Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
Édito
par Jacques Duplessy

L'épidémiologiste en chef a foncé dans le mur

Un choix délibéré

Il devait, nous disait-on être meilleur que les scientifiques et les médecins. Ses décisions nous rapprochent des 100.000 morts, l'épidémie est en roue libre. Des choix délibérés, sinon très réfléchis.

Le mur - Jordan Johnson (Unsplash)

« On est dans le mur. » Voilà ce que déclarait Jean-François Timsit, chef du service de réanimation sur France Inter le 24 mars. Ce n’était pas faute d’avoir tiré la sonnette d’alarme depuis des semaines.

Mais pour Emmanuel Macron, autoproclamé épidémiologiste en chef, il fallait dire non à la « dictature sanitaire ». Ses proches faisaient fuiter qu’il avait tout lu sur l’épidémie et qu’il était capable de « challenger » les épidémiologistes en les déstabilisant par ses questions ou encore qu’il s’offusquait des pressions des soignants et des épidémiologistes qui demandaient un confinement. Le mot d’ordre de l’exécutif est : « Tout jour sans confinement est un jour de gagné ».

Qu’importe les morts et les malades qui terminent en réanimation. Il y a eu le « quoi qu’il en coûte » pour aider les entreprises, il y a maintenant le « quoi qu’ils en crèvent ».

Quitte à mentir, comme Jean-Michel Blanquer. Mentir en affirmant qu’ « on ne se contamine peu à l’école », mentir sur le nombre de tests salivaires pratiqués dans les établissements. Même sans y voir clair, on sait que, sur les quinze derniers jours en Île-de-France, l'incidence a doublé chez les moins de 10 ans, passant de 129 à 275 cas positifs pour 100.000 habitants, un taux jamais atteint jusqu'ici. Et alors que les chiffres explosent, Blanquer ose : « Assumer ce risque me paraît peu de chose par rapport à l’importance qu’un enfant ne se déscolarise pas. » Les parents, notamment ceux qui ont des comorbidités et qui n’arrivent pas à être vaccinés ou les grand-parents apprécieront. Et le ministère de l’Éducation nationale choisit l’opacité en refusant de donner les résultats académie par académie des tests salivaires déployés en maternelle et en primaire. Pas d’info, pas de problème, comme nous l’écrivions déjà.

Mais il y a le télétravail pour casser la courbe, me direz-vous. Le télétravail 4 jours par semaine, répété en boucle par les ministre, est là juste pour brasser de l’air médiatique. Dans les faits, il n’est pas obligatoire. Comme l’a expliqué un avocat en droit du travail, c’est juste une incitation. Tant qu’il n’y a pas une ordonnance du gouvernement obligeant au télétravail, le protocole tant vanté n’a pas force de loi, comme l’a rappelé le conseil d’État. Donc le discours du gouvernement est de l’esbroufe, car s’il le voulait vraiment, il pourrait obliger au télétravail dans les cas où c’est possible. Mais il ne faut pas embêter les entreprises. Tant pis si les salariés se contaminent. Pour paraphraser Blanquer, assumer ce risque me paraît peu de chose par rapport à l’importance du profit des actionnaires.

« Le président avait mis la santé en priorité numéro 1, ce n'est plus le cas aujourd'hui », affirme tranquillement William Dab, l’ancien directeur général de la Santé toujours sur France Inter. En sommes-nous conscients ? Le voulons-nous ? Un seul homme décide pour nous dans le secret du conseil de défense sanitaire, un instrument bien pratique pour que l'on ne sache pas comment les décisions sont prises : Emmanuel Macron.

Sacrifier notre santé est un choix délibéré. L’exécutif savait très bien que nous foncions droit dans le mur. Dans son avis du 29 janvier, le conseil scientifique anticipait parfaitement la situation actuelle. Le virus va plus vite que la vaccination. Les épidémiologistes alertaient depuis des semaines que le variant anglais, désormais très majoritaire en France, était 1,5 fois plus contagieux et 60 % plus létal. Comme le déplorait l’épidémiologiste Catherine Hill, le gouvernement n’a pas non plus mis en place de vraie politique de dépistage. Au lieu de ça, le gouvernement fait comme si il faisait quelque chose pour nous protéger, il prend des « mesurettes ».

D’ici une quinzaine de jours, la France comptera 100.000 morts du coronavirus. Combien auraient pu être évités ? Macron ressemble au capitaine du Titanic. Mais ce dernier avait une excuse : il n’avait pas vu l’iceberg faute de moyens technologiques. Là, le président avait tous les outils à sa disposition pour voir le mur. Il était parfaitement averti des conséquences. Il a fait le choix délibéré de nous mettre dans le mur.

2 Commentaires
Une info, un document ? Contactez-nous de façon sécurisée