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par drapher

La fin du monopole de la richesse (ou comment un peu mieux comprendre l'état du monde)

20 ans après la sortie de cet ouvrage un constat troublant vient immédiatement à l'esprit : comment Farlan Carré, son auteur, a-t-il pu analyser avec autant de précision et de justesse l'état du monde actuel ? "La fin du monopole de la richesse — La civilisation européenne face au monde : entente ou conflits sans fin ?" est une lecture essentielle pour qui veut prendre du recul dans sa compréhension globale du monde actuel.

20 ans après la sortie de cet ouvrage un constat troublant vient immédiatement à l'esprit : comment Farlan Carré, son auteur, a-t-il pu analyser avec autant de précision et de justesse l'état du monde actuel ?

"La fin du monopole de la richesse — La civilisation européenne face au monde : entente ou conflits sans fin ?" est une lecture essentielle pour qui veut prendre du recul dans sa compréhension globale du monde actuel. Cet ouvrage est en quelque sorte un manuel de macro-histoire, macro-économie, macro-sociologie qui parvient en moins de deux cent pages à remonter le cours de l'évolution des différentes civilisations, dont plus particulièrement la civilisation européenne, pour envisager la suite de l'aventure humaine à l'échelle planétaire. Prétentieux ? Cela pourrait l'être, si celui qui effectuait l'analyse n'avait annoncé dans cet ouvrage toutes les grandes crises des vingt dernières années. Crise économique asiatique de 1997, "guerre des civilisations" américaine, grande crise financière et économique de 2008 dans laquelle nous sommes encore empêtrés, crise écologique et…fin potentielle du système capitaliste.

Machine à remonter le temps

De l'antiquité à la révolution industrielle, débutée en Angleterre, le fonctionnement de la civilisation européenne (instigatrice du système capitaliste, moteur de changements humains massifs et uniques à l'échelle planétaire), est dépecé méthodiquement dans ses grandes largeurs : rôle de la science, des religions, de la spiritualité, de la démographie, du développement agricole, des échanges, des techniques et des technologies, rien n'échappe à l'analyse de Farlan Carré. Cette plongée dans l'histoire, les conséquences directes et indirectes des choix des sociétés humaines sur leur évolution ont une unique préoccupation, qui avec l'éclairage de 2013, s'avère passionnante : savoir comment la civilisation européenne, capitaliste et purement matérialiste, peut s'écrouler…ou pas. Si en 1993, "la fin du monopole de la richesse" pouvait faire sourire les supporters du système néo-libéral mondialisé, chantres des théories économiques néo-classique — et balayer toutes les prévisions contenues dans cet essai — il n'en est plus rien aujourd'hui.

Questionnements d'actualité

Farlan Carré amène de nombreux questionnements sur les grands tournants qui ont accéléré le changement du monde. Des techniques agricoles sont restées au même stade plus de 1000 ans en Europe, des systèmes d'imprimerie existaient en Chine 1500 ans avant Gutemberg, les machines à vapeur sont une invention antique : si la population occidentale se met à croître, que le bien-être matériel se développe à partir du XVIIIème siècle, c'est avant tout par l'éviction de la croyance religieuse au profit de la "philosophie matérialiste". Ce bien-être matériel qui découle de la révolution industrielle devient à partir du XXème siècle une course effrénée sans limites, et l'auteur en vient à des questions qui, si elles pouvaient encore passer pour étranges en 1993, sont totalement d'actualité en 2013 :

(…)Pouvons-nous réellement augmenter indéfiniment le bien-être matériel sans détruire notre milieu naturel ? Souhaitons-nous réellement vivre sans idéal, sans risque, sans rêve, sans défis à surmonter ? Et s'il n'y a rien au delà de ce monde, comment convaincre les riches, les forts, les intelligents, de ne pas abuser de leurs avantages ? (…)

L'opulence, jusqu'où ?

C'est au sein de ce paragraphe de "la fin du monopole de la richesse" que l'auteur prévoit, avec 20 ans d'avance,  la situation occidentale actuelle :

(…) Sur le chemin du progrès matériel, une première série de difficultés ne va pas manquer de bientôt apparaître pour les pays riches, quand ils constateront que "l'univers minimal" qui les entoure ne croît pas aussi vite qu'ils le souhaiteraient (…)Le long délai qui sera nécessaire pour que la majorité des pays du Tiers Monde accèdent à l'affluence signifie que les pays riches risquent bien, en attendant, de voir leurs taux de croissance s'évanouir ou devenir très faibles — de l'ordre de 0,5% par personne et par an — pendant de longues décennies. (…)"

Pour l'auteur, la seule solution permettant d'éviter le déclin et la tentation militaire qui y est immanquablement reliée, est la création d'une Fédération des Nations Unies :

(…)Il serait donc illusoire de penser que la civilisation européenne restera à l'avenir la principale force motrice de l'ordre mondial. (…) Au cas contraire où les pays de civilisation européenne se laisseraient aller à leur désir de continuer à dominer par la force, il me paraît peu douteux qu'ils se condamneraient eux-mêmes à une décadence irrémédiable, analogue à celle de l'Empire romain. Et il se passerait sans doute longtemps avant que de nouvelles civilisations puissent reprendre le flambeau. Il vaudrait certes mieux, pour la civilisation européenne comme pour les autres, éviter la politique du pire, dans la mesure où cela est possible, en commençant à organiser dans un proche avenir la collaboration des civilisations.(…) C'est à quoi correspond l'idée, suggérée dans cet essai, d'une Fédération des Civilisations Unies — idée peut-être utopique, et néanmoins nécessaire, du moins si l'on veut éviter les affrontements violents entre les civilisations et entre les peuples.(…)

En guise de conclusion

Il faut lire "La fin du monopole de la richesse" de Farlan Carré, avec lenteur, pour mieux déguster la qualité d'analyse impressionnante que cet essai restitue. Il y a peut-être de la naïveté dans les solutions préconisées par son auteur pour sortir du "grand vide moderne" dans lequel nous sommes plongés, mais comment ne pas adhérer avec celles-ci ? Un dernier extrait en guise de conclusion, extrait que nos dirigeants, mais aussi les citoyens, de plus en plus convaincus par le repli sur soi, pourraient méditer :

(…)Seule la reconnaissance de la diversité des civilisations, des religions et des cultures permettrait un dialogue de grande ampleur et, progressivement, une harmonisation des politiques des ressources naturelles, de l'économie, du développement des régions pauvres, et de l'environnement naturel.(…) Il s'agit en fait d'inventer de nouvelles institutions, de nouvelles méthodes de travail et de coopération, de nouvelles manières d'informer et de décider. On ne peut guère imaginer à l'avance les formes que prendront ces nouvelles activités, mais on peut se tenir prêt à les promouvoir. Avec Confucius, retenons que celui qui s'est préoccupé de l'avenir lointain risque moins de réagir mal aux événements journaliers faute d'avoir compris leur vraie nature et leur portée réelle.(…)"

Farlan Carré est mort le 22 juillet 2012 à l'âge de 89 ans. Après des études de mathématiques, physique, chimie, astronomie et économie, diplômé de l'Ecole Polytechnique, il a travaillé plus de trente ans au soutien du développement économique du Tiers Monde au sein d'organisations des Nations Unie, comme l'ONUDI (Développement industriel du Tiers Monde) dont il a été le directeur adjoint pendant sept ans.

La fin du monopole de la richesse est en ligne ici : http://www.subud-sica.fr/farlan/la-fin-du-monopole-de-la-richesse La totalité de ses ouvrages ici : http://www.subud-sica.fr/farlan

Il est possible d'acheter les ouvrages papier d'occasion via des sites de vente ligne (pour une somme modeste).

Petit bonus musical :

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