La fin du maire-roi de Sornéville ?
Le maire contesté a été destitué
Toutes les médiations avaient échoué. Bruno Retailleau a fini par signer un décret qui met un point final à l'aventure politique du maire de cette commune de l'Est. Le conseil municipal est dissous.
Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a signé mercredi matin un décret qui acte la destitution du maire de Sornéville, petit village de 300 habitants de l’Est. Il faut dire que Yvon Vincent, tel est son nom, règne en maître absolu sur sa commune, cumulant jusqu’à 23 délégations… soit l’intégralité que compte Sornéville, comme nous l'avions raconté.
En mars dernier, le conseil municipal a voté contre le budget qu’il présentait. Et ce, pour la quatrième fois consécutive. Quatre ans donc que le maire tente de faire passer son budget et que ses conseillers municipaux, initialement acquis à la majorité mais passés depuis à l’opposition, s’y refusent. Une situation tellement inédite, et peut-être même unique en France, qui pousse la Cour régionale des comptes à s’emparer de la question et définir un budget de fonctionnement.
En janvier, Reflets.info chroniquait déjà les tensions qui agitent cette petite commune située à une trentaine de kilomètres de Nancy. Le point d’orgue est atteint en 2021 lorsqu’une enquête de la gendarmerie est ouverte suite à un dépôt de plainte. Il lui est, entre autres, reproché de qualifier des terrains agricoles en constructibles, ou l’inverse, selon son bon vouloir.
Des rappels à la loi ignorés
Plusieurs administrés se sont regroupés en association pour faire valoir leurs droits. « Pour nous permettre de nous défendre et d’aller en justice, nous avons créé courant 2022 l’Adaccs (Association de défense des administrés et contribuables de la commune de Sornéville). Car en plus de nous porter préjudice, le maire est également très procédurier et nous poursuit en diffamation dès que nous contestons ses décisions », explique Brigitte Baillet, cofondatrice de l’association.
Et de préciser : « Nous sommes nombreux à être victimes de ses agissements. Il a, par exemple, déclassé mon terrain qui était constructible, en zone agricole, m’empêchant ainsi de le vendre. » Dès 2018, elle multiplie les courriers en recommandé au président de la communauté de communes, à la préfète et au procureur. Un juge d’instruction se saisit de l’affaire et mène une enquête durant un an. « Mais depuis, plus rien, regrette Brigitte Baillet. Les maires sont sacralisés et jouissent d’une toute puissance. Ce n’est pas la définition d’une démocratie. »
Les conseillers municipaux ont bien tenté de récupérer leurs délégations. Par sept fois, ils font cette demande par lettre recommandée. C’est une décision qui ne peut être prise que par un juge, explique l’édile. La préfecture a également, à plusieurs reprises, rappelé au maire ses obligations et l’application des lois.
« Il règne en instaurant la peur et en se faisant passer pour victime tout en privilégiant ses propres intérêts économiques ou ceux de ses proches, souffle Brigitte Baillet. J’espère que sa destitution ramènera un peu plus de quiétude dans le village. »