Journal d'investigation en ligne
par Antoine Champagne - kitetoa

Le néofascisme en marche aux États-Unis va s'étendre

Les milliardaires en sont la cheville ouvrière

Quelques exemples suffisent pour démontrer que le néofascisme est déjà installé outre-Atlantique. À la manoeuvre, Trump, bien entendu, mais aussi le courant MAGA et une tranche conséquente de la population. Et encore les milliardaires, qui voient dans cette nouvelle forme de gouvernance un moyen de gagner encore plus d'argent et de conserver leurs privilèges. Paradoxalement, les citoyens semblent plébisciter ce grand n'importe quoi.

Parfois, les clowns sont dangereux - © Reflets - CC
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Il est toujours intéressant d'écouter ce que raconte Steve Bannon. Particulièrement décomplexé, ce stratège de l'extrême droite américaine (et européenne) dit souvent tout haut ce que les néofascites pensent tout bas. Cela n'a pas loupé, dans une interview accordée à The Economist il y a quelques jours, il a tranquillement expliqué que Donald Trump allait faire au moins un troisième mandat (ce qui est légalement impossible) : « les gens doivent simplement s'y faire ».

Voilà donc affirmée publiquement la volonté de Trump et de ses alliés de s'assoir définitivement sur la constitution américaine et de tirer un trait sur l'État de droit. Il s'est saisi des institutions, à commencé à décider seul. Les contre-pouvoirs (justice, presse, Congrès) ont été défaillants dans leur opposition à l'établissement d'un pouvoir néofasciste. Aujourd'hui, il envisage de ne pas rendre le pouvoir.

Les journalistes de The Economist ont évidemment évoqué le 22ème amendement qui fixe à deux la limite des mandats que peut exercer le président des États-Unis, consécutifs ou non. C'est une question qui pourrait déstabiliser une personne qui joue avec les mêmes règles démocratiques qu'un journaliste. Mais pas Steve Bannon : « Il existe de nombreuses alternatives différentes. Au moment opportun, nous dévoilerons notre plan, mais sachez qu'il existe bel et bien ». Selon lui, Trump est « un instrument de la volonté divine ». Dès lors, pour mener à bien ce qui a été commencé, il doit exercer « au moins un mandat supplémentaire ».

Dans l'interview, Steve Bannon alterne entre les menaces (écraser les adversaires, saisir le pouvoir et les institutions) et l'habillage du néofascisme en une sorte de volonté populaire : la constitution est la volonté du peuple, le peuple veut un troisième mandat pour Trump. C'est aussi simple que cela...

Le plan est d'ailleurs déjà en place avec un redécoupage électoral dans les districts. Trump, comme tout dictateur, ne craint pas les élections. Il sait qu'il aura une large majorité car il aura préparé le terrain. Un test grandeur nature sera sans doute mené le 4 novembre prochain avec des votes importants en Californie (vote sur un redécoupage électoral défavorable aux Républicains) et dans le New Jersey (élection d'un gouverneur). Le ministère de la justice a déjà annoncé l'envoi d'« observateurs ».

Pire, le New York Times rapporte le contenu d'une rencontre entre la personne chargée par Trump de l'intégrité des élections et les représentants de 50 États. Extrait :

Les responsables électoraux de près de 50 États se sont réunis le mois dernier lors d'une conférence téléphonique avec la responsable de la « sécurité électorale » du département de la Sécurité intérieure, impatients de savoir comment la femme qui occupe ce poste nouvellement créé au sein de l'administration Trump pourrait contribuer à garantir la sécurité du scrutin avant les élections de mi-mandat de l'année prochaine. (...) Au lieu de donner l'assurance que les programmes de protection électorale du gouvernement fédéral se poursuivraient sans interruption, la nouvelle responsable, Heather Honey, a plutôt profité d'une partie de la réunion pour reprendre la rhétorique qui imprègne le mouvement militant électoral de droite apparu depuis que le président Trump a faussement affirmé que sa défaite en 2020 était le résultat d'une fraude généralisée (...) Lors d'un appel téléphonique avec des militants de droite en mars, avant sa nomination au département de la Sécurité intérieure, Mme Honey a suggéré que la nouvelle administration pourrait déclarer « l'état d'urgence national » et justifier l'imposition de nouvelles règles aux gouvernements des États et aux administrations locales. Elle a déclaré que cela pourrait se fonder sur une « enquête réelle » sur les élections de 2020 si celle-ci révélait qu'il y avait eu « manipulation » des votes. « Nous disposons donc de pouvoirs supplémentaires qui n'existent pas actuellement » a-t-elle déclaré en mars, selon un enregistrement examiné par le New York Times provenant d'une personne qui a participé à la conversation téléphonique, « et nous pouvons donc prendre ces autres mesures sans le Congrès et imposer aux États de faire certaines choses, etc. ». Elle a ajouté : « Je ne sais pas si cela est vraiment faisable et si l'entourage du président le laisserait tester cette théorie. »

Le délire de l'élection volée de 2020 revient en boucle ces jours-ci. Comme si Trump et ses alliés préparaient le terrain. Donald Trump a ainsi expliqué que « nous ne pouvons pas laisser ce qui s'est passé lors des élections de 2020 se reproduire. Nous ne pouvons tout simplement pas laisser cela se produire. Je sais que Kash (Kash Patel, directeur du FBI, NDLR) y travaille, tout le monde y travaille. Et Tulsi ( directrice du renseignement national, NDLR) y travaille certainement aussi. Nous ne pouvons pas laisser cela se reproduire dans notre pays. »

Le président américain vient de lancer l'idée d'une nouvelle enquête sur sa défaite en 2020... Le résultat de la véritable enquête est à lire ici ou ici dans son ensemble et en anglais.

Dans l'avion Air Force One lundi 27 octobre, il a expliqué aux journalistes que beaucoup de monde aimerait qu"il fasse un troisième mandat et qu'il serait ravi de le faire...

Le décret qui permet de criminaliser les oppositions

Il suffit d'un texte pour permettre aux forces de l'ordre (ici du désordre) de poursuivre les opposants politiques. L'Histoire nous apprend que celles-ci ont une fâcheuse tendance à suivre aveuglément le pouvoir en place même lorsqu'il est illégitime. Seule la justice est un contrepouvoir puissant. Mais qui pour appliquer ses décisions face à un exécutif qui ne respecte pas l'État de droit ? Par ailleurs, Trump a nommé 3 juges de la cour suprême sur 9. Trois autres ont été nommés par George Bush. Un par Barack Obama et un autre par Joe Biden. Il sait donc que in fine après de très longues procédures judiciaires attaquant ses décisions (le temps joue pour lui) le tribunal de dernier ressort lui donnera probablement raison.

Le 25 septembre dernier, Donald Trump a signé un décret lui permettant de désigner à peu près tout opposant politique comme un terroriste. Le NSPM-7 (c'est son petit nom) porte sur la « Lutte contre le terrorisme intérieur et le crime organisé ». Dans une totale inversion accusatoire, Donal Trump s'en prend aux forces politiques qui génèreraient un climat de violence extrême dans le pays.

Curieusement, l'extrême droite, aux États-Unis comme en Europe et même en France, veut apposer sur les antifa une étiquette terroriste. Mais qui sont les antifa ? Comme leur nom l'indique, ce sont des personnes qui luttent contre les fascistes. Par suite logique, les gens qui luttent contre les antifa sont des ?.... Des fascistes.

Réfléchissons bien...
Réfléchissons bien...

Le décret de Donald Trump est clair :

Il existe des motivations et des indices récurrents communs qui unissent ce modèle d'activités violentes et terroristes sous la bannière de ce qu'ils qualifient eux-mêmes d'« antifascisme ». Ces mouvements dépeignent les principes fondamentaux américains (par exemple, le soutien aux forces de l'ordre et au contrôle des frontières) comme « fascistes » afin de justifier et d'encourager les actes de révolution violente. Ce mensonge « antifasciste » est devenu le cri de ralliement utilisé par les terroristes nationaux pour mener une attaque violente contre les institutions démocratiques, les droits constitutionnels et les libertés fondamentales américaines. Les points communs qui animent ce comportement violent sont l'anti-américanisme, l'anticapitalisme et l'antichristianisme, le soutien au renversement du gouvernement américain, l'extrémisme en matière de migration, de race et de genre, et l'hostilité envers ceux qui ont des opinions américaines traditionnelles sur la famille, la religion et la moralité. Comme le décrit le décret du 22 septembre 2025 (désignant Antifa comme une organisation terroriste nationale), les groupes et entités qui perpétuent cet extrémisme ont créé un mouvement qui embrasse et exalte la violence pour atteindre des objectifs politiques, y compris justifier de nouveaux assassinats. Par exemple, le présumé assassin de Charlie Kirk a gravé les balles utilisées dans le meurtre avec une rhétorique dite « antifasciste ».

Et Donald Trump entend bien écraser les oppositions à sa politique. Dans son décret, il écrit :

Les forces de l'ordre démantèleront et élimineront les réseaux, entités et organisations qui encouragent la violence organisée, l'intimidation violente, les complots contre les droits et autres efforts visant à perturber le fonctionnement d'une société démocratique.

Il confie les enquêtes sur ces supposées « organisations terroristes nationales » aux « Joint Terrorism Task Forces et leurs bureaux locaux (collectivement, les « JTTF ») » qui coordonneront et superviseront « une stratégie nationale globale visant à enquêter, poursuivre et perturber les entités et les individus impliqués dans des actes de violence politique et d'intimidation destinés à réprimer les activités politiques légales ou à entraver l'état de droit ».

Même le cabinet Baker McKenzie, qui n'est pas tout à fait à gauche, met en garde ses clients contre les risques possibles de poursuites arbitraires de la part des États-Unis après la publication de ce décret.

Les JTTF, une vieille connaissance...

Les Joint Terrorism Task Forces ont une histoire semée de controverses. On peut en lire un résumé ici et .

Mais ce qui frappe l'auteur de ces lignes, c'est que cela le renvoie à l'une de ses enquêtes datant des années 2000. Fin juin 2003, sur Kitetoa.com, je publiais le contenu d'une note du département de la défense datée du 2 mai de la même année et marquée « For official use only ».

Titrée « Collecte, signalement et analyse des menaces terroristes visant le département de la Défense aux États-Unis  », elle détaillait comment le Pentagone souhaitait désormais prendre en compte des ragots :

Un nouveau mécanisme de signalement, le rapport « TALON », a été mis en place afin de permettre la collecte d'informations non validées sur les menaces nationales, leur transmission aux analystes et leur intégration dans le processus d'alerte terroriste du ministère de la Défense. Un rapport TALON consiste en des informations brutes communiquées par des citoyens et des militaires concernés au sujet d'incidents suspects. Les informations contenues dans les rapports TALON ne sont pas validées, peuvent être liées ou non à une menace réelle et, de par leur nature même, peuvent être fragmentaires et incomplètes. L'objectif du rapport TALON est de documenter et de diffuser immédiatement les informations relatives à des menaces potentielles au personnel, aux installations et aux ressources du DoD. Le mécanisme TALON n'est pas destiné à remplacer le processus officiel de signalement des renseignements du DoD.

Déjà à l'époque, les JTTF étaient cités dans cette note comme destinataires potentiels de ces ragots non vérifiés. Pour en faire quoi ?

Une démocratie irréelle

Il faut lire toutes les petites informations dans les détails pour le croire : Donald Trump agit comme un dictateur. Il avait prévenu en disant qu'il le serait sans doute 24 heures. En fait cela dure depuis son élection. Ces derniers jours n'ont pas dépareillé dans la nouvelle démocratie alternative de Donald Trump. Alors que près de sept millions de personnes défilaient dans le pays pour le No Kings Day, Donald Trump a diffusé sur les réseaux sociaux une vidéo fabriquée avec une intelligence artificielle dans laquelle il pilote un avion de chasse sur lequel est inscrit « King Trump » et avec lequel il déverse des tonnes de merde sur les manifestants. Il a accusé George Soros et d'autres « fous radicaux de gauche » d'avoir financé les pancartes utilisées lors des manifestations, et a ajouté que son administration « vérifiait cela ».

Il a par ailleurs annoncé qu'il pouvait « toujours recourir à la loi sur l'insurrection » pour envoyer davantage de troupes dans les villes américaines (dirigées par des personnalités du parti Démocrate). L'utilisation de ce texte prévu pour « mettre un terme aux troubles civils, à l'insurrection et à la rébellion » est controversée. L'État fédéral américain a été pensé en réaction à des décisions et un pouvoir trop centralisés en opposition avec la monarchie britannique. Les États ont donc une autonomie certaine et ne prennent pas très bien les interventions de Washington sur leur territoire. « Nos villes dirigées par les démocrates sont des villes dangereuses. Elles sont un désastre, et je vais sauver ces villes », a expliqué Donald Trump, validant le fait que ses décisions sont politiques et destinées à attaquer ses opposants.

Le Washington Post a de son côté révélé que quelque jours avant de déporter des centaines de Vénézuéliens vers une méga-prison du Salvador, le secrétaire d'État Marco Rubio avait conclu un accord avec le président salvadorien Nayib Bukele. Celui-ci souhaitait qu'on lui renvoie neuf chefs de gangs MS-13 détenus aux États-Unis, dont certains étaient des « informateurs » sous la protection du gouvernement américain.

Donald Trump dont les liens avec Moscou sont très anciens a par ailleurs demandé à Volodymyr Zelensky de renoncer au Dombass et a refusé de livrer à l'Ukraine des missiles Patriot qui pourraient aider à renverser le cours de la guerre.

On comprend sans doute un peu mieux cette fixette de l'extrême droite américaine sur les antifa en lisant les déclarations de la personne que Trump souhaitait nommer à la tête de l'Office of Special Counsel, l'agence gouvernementale qui enquête sur les plaintes des employés fédéraux ayant dénoncé des irrégularités et les plaintes pour discrimination.

Dans un groupe de discussion auquel Politico a eu accès, Paul Ingrassia, le candidat souhaité par Trump explique : « Martin Luther King Jr. était le George Floyd des années 1960 et son « jour férié » devrait être supprimé et jeté dans le septième cercle de l'enfer, là où est sa place ». Tout à fait décomplexé, il rétorque à l'un de ses interlocuteurs : « j'avoue que j'ai parfois un côté nazi »... Paul Ingrassia s'est retiré de la course après les révélations de Politico.

Donald Trump continue par ailleurs de lancer des bombes sur des bateaux dans les eaux internationales sans en référer à personne, y compris sans demander l'approbation du Congrès. Six personnes ont trouvé la mort dans le bombardement de leur bateau dans la nuit du 23 octobre. « Je ne pense pas que nous allons nécessairement demander une déclaration de guerre, je pense que nous allons simplement tuer les personnes qui font entrer de la drogue dans notre pays. OK ? Nous allons les tuer. Ils vont être, genre, morts. », a expliqué Donald Trump. Aucune preuve n'a évidemment été apportée que les bateaux visés étaient opérés par des narcotrafiquants.

Il n'est cependant pas le premier président à ordonner des meurtres de manière extrajudiciaire. Les bombardements par drone avaient été inaugurés par George bush et se sont intensifiés sous Barak Obama.

Toujours dans la série « Nous visons dans une cleptocratie », Donald Trump a accordé un pardon présidentiel à Changpeng Zhao, fondateur de Binance, qui avait démissionné de son poste de PDG et plaidé coupable en 2023 pour de sombres histoires de blanchiment d'argent. Binance a été l'un des principaux soutiens de l'aventure de la famille Trump, dans le monde de la crypto avec World Liberty Financial. Trump a benoitement expliqué qu'il avait accordé cette grâce « à la demande de nombreuses personnes très bien »...

Les Tech Bros à l'oeuvre

Tout ce cirque néofasciste ne serait pas possible sans l'appui massif des tech bros qui ont soutenu la campagne de Donald Trump et qui continuent de lui faire allégeance aujourd'hui. Le diner organisé à la Maison Blanche le 4 septembre est probablement la démonstration la plus visible de l'alliance qui s'est nouée.

Parmi les invités, on trouvait Sam Altman (patron d'Open AI), Mark Zuckerberg, (Meta) Tim Cook (Apple), and Bill Gates (Microsoft), Sergey Brin (Google), Safra Catz (Oracle), Sundar Pichai (Alphabet), Shyam Sankar (Palantir), Jamie Siminoff (Ammazon), Lisa Su (AMD), David Limp (Blue Origin).

Au cours du diner, Donald Trump demande à Mark Zuckerberg quels sont les plans d'investissements de Meta. Le patron de Facebook répond que Meta investira « au moins 600 milliards de dollars d'ici 2028 ». Mais un instant plus tard, Mark Zuckerberg est enregistré par un micro resté ouvert. Il se penche vers le président américain et lui dit : « désolé, je n'étais pas prêt. Je ne savais pas quel numéro vous souhaitiez ».

Cet aparté montre le degré d'asservissement des tech bros à Donald Trump. Mais celui-ci n'est pas complètement gratuit.

« Merci d'être un président aussi favorable aux entreprises et à l'innovation. C'est un changement rafraîchissant », a lancé Sam Altman à l'adresse de Donald Trump.

Et de fait... Depuis son élection, Donald Trump a levé toutes les restrictions qui visaient à promouvoir un usage responsable et éthique de l’IA, comme le rappelle le site Multinationales.org. Une dérégulation est en marche également pour les crypto monnaies, Donald Trump ayant lancé la sienne (passée d'un plus haut historique de 71,5 euros à 5,86 euros aujourd'hui). Multinationales.org rappelle une promesse du vice-président J.D. Vance au public lors d'un raout organisé par Marc Andreessen : « Nous allons réduire vos impôts, nous allons réduire les réglementations, nous allons réduire le coût de l’énergie pour que vous puissiez construire, construire, construire ».

Tout est dit dans cette déclaration. Les patrons de la tech ont tout intérêt à soutenir aveuglément les délires de Donald Trump car ce dernier leur permettra de gagner encore plus d'argent. Ceci, évidement au détriment des Américains. Les décisions du ministre de la santé Robert F. Kennedy Jr sont en train de préparer un désastre médical pour les États-Unis. La réfutation de la vérité, des chiffres et la construction d'une réalité alternative dans laquelle les vaccins sont responsables de tous les maux ne peut qu'aboutir à un retour de maladies éradiquées. Mais tant que les milliardaires peuvent voler vers des fortunes de trillionnaires, tout va bien.

Cette tendance, que l'on observe aux États-Unis arrive en France car le RN copie déjà tout ce que fait Trump et s'étendra sans doute à l'Europe. La puissance financière et médiatique des milliardaires leur permet désormais de faire élire des « hommes providentiels », aussi stupides ou azimutés soient-ils. Pourvu qu'ils servent leurs intérêts...

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