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Dossier
par Antoine Champagne - kitetoa

Plongée dans l'apnée : objectif 30 mètres

T'es pas un peu vieux pour ces conneries ?

Tombé dans la marmite de la plongée en apnée quand j'étais petit, je me lance un défi : atteindre les 30 mètres en mer en poids constant, en juin prochain. Soit 10 mètres de plus que ce que je peux faire aujourd'hui. Pour un touriste de cette pratique, c'est un gros challenge. Dix mètres, c'est l'équivalent de 3 étages.

En route pour les 30 mètres - Photo xphere - CC
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Je sors du cours préparatoire. Ma vie va changer. Je quitte la région parisienne pour vivre sur une petite île de la Méditerranée. D'un seul coup, il fait beau à peu près tout le temps et la mer est turquoise, cristalline. J'ai vite fait de recevoir un masque. Un de ces vieux machins fabriqués dans un plastique qui vieillit vite, avec deux trous sous le nez, pour le pincer quand on descend sous l'eau et éviter la pression sur les tympans, qui fait très mal. On m'a même offert un tuba surmonté d'un mécanisme avec une balle de ping-pong blanche comme la neige. En descendant, la balle est censée bloquer l'entrée de l'eau dans le tube. C'est rudimentaire, mais suffisant pour découvrir un autre monde. Près de 71% de la planète est recouverte d'eau. Et sous l'eau, tout un univers évolue. Il y a deux manières de le découvrir. Avec des bouteilles ou avec l'air que l'on peut contenir dans ses poumons et en retenant sa respiration. J'ai choisi la deuxième.

Aujourd'hui, désormais bien plus près de la retraite que du CP, je me fixe l'objectif de descendre à 30 mètres, soit à peu près l'équivalent d'un immeuble de 10 étages.

Que l'on se comprenne bien, je suis un touriste de l'apnée. Plongé par hasard dans cette pratique depuis tout petit, je ne m'entraine pas, je n'ai jamais fait partie d'un quelconque club et j'ai tout appris seul en pratiquant avec des amis. D'abord pour regarder les fonds marins, puis pour pratiquer la chasse sous-marine. Je mangeais tout ce que j'attrapais. Avec le temps, j'ai abandonné la chasse pour me concentrer sur le plaisir de la descente et de la vision que l'on a au fond et en remontant. Ce qui m'intéresse désormais, c'est l'expérience, au sens du ressenti, lorsque l'on descend et que l'on remonte. J'y reviendrai.

Plus jeune, devenu étudiant et vivant à nouveau à Paris, je passais tout de même chaque année entre un et trois mois sur mon île méditerranéenne et je plongeais quasiment tous les jours. Avec cet « entrainement », mes performances augmentaient nettement entre l'arrivée sur place et le jour du départ en septembre. Cela fait désormais des années que je ne plonge plus que très occasionnellement, toujours au même endroit. Mais dans des profondeurs réduites, entre 7 et 12 mètres.

Il y a quelques mois, je suis tombé par hasard sur l'annonce d'un stage de plongée en apnée avec l'un des champions du monde de la discipline : Umberto Pelizzari. En piscine pour l'apnée statique et dans une fosse pour la descente. Et pourquoi pas ?

Ok, je suis un peu vieux et je ne m'entraine plus depuis longtemps, mais qu'est-ce que j'ai à perdre ? Peut-être que je ne pourrai pas atteindre mon record qui date de l' adolescence mais c'est l'occasion de rencontrer un grand champion et de lui poser quelques questions sur cette pratique mystérieuse qui consiste à retenir sa respiration et à se mettre dans une position qui peut aboutir à un décès rapide. Il suffit d'un tout petit petit verre d'eau dans les poumons pour se noyer. J'ai surtout une sorte de fascination pour les humains qui parviennent à descendre sans peine au delà des 30 mètres et lui, il est allé à 150 mètres en poids variable et à 80 mètres en poids constant. Depuis mon adolescence, je rêve de comprendre ce qui les rend si différents de nous.

J'ai donc plongé deux journées d'affilée avec Umberto Pelizzari et profité de ses conseils. J'ai compris ce qui se cachait- physiquement - derrière des choses que je faisais naturellement depuis tout petit. Et j'ai atteint sans trop de mal les 20 mètres. Soit un peu moins d'un mètre de moins que mon record d'adolescent. Mais cette fois en poids constant, sans l'aide d'une gueuse. C'est donc une amélioration, surtout sans aucun entrainement préalable.

Différentes méthodes

Les compétitions d'apnée se pratiquent de différentes manières :

  • Il est possible de descendre en poids constant, c'est à dire à l'aide des palmes et de remonter de la même manière.

  • Il est possible de descendre en poids variable. Cette fois, on s'aide d'un poids, une gueuse et l'on remonte à la force des palmes.

  • On peut aussi choisir le « no limit » en utilisant une gueuse pour la descente et s'aider d'un parachute gonflé d'air pour la remontée. Le record dans cette discipline est de 253 mètres mais Herbert Nitsch a eu un accident après la remontée.

Après le stage, j'ai remercié Umberto Pelizzari de m'avoir amené à descendre à 20 mètres à nouveau, en poids constant et sans véritable difficulté. Sa réponse à mon mail a été la suivante: « Sono sicuro che potrai andare senza problemi a 30 metri » (Je suis sûr que tu peux atteindre 30 mètres sans problème). J'ai un peu de mal à y croire. Dans ce domaine, 10 mètres, c'est une montagne. Mais pourquoi ne pas essayer ? Me voilà donc inscrit pour un nouveau stage, en mer cette fois.

En attendant la semaine fatidique au début de l'été, je coucherai sur le papier quelques réflexions sur cette pratique popularisée par un film (pas terrible - j'expliquerai pourquoi) : Le grand bleu.

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