Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
par Fabrice Epelboin

Pigeons au pruneaux : gastronomie Française ou gastro tout court ? #geonpi

Mouvement leaderless, adoption des codes du LULZ et "agit" via les réseaux sociaux : aussi surprenant que cela puisse paraitre, le mouvement des #geonpi s'est saisi des outils et des méthodes les plus contemporains du pouvoir politique, celui des Ano et autres LulzSec. Mais est-ce si surprennant que celà ? On aurait pu imaginer ces codes liés à "la gôche", mais les #geonpi ont brutalement rappelé qu'il n'en est rien. Tout le monde peut s'en saisir afin d'exercer une pression politique.

Mouvement leaderless, adoption des codes du LULZ et "agit" via les réseaux sociaux : aussi surprenant que cela puisse paraitre, le mouvement des #geonpi s'est saisi des outils et des méthodes les plus contemporains du pouvoir politique, celui des Ano et autres LulzSec.

Mais est-ce si surprennant que celà ?

On aurait pu imaginer ces codes liés à "la gôche", mais les #geonpi ont brutalement rappelé qu'il n'en est rien. Tout le monde peut s'en saisir afin d'exercer une pression politique.

Redressement sémantique : les maux ont un sens

Petit lexique succinct pour mieux roucouler avec les pigeons.

Startups

N'est pas startup qui veut. En particulier, l'idée qu'une société de prestation de service qui fait des sites web en PHP et du eMarketing sur Facebook soit une entreprise d'innovation est, et restera, un vaste enfummage.

http://youtu.be/eBrQAHWBKf0

Or il faut le reconnaitre, bon nombre des pigeons qui se sont fait jour sont à la tête de telles entreprises, ce qui ne les empêchent nullement de se considérer comme startuppers. On imagine que les experts comptables ont réussi à les faire bénéficier du Crédit Impôt Recherche, mais ce dernier n'est pas plus reconnu à l'international comme label de startupper que le diplôme de l'école supérieur de journalisme de Plougastel.

Mais il y a pire. Comme cette tribune publiée dans Libé, qui a lancé l'ouverture de la chasse aux pigeons, signée d'une quarteron d'entrepreneurs dont la quasi totalité est en relations d'affaires étroite avec le Parti Socialiste, ses thinktanks, les institutions politiques dirigés par celui-ci ou ses grands argentiers.

Coté démagogie, c'est un partout, balle au centre.

Libéralisme

Notion parfaitement absente de la politique Française, et dont on affuble néanmoins tout ce qui se présente comme étant de droite (au grand désespoir de certains), le libéralisme, une doctrine politique censée être favorable aux intêrets des pigeons, n'est ni de gauche, ni de droite, Elle n'est tout simplement nulle part au pays du fromage. On peut le regretter ou pas, mais profiter d'une alternance politique pour faire croire que "c'était mieux avant", du temps où Nicolas régnait sur le royaume de France, est une bonne blague qui fait rire jusque dans les couloirs de Bercy.

Nous, hauts fonctionnaires de Bercy, ne lassons pas de nous étonner de cette brusque éruption de mécontentement de la part de ces entrepreneurs qui se font appeler les "pigeons". Comme s'ils se découvraient, dans l'équilibre byzantin des intérêts à partir desquels naissent les politiques publiques, la dernière roue du carrosse. Nous leur livrons ici un secret de Polichinelle : la conception de la politique économique en France, depuis trente ans, se fait sans aucune véritable considération de ce qu'ils sont, de leurs difficultés, ni même de ce qu'ils apportent au pays.

Auto entrepreneur

L'auto entrepreneur, que la bande du fouquets de gauche qui publie dans Libé s'est empressée de lier au mouvement des pigeons, histoire de brouiller les cartes, est un exemple type de tarte à la crème. Après tout, qu'est-ce donc que ce truc que le gouvernement du changement c'est maintenant s'est bien gardé de remettre en cause pour mieux le taxer ?

C'est très simple : transformez votre masse salariale en sous traitants, et traitez-les comme de vulgaires ouvriers chinois. En bonus, si vous êtes une PME avec peu d'employés, vous pourrez une fois vos salariés transformés en auto-entrepreneurs, faire un petit montage financier vous permettant d'opérer tout cela depuis une structure localisée à l'étranger afin d'échapper au fisc. Si vous avez trop d'employés, cela demandera des montages financiers plus complexes et prendra plus de temps. Après tout, la société du spectacle fait cela avec les intermitemps depuis des lustres. Sauf que les Intermittent sont mieux traités par l'Etat que les auto-entrepreneurs (pour le moment). Si vous êtes une très grosse entreprise... vous vous en foutez, de toutes façon vous ne payez même pas le tiers en impôts de ce que déboursent les PME.

On aurait pu imaginer qu'un gouvernement de gauche s'insurge contre de telles pratiques, qui précarisent la middle class, mais non. La voilà qui fait désormais parti des salauds de patrons. Pas de chance. D'autant que pour ce qui est de se délocaliser, les auto entrepreneurs sont définitivement les dindons de la farce.

Leaderless organization

Le mode d'organisation des pigeons est certainement ce qu'il y a de plus inquiétant. En tout cas pour un mec qui s'est toujours imaginé à gauche et qui continue d'imaginer que l'innovation sociale est un truc de gauche (full disclosure : je suis très con parfois).

Ainsi, après Anonymous, LulzSec et autres Telecomix, la toute première déclinaison nationale - cocorico - de ce mode d'action politique, qui fut au cœur du printemps arabe, est le fait d'une groupe de libéraux qui s'opposent à un gouvernement de gauche (ou centre droit, c'est une question de point de vue).

La riposte, qui consiste pour le pouvoir en place à envoyer ses laquais publier de violentes tribunes dans la presse inféodée au gouvernement, est elle une méthode ancestrale à laquelle Sarkozy nous avait habitué. Il faut croire que ce mode de riposte n'est pas spécifique à la droite mais au pouvoir en place, quel que soit son positionnement marketing. C'est triste, d'autant plus triste que les spins doctors de gôche (contrairement à ceux de droite) semblent ne rien comprendre à ce type d'action politique, mais c'est également annonciateur de la suite.

Job creators

Autre mythe apparu avec le mouvement des pigeons, l'idée que les startups créent de l'emploi en France. Grosse rigolade. Dans un pays où l'on peut compter sur les doigts de la main les startups qui ont connu un gros succès international, on est en droit de se marrer.

Si ce type d'entreprises représentent un gros potentiel pour l'emploi et l'économie dans les pays anglo saxons, en France, ça n'a jamais été autre chose qu'un potentiel. L'idée saugrenue que les startups pourraient être un relais de croisance et une source de création d'emplois se heurte à une réalité culturelle inébranlable : l'aversion absolue pour le risque de la société Française ; y compris chez les pigeons, et en particulier chez leurs investisseurs. Là encore, la sémantique le démontre à merveille : "Venture Capital", qui devrait se traduire par "Capitalisme aventurier", se décline - plus qu'il ne se traduit - par "Capital Risque", comme pour bien insister, dans l'adaptation locale, sur la spécificité culturelle régionale.

Pour faire illusion, on ressortira les "usual suspects", qui ne sont guère que des exceptions à la règle : Meetic, Kelkoo, PriceMinister, Partech... Allez-y, comptez, vous avez suffisament de doigts.

Class Warfare & l'insurection qui vient de là où on l'attendait pas du tout

Autre élément particulièrement signifiant, le déferlement de haine, orchestré par la bande du Fouquets de la rive gauche - celle qui publie des tribunes dans Libé -à l'égard des pigeons, avec la bienveillance de l'Elysée, qui s'est rapidement transformée en entrepreneur-bashing sur les réseaux sociaux (pas facile de contrôler un mouvement social en ligne, hein les gars ? A moins que ce n'ait été le but de la manœuvre ?).

C'est certainement la plus grande réussite du mouvement des pigeons. A défaut d'avoir obtenu autre chose que du vent de la part du gouvernement, ceux-ci on réussi un coup de maitre : la connerie, c'est comme le judo, il faut utiliser la force de l'adversaire.

Voilà une réalité jusqu'ici relativement discrète de la culture Française remise sur le devant de la scène : patron du CAC40, startupper qui ne touche même pas un smic tout en faisant 100h de travail par semaine, le tout sans assurance chomage ni mutuelle, les voilà tous pointés du doigt de façon indiférenciée et désignés à la vindicte populaire.

On sait comment cela se termine, il suffit d'aller regarder de l'autre coté de l'Atlantique, où, comme souvent, on a une longueur d'avance. La gôche qui fait le lit d'un tea party bleu marine frenchy ? Il suffira d'étendre le concept de startups non plus au prestataires de l'IT mais carrément aux petits commerçants (après tout, pourquoi pas ?).

Pire, quand on sait que la même gôche est sur le point de confier en héritage au futur TeaParty (dans 4 ans et 6 mois) tout le kit necessaire à la mise en place d'un régime autoritaire. Il ne manque plus que d'affreux terroristes pour justifier et instaurer un régime policier, mais comme la gauche continue de fournir aux dictatures arabes les outils de surveillance et de repression numérique indispensable à leur survie, nul doute que ça devrait arriver.

Patience.

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