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par Antoine Champagne - kitetoa

Le Fonds monétaire international assaisonne Washington

Tout va super bien et très mal

L'institution internationale commence par dresser la liste des réussites économiques des Etats-Unis, avant de dérouler tous les nuages noirs qui s'amoncèlent. Un gros pépin n'est pas à exclure...

FMI - D.R.

Corne d'abondance, festin des dieux, l'ambroisie semble couler à flots outre-Atlantique. « L'économie américaine connaît la plus longue expansion de son histoire. Le chômage se situe à des niveaux jamais vus depuis la fin des années 1960, et l'activité économique croît au-dessus de son potentiel, grâce à une relance budgétaire et à des conditions financières favorables. Les salaires réels augmentent, y compris pour ceux qui se situent au bas de l'échelle des revenus, et la croissance de la productivité semble se redresser. Dans ce contexte, les tensions inflationnistes restent remarquablement modérées », expliquent en préambule les experts du FMI.

Ces affirmations peuvent être discutées. Certains analystes mettent en avant la chute du rendement des bonds du Trésor américain à 10 ans, qui préfigure une crise. Le rendement du 10 ans est même passé sous le niveau de celui du 3 mois fin mai, démontrant une très forte inquiétude des zinzins (investisseurs institutionnels, en d'autres termes, les très gros investisseurs).

Bonds du Trésor US à 10 ans - CNBC
Bonds du Trésor US à 10 ans - CNBC

Par ailleurs, les analystes ne s'accordent pas sur la bonne santé de l'économie américaine. Ainsi, les cours des contrats sur le bois destiné à la construction ou sur le cuivre ont montré ces derniers temps, plutôt un ralentissement de l'économie qu'une croissance.

Autre signe d'inquiétude qui n'est pas abordé directement par le FMI : la pression extrême imposée par la Maison-Blanche sur la Réserve Fédérale (Fed), la banque centrale américaine. Le 18 juin, on apprenait via un article de Bloomberg que Donald Trump avait demandé à ses conseillers juridiques d'explorer la possibilité de débarquer le patron de la Fed, Jerome Powell. Laisser fuiter cette information tout en tweetant que le pays ne connaît pas d'inflation, est une manière peu fine d'imposer à la Fed une poursuite de sa politique de taux bas pour maintenir artificiellement les cours de bourse et l'économie. Un arrêt de cette politique des taux très bas déclencherait immanquablement des répercussions (inflation, crise boursière, faillites d'entreprises sur-endettées, ...).

Quoi qu'il en soit, avec sa manière de réécrire la réalité pour lui donner le visage qu'il souhaite, si par hasard Donald Trump devait tomber sur le communiqué du FMI, il ne manquera pas de tweeter que c'est une grande réussite à mettre à son crédit. Mais il est peu probable qu'il parle de la suite...

« En dépit de ces résultats macroéconomiques positifs, les bénéfices de cette période de croissance de dix ans n'ont pas été partagés aussi largement qu'ils auraient pu l'être. L'espérance de vie moyenne diminue, les revenus et la polarisation des richesses ont augmenté, la pauvreté a diminué mais reste plus élevée que dans les autres économies avancées et la mobilité sociale s'est progressivement érodée.

En outre, un certain nombre de risques à moyen terme augmentent. Le système financier semble sain, mais les vulnérabilités des entreprises fortement endettées et, potentiellement, du système non bancaire sont élevées par rapport aux normes historiques. Un renversement brutal des récentes conditions favorables sur les marchés financiers ou l'aggravation des différends commerciaux en cours représentent des risques importants pour l'économie américaine, avec des retombées négatives concomitantes à l'étranger. Le ratio de la dette publique américaine au PIB est sur une trajectoire insoutenable et devrait continuer d'augmenter à moyen terme, à mesure que les dépenses liées au vieillissement démographique augmenteront. ».

Il faut dire qu'à y regarder de près, le secteur non financier a vu son endettement être multiplié par deux en treize ans à plus de 6.000 milliards de dollars. Mais le plus inquiétant est qu'il lui avait fallu 50 ans pour atteindre 3.000 milliards.

Endettement du secteur non financier US - Fed
Endettement du secteur non financier US - Fed

Reste à attendre, pour voir si les politiques de taux pratiquées par les banques centrales (Europe, Japon et USA) vont se poursuivre et permettre de maintenir artificiellement les cours des actions à un niveau anormalement élevé. Sans quoi une chute des marchés action pourraient déclencher le tsunami habituel. Celui qui survient quand quelqu'un énonce la réalité que personne ne voulait voir jusque là.

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