Manifestation des gilets jaunes à Paris le 18 janvier 2020 - Acte 62
Ils sont toujours là, l'arbitraire policier aussi
Christophe Castaner, Emmanuel Macron, la presse, et même Anne Sinclair avaient enfin vu quelque chose ressemblant vaguement à une sorte de violence illégitime policière. C'était donc fini, RIO obligatoire, cagoule interdite, tout aller rentrer dans l'ordre... Ou pas...

"Qu'est-ce que c'est ? C'est pour les retraites ?" Le brassard presse, ça vous pose un homme. Nous voilà "sachant", "expert en manifestations". Ce patron d'une supérette, voyant passer un défilé de trois ou quatre mille personnes devant son commerce s'interroge... "Non ce sont les gilets jaunes". Stupeur... "Ah ? Ils sont encore là ? Je pensais que c'était fini depuis longtemps les gilets jaunes".
Ce que l'on ne voit pas n'existe pas. Les chaînes de télévision ayant cessé depuis longtemps de montrer les manifestations hebdomadaires des gilets jaunes, si les manifestations ne passent pas au pied de votre immeuble, cela passe complètement sous votre radar...
Ce n'est pas pour rien que les pouvoirs politiques minimisent régulièrement les mouvement de grève, ils tentent de les invisibiliser lentement. La base, elle, sait ce qui se passe. Quelle est l'ampleur de la colère. De la mobilisation. L'importance des espoirs.
Les gilets jaunes sont dans la rue depuis 64 semaines. La presse parle d'un mouvement inédit par sa durée en parlant de la mobilisation contre le projet de loi sur les retraites. Quarante cinq jours. Que dire alors d'un mouvement qui dure depuis quarante-cinq semaines ? Et à discuter avec les gilets jaunes, la détermination n'a pas pris une ride.
"On vient de Senlis. J'étais syndiqué. Mais je n'avais jamais fait de manifs. Là, depuis le 1er décembre 2018, je n'ai jamais autant manifesté de ma vie. Je suis là tous les samedis et c'est pas près de s'arrêter. Ils se foutent de nous et déclenchent une violence hallucinante contre le peuple qui manifeste. Tout ça finira mal", explique ce gilet jaune croisé au fil de la manifestation, puis dans le métro, au retour.
Cet acte 62 a renoué avec les parcours extrêmement longs. "L'idée c'est de les fatiguer", poursuit ce gilet jaune. L'exécutif avait mis le paquet. Des milliers de membres de forces de l'ordre entouraient les manifestants, formant des haies impénétrables de chaque côté du cortège, du début à la fin. Une sorte de nasse géante qui se déplaçait en même temps que la manifestation... On imagine aisément la fatigue des forces de l'ordre qui marchent avec des kilos de matériel sur le dos et qui doivent suivre, de la porte de Champerret à la gare de Lyon...
Si Emmanuel Macron et Christophe Castaner ont fait mine dans la semaine précédente de reconnaître quelques dérives de la part des forces de l'ordre, celles-ci ont continué de gérer les manifestants comme à l'accoutumée.
Le RIO que les policiers doivent porter ? Oublié pour encore une très grande partie des policiers et autres CRS. La cagoule, interdite pendant les manifestations ? "Il fait froid"...
Quant aux violences illégitimes, elles ont persisté. Plusieurs vidéos circulent montrant des policiers taper des personnes déjà blessées, au sol.
Notre film (voir ci-dessous) de la journée montre un policer assénant une baffe à une femme. La classe internationale. La french touch...
Dès le début de la manifestation, qui était calme et arrêtée, les forces de l'ordre ont décidé de faire une incursion au sein du cortège de tête pour y attraper, au petit bonheur la chance, quelques manifestants. Coups de matraque, LBD pointant les manifestants, l'attitude ne déparait pas avec les autres manifestations.
Les grenades lacrymogènes et assourdissantes ont plu sur les manifestants dès qu'ils parvenaient à se défaire de l'enfermement mis en place. De même, à l'arrivée, gare de Lyon, vers 17h20, les forces de l'ordre ont arrosé la foule de gaz lacrymogène pour sonner la fin de la journée. Quelques échauffourées ont alors éclaté ainsi que des mises à feu de voitures et de mobilier urbain.
"Allez, à vendredi et à samedi prochain... Non, en fait en ce moment à demain tous les jours" lance notre gilet jaune au moment de se quitter. Nier l'existence d'une révolte populaire touchant une majorité de personnes, nier les violences policières illégitimes, en utilisant la caisse de résonance qu'est la presse, ne les font pas disparaître. Le retour de bâton pour l'exécutif qui ne voit et n'entend rien sera sans doute terrible. Mais pas uniquement pour l'exécutif. Le résultat du vote en 2022 s'imposera à tous.
Emmanuel Macron avait été élu pour faire barrage au front national. Pas pour détruire les acquis sociaux issus du programme social du Conseil national de la résistance. Le voilà en train d'ouvrir une autoroute au rassemblement national...

















