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Dossier
par Antoine Champagne - kitetoa

Le FMI prévoit une période très dure pour l'économie mondiale

Un ralentissement de l'économie de 3% en 2020

Dans son rapport World Economic Outlook d'avril, le Fonds monétaire international prend acte du "grand confinement" et dépeint une crise économique profonde. Il prévoit toutefois un beau rebond en 2021. Mais dans le cas d'un scénario qui est optimiste.

Le rapport (partiel) du FMI

C'est un rendez-vous habituel. Tous les trois mois, le Fonds monétaire international (FMI) publie un rapport dans lequel ses analystes tentent de prédire l'avenir économique de la planète. Cette fois, les experts du Fonds ont été surpris. La pandémie du coronavirus est venue secouer leurs travaux assez violemment. Et cette fois, l'exercice qui tient déjà de la boule de cristal, l'économie n'étant pas une science, encore moins exacte, semble encore plus improbable...

"Un scénario de pandémie avait été évoqué comme une possibilité lors de précédents débats de politique économique, mais aucun d'entre nous n'avait une idée précise de la forme concrète qu'il prendrait et de ses conséquences pour l'économie. Nous faisons maintenant face à une sinistre réalité", indiquent d'emblée les économistes. Si les politiques n'étaient pas prêts à faire face à une pandémie, en dépit de plusieurs alertes des services de renseignement, comme l'indiquait le Canard Enchainé la semaine dernière, les économistes n'avaient visiblement jamais pris la peine de faire tourner des modèles dans lesquels l'activité économique mondiale est mise à l'arrêt...

Ce qui ressort de la lecture du rapport des experts du FMI, c'est qu'ils n'ont aucune certitude sur ce qu'ils avancent, ni sur l'avenir. "Cette crise ne ressemble à aucune autre. Premièrement, le choc est violent. Les pertes de production liées à cette urgence sanitaire et aux mesures prises pour l'endiguer sont probablement bien supérieures aux pertes qui ont déclenché la crise financière mondiale. Deuxièmement, comme pour une guerre ou une crise politique, la durée et l'intensité du choc demeurent très incertaines". Tout le problème est là, résumé en un paragraphe. Le choc est inédit. Personne n'avait envisagé une telle violence. Comme nous l'indiquions dans de précédents articles, la crise est multiple et c'est une première : elle est financière (les marchés s'écroulent), économique (les fondamentaux s'effondrent) et sanitaire, ce qui précipite la violence des deux autres. Une fois les trois crises enclenchées, elles se nourrissent les unes-les autres. Et comme le laissent entendre clairement les économistes dans leur rapport, "la durée et l'intensité du choc demeurent très incertaines". Traduisons-les : "Nous n'avons aucune idée précise de ce qui va se passer. On peut faire quelques estimations au doigt mouillé mais ça vaut ce que ça vaut".

"Il est très probable que l'économie mondiale connaisse cette année sa pire récession depuis la Grande dépression, soit une récession plus grave que celle observée lors de la crise financière mondiale il y a une dizaine d'années. Selon les prévisions, le « Grand confinement » devrait entraîner une forte décroissance. Une reprise partielle est prévue pour 2021, avec des taux de croissance supérieurs à la tendance, mais le niveau du PIB restera inférieur à la tendance d'avant l'apparition du virus et la vigueur de la reprise est très incertaine. Des résultats bien pires sont possibles et peut-être même probables. Il en sera ainsi si la pandémie et l’application de mesures d'endiguement durent plus longtemps, si les pays émergents et les pays en développement sont encore plus sévèrement touchés, si les conditions financières demeurent restrictives ou si des séquelles se font sentir à grande échelle en raison des fermetures d'entreprises et d'un chômage prolongé".

Ca va être vraiment très grave, mais ça pourrait même être pire. Alors rassurés ?

Le Fonds table sur une baisse de 3% de la croissance mondiale en 2020 et sur une reprise l'année suivante avec +5,8. La baisse de 3% représente un recul de 6 points de pourcentage par rapport aux prévisions faites en janvier dernier...

Pour les Etats-Unis le ralentissement est estimé à 5,9% cette année avant une hausse de 4,7% en 2021. En France nous devrions enregistrer une chute de 7,2% avant une timide hausse de 4,5%. Le gouvernement français table lui sur une baisse de 8% au moins du PIB. L'Insee, l'institut national de la statistiques évalue pour sa part à 3 points de pourcentage la baisse du PIB entraînée par un confinement d'un mois.

Projections du FMI par régions - Copie d'écran
Projections du FMI par régions - Copie d'écran

Les économistes du fonds, qui sont généralement de bons petits soldats de l'économie de marché ne prennent pas beaucoup de gants : il faut, disent-t-ils, affecter les ressources nécessaires au secteur de la santé afin qu'il lutte contre la pandémie, puisse trouver un vaccin et un remède, il faut des politiques de santé publique, comme le confinement car : "Ces mesures peuvent contribuer à éviter un effondrement encore plus grave et prolongé de l'activité et jeter les bases d'une reprise économique". On pensait bêtement que ça pouvait surtout sauver des vies...

Trois scenarii

Ce qui ressort du rapport, et c'est sans doute ce que l'on pourra lire dans les articles sur le sujet, c'est que la baisse du PIB mondial sera de 3% cette année, avant une hausse de 5,8% en 2021. Mais ça, c'est dans le cas d'un scénario de base. Il y en a trois autres. Et même pour ces trois autres, il n'est pas évident que les économistes du Fonds soient certains de leurs chiffres...

Dans leur scénario de base, les experts du Fonds tablent sur une disparition progressive de la pandémie dans la deuxième moitié de 2020. Les projections de reprise économiques partent du principe que les politiques économiques ont les effets escomptés pour éviter des faillites en masse, une hausse importante du taux de chômage et des tensions financières systémiques.

Bon courage...

Les trois autres scénarios examinés par le Fonds sont les suivants :

1) Une pandémie qui dure plus longtemps, comme le confinement (50% de plus). 2) Une reprise (moins violente) de la pandémie en 2021. 3) Une pandémie qui dure plus longtemps et une reprise (moins violente) de la pandémie en 2021.

Dans tous les cas, le rapport du Fonds précise que "la levée des mesures de confinement sera probablement graduelle, et même après, l'activité économique pourrait prendre du temps à se normaliser. L'incertitude sur la contagion pourrait mener à une distanciation sociale volontaire prolongée et à une demande modérée des consommateurs pour les services".

C'est un problème dont nous vous parlerons dans un prochain article: cette crise affecte à la fois l'offre et la demande.

Dans le graphique ci-dessous, la ligne bleue représente le scénario 1, la ligne rouge le scénario 2 et la ligne jaune le troisième. On voit que dans ces trois options, la reprise n'est pas au rendez-vous en 2021,... ni en 2022, 2023 ou 2024...

3 scenarii du FMI (PIB mondial) - Copie d'écran
3 scenarii du FMI (PIB mondial) - Copie d'écran

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