré pour faire partie du Blast Club ?
La chargée de clientèle nous l’assure : « Tony Parker n’a pas été rémunéré pour faire partie du club ». Dans une vidéo publicitaire de février 2024, Tony Parker cite comme principale raison pour rejoindre Blast : « une des grandes raisons c’est notre amitié [avec Anthony Bourbon] » .
La newsletter ZeroBullshit mentionnait pourtant, le 4 juillet 2024, des rémunérations de 400.000 euros pour Tony Parker et d'un million d'euros pour Éric Larchevêque.
Blast a contesté ces chiffres et ils ont été supprimées. Ne pas divulguer la rémunération de Tony Parker et d'Éric Larchevêque, si elle est avérée, tout en suggérant une implication financière généralisée qui serait minime, pourrait constituer une omission trompeuse selon la directive européenne relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises. C’est à dire omettre une information substantielle qui amène à un consommateur de prendre une décision commerciale qui n'aurait pas été prise autrement.
L’histoire de Florian montre que la présence de vedettes au sein du Blast Club peut inciter à y investir. Membre depuis 2023, il a seulement placé 670 euros dans le rachat de parts du Blast Club après avoir payé 1.500 euros de frais d'inscription : « Ce qui m'a intéressé, c'était de voir le lineup de l’émission. Il y a Éric Larchevêque, c’est quelque chose qui m'a motivé, et quand j’ai vu Tony Parker, j’ai vu qu'il y avait une dynamique. ».
Éric Larchevêque a « un contrat d'apporteur d'affaires », nous précise-t-il. « Je perçois une commission à deux titres : une commission sur chaque abonnement de nouveau membre inscrit provenant de ma communauté (limité dans le temps, l'apport d'affaires ayant eu lieu uniquement pendant le drop auquel j'ai participé, c'est-à-dire lors de l'annonce de mon arrivée en temps que KOL [(key opinion leader] Blast). Une commission sur chaque projet d'investissement que j'ai apporté à Blast (en l'occurrence sur Wheere uniquement, les deux autres projets étant arrivés chez Blast par un autre canal que le mien). Il existe aussi un intéressement appelé "carry" sur le succès potentiel d'une exit, exactement comme dans un fonds d'investissement classique. Je ne suis pas actionnaire de Blast ».
Ce que confirme Samuel Guez : « chaque expert sectoriel a un modèle de rémunération qui lui est propre et dépend de nombreux facteurs. Cependant, aucun d’entre eux n’a été payé pour faire la promotion de Blast sur un tarif fixe. Toutes les rémunérations des experts sectoriels sont au succès et en fonction des deals qu’ils apportent à la plateforme. Globalement, ils sont rémunérés sur les deals qu'ils apportent, uniquement en pourcentage du montant levé, mais surtout, nous partageons avec eux la commission de performance, qui est classique dans le monde de l’investissement (carried). »
Une vente de parts acceptée par les membres mais décriée par l’écosystème
Lorsque les fondateurs de Blast, Anthony Bourbon et Samuel Guez, ont vendu 20 % de leurs parts à leurs 8.000 membres, il y a eu deux réactions opposées. La majorité des membres que nous avons interviewés se sont montrés plutôt indifférents à cette cession, tandis que les acteurs de l'écosystème financier ont réagi avec incrédulité face à cette vente.
Pour Camille, « ça ne nous dérange pas vraiment. On n'a pas forcément fait attention. Il n'y a pas eu beaucoup de réflexion, mais c'est le premier qui fait ça en France, et on trouve que c'est une bonne idée et on veut le soutenir. ». Ce sentiment de curiosité, mêlé à une confiance forte dans le Blast Club et ses fondateurs, est partagé par la plupart des membres que nous avons rencontrés.
Pour eux, l'objectif principal est moins la rentabilité que l'entrée dans le monde de l'entrepreneuriat. C'est le cas de Virginie, qui, avec 3.000 euros à la fin de son CDD, a payé 1.000 euros de frais d'inscription et investi 2.000 euros sur la plateforme, dont 1.000 euros dans le rachat d'actions du Blast Club.
Ce qui l'a attirée, c'est « la grande communauté, sa force et son énergie », tout en exprimant son ambition « J'aimerais bien me lancer dans l'entrepreneuriat », confie-t-elle.
Pour de nombreux membres, les risques ou le coût élevé des frais d’inscription est secondaire face à l'opportunité d'apprendre et de mettre un pied dans le monde des startups.
Benjamin Chemla, l'un des experts associés au club au même titre que Tony Parker, a vu son nom disparaître du site de Blast peu après la cession d'actions. Selon un concurrent du Blast Club il aurait été en désaccord avec la cession d’actions. Il n'a pas donné suite à nos sollicitations.
Samuel Guez explique pour sa part que « son départ n’a rien à voir avec un désaccord, il est à la tête, lui aussi, d’une entité réglementée et plusieurs personnes lui ont parlé de notre opération de cession qui "faisait du bruit" dans l’écosystème, notamment en raison d’un article diffamant de Benjamin Charles (3 procédures en cours contre lui). N’ayant pas tous les détails de cette opération, il ne voulait pas prendre de risque vis à vis de son activité principale de président de Shares. ».
Pour un avocat financier spécialisé dans les startups, « l’opération est astucieuse, mais il est important de rappeler que tout ce qui est permis par la réglementation n’est pas forcément moral. » Il ajoute : « Ce qui peut être dommageable pour l’écosystème, c’est que Blast encourage les investissements dans les startups, alors qu’en réalité, cet argent ne fait pas que soutenir ces entreprises, mais finit dans les poches de Bourbon », comme c'est le cas lorsque le capital de Blast a été ouvert.
L’écosystème financier est pour sa part préoccupé par ces agissements mais peu nombreux sont ceux qui acceptent de s’exprimer.
Un concurrent de Blast, qui n’a souhaité s’exprimer que sous couvert de l’anonymat, critique sévèrement cette vente par Anthony Bourbon : « Il utilise son aura médiatique pour vendre un truc à une valorisation complètement décorrélée de la réalité à des pauvres gens qui n’y connaissent rien. La boîte est invendable. Il a déjà essayé de vendre le Blast Club aux banques d’affaires, mais elles n’en ont pas voulu. Il s’est dit : "Je dois vite encaisser mon argent, car dès que l'émission sur M6 s'arrête, mon business s'arrête aussi." ».
Ce n'est évidemment pas l'avis de Samuel Guez qui nous indique que « dans le monde des Startups, à savoir des entreprises jeunes et en forte croissance, aucun professionnel de l’investissement n’a jamais recours à une expertise indépendante. Ni les fonds d’investissements, ni les Business angels, ni les banquiers, ni même la BPI… » Ce que conteste un business angel interrogé par Reflets : « Évaluer... On ne fait que cela. Si l'on écarte les boites qui ne font pas de chiffre d'affaires, celles-là, personnellement, je n'y vais pas, on évalue la qualité de l'équipe dirigeante, la profondeur du marché, on rencontre des clients. Les propriétaires des startups ont toujours une évaluation très élevée de leur boite. Nous, on a des critères et on les ramène à un niveau plus raisonnable »
Cependant, poursuit Samuel Guez, « il existe des normes de marché, en fonction des secteurs d’activités, qui donnent des fourchettes de valorisation pour les Startups, basés sur différents agrégats financiers de l’année en cours. Une société de logiciel se valorise par exemple entre 3 et 15x son chiffre d’affaires, une startup dans la foodtech entre 1,0x et 5x son chiffre d’affaires, mais aucun de ces indicateurs ne reflète la rentabilité de l’entreprise. Il est donc conservateur, dans notre marché, de valoriser son entreprise en multiple d’EBITDA. En résumé, les startups se valorisent en fonction de leur CA, et pas de leur EBITDA (car sinon, la grande majorité vaudraient 0 vu qu’elles perdent de l’argent chaque année). Ce sont les entreprises matures qui se valorisent en fonction de leur EBITDA. Mais c’est un autre secteur qui s’appelle le Private Equity. Les investisseurs de startups ne sont pas des investisseurs de Private Equity, et inversement. Le multiple d’EBITDA appliqué varie majoritairement en fonction du taux de croissance de l’entreprise. Une entreprise plus mature, qui fait peu de croissance, se valorisera 5/7x son EBITDA quand une entreprise en forte croissance se valorisera plutôt autour de 15/20x son EBITDA. Blast aurait eu une valorisation bien plus élevée si cette dernière était basée sur le chiffre d’affaires, comme c’est le cas pour la très grande majorité des startups. Pour en revenir à Blast, nous avons budgété sur l’exercice 2024, 12M€ d’EBITDA ce qui correspond, à 150M€ de valorisation, à un multiple de 12,5x l’EBITDA, ce qui est tout à fait raisonnable au vu notre forte croissance. C’est par ailleurs le multiple de valorisation moyen en Europe en 2024. »
Notre business angel estime pour sa part qu'« un multiple de 12,5 n'est plus du tout la norme depuis un bon moment ».
« Tout est légal. Il sait communiquer et il a un marketing de dingue. Que l'on se comprenne bien, ce n'est pas de l'escroquerie comme The Factory », explique un fin connaisseur de l'écosystème des startups et des fonds. « Mais dans quelques années le réveil va être douloureux. Tout va trop vite. Vous ne pouvez pas faire des évaluations sérieuses de boites dans lesquelles vous voulez investir en si peu de temps. Ce n'est pas une personne du métier. Il y a une différence entre vendre de la nourriture et gérer un fonds d'investissement ».
C'est ce type de reproche qu'Anthony Bourbon fustige avec un storytelling très bien rodé.
Enfance difficile, père maltraitant, ancien SDF, il s'est fait à la force du poignet car il est un combattant, un « guerrier » et il a décidé de bousculer un establishment parisien qui accaparerait une activité, celle du financement des startups.
D'ailleurs, comme Samuel Guez, il entrevoit des complots nombreux pour le discréditer. Dans un premier échange par mail avec Reflets, il nous soupçonne d'emblée d'être lié à l'un de ses concurrents.
« On ne peut rien lui reprocher » estime un autre acteur du secteur. « la valorisation de 150 millions est délirante mais si des gens veulent acheter des parts de son entreprise, il n'y a rien à faire. Il a fait ce que l'on appelle du "cash out" avant l'heure, pourquoi pas ? C'est légal mais amoral. C'est en fin de parcours, lors de la revente éventuelle des startups dans lesquelles le fonds a investi que l'on tirera des conclusions. Son fonds fera peut-être des super performances et il pourra alors redistribuer une partie de la plus value. En attendant, comme pour tous les fonds, on n'en sait rien. »
Sur le papier, avec tous ces noms de personnalités de l’entreprenariat français et une star comme Tony Parker, le Blast Club semble très attirant. L’histoire est-elle trop belle ? L’avenir le dira. Dans un entretien accordé au magazine Forbes en 2023, Anthony Bourbon expliquait que « tout se joue sur l’histoire que l’on raconte. Il faut donner envie aux investisseurs de nous rejoindre. » Sa cible ? Des personnes qui lui ressemblent : « Les gens investissent plus facilement dans des entrepreneurs qui ont un parcours scolaire similaire. On veut effacer ces préjugés de sélection. Nous, on n’investit pas dans un parcours scolaire ou une classe sociale, mais sur l’envie, le mérite et le potentiel du business. » Pour cela, expliquait-il à Forbes, l’émission de M6 a été « une aubaine ».
Making of
Dans le cadre de cette enquête, nous avons interrogé des membres du Blast Club et de nombreux spécialistes des fonds d'investissement ainsi que Samuel Guez, Anthony Bourbon, Éric Larchevêque et le groupe M6. Il nous a été impossible de joindre Tony Parker, l'adresse mail de contact sur son site ne fonctionnant pas.
le prénom d'une membre du Blast Club que nous avons interrogée a été modifié.