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par Eric Bouliere

Jean-Michel Blanquer : la barbe à l’Assemblée, une moustache pour l’Université.

Battu au 1er tour des législatives, l‘ex-ministre de l’éducation se chercherait-il un nouveau job ?

Face au souhait de M. Blanquer de venir trouver refuge dans les amphis de Paris2 Panthéon-Assas, le syndicat national de l’enseignement supérieur a pris soin de lui rappeler quelques principes élémentaires : « les créations de postes ne peuvent relever du seul fait du prince, ni donner lieu à des profils à moustache ».

Fini l'Elysée, adieu l'Assemblée, vive l'Université! - capture écran

Comme certains ont une tête à chapeau, d’autres se targuent de présenter un profil à moustache : de celle, taillée à la demande et sur mesure, qui permet de célébrer l’audace du porteur de si belles bacchantes. En matière d’offre d’emploi, la stratégie du –poste à moustache- offre l’avantage de pouvoir éliminer d’office tous les candidats ne correspondant pas au profil recherché. Très pratique lorsqu’il s’agit précisément d’offrir une situation à celui-ci et non celui-là. Au diable les règles démocratiques ou la réalité des compétences, la place lui sera donc acquise par définition…

Poste Ad hoc, prestige en toc ?

Tout juste déchu de son mandat ministériel et sitôt défait de ses ambitions législatives, Jean Michel Blanquer fut pressenti comme le nouveau messie d’Assas. L’affaire n’est pas passée inaperçue puisque Médiapart s’est étonné de la création soudaine d’un poste jugé ad hoc. Dans un courrier interne le président de l’université, Stéphane Braconnier, semblait pourtant déjà présager des bénéfices à tirer de cette éventuelle nomination : « l’arrivée d’un ancien ministre dans nos effectifs contribue, de manière générale, au prestige et donc à l’attractivité de notre établissement ».

Faut il que l’attractivité d’Assas soit tombée si bas que l’on soit obligé de se féliciter de l’arrivée d’un ex-ministre, tout en négligeant le prestige du travail quotidien et silencieux de tous les professeurs en poste...

Laissons les partis politiques juger du bilan mais n’oublions pas les frasques de ce ministre de l’éducation qui « courra » à Ibiza pour annoncer le protocole sanitaire Covid dans les écoles et qui « tombut » devant les difficiles règles du passé simple (Voir la vidéo -Au tableau- ici )

Pas facile la conjugaison pour un prof de droit - Capture d'écran
Pas facile la conjugaison pour un prof de droit - Capture d'écran

L’enseignement supérieur : à l’œil et au compas ?

Et Stéphane Braconnier d’ajouter que : « sa présidence pourrait bénéficier des contacts et de l’expertise institutionnelle de M. Blanquer (…) Cela serait particulièrement précieux dans une période où plusieurs projets d’envergure sont lancés, qui nécessitent, pour certains, de nombreux appuis ».

Les contacts et les appuis sont-ils à ce point précieux pour cette Université reconnue comme « L’héritière directe de la Faculté de droit et des sciences économiques de Paris, l’université Paris 2 Panthéon-Assas s’honore de maintenir son prestigieux héritage et de garantir la pérennité de ces lieux hautement symboliques, où le droit français est né ».

D’un Tweet furibard M. Braconnier tentera de justifier ses positions en arguant des qualités du candidat Blanquer, et en exposant les vertus de cette éventuelle procédure d’embauche.

Pour le président d’Assas, tout va bien dans le meilleur du droit - Capture d'écran
Pour le président d’Assas, tout va bien dans le meilleur du droit - Capture d'écran

Mais pour autant la légitimité, les grausses fôtes ou la longueur des moustaches d’un ministre de l’éducation débarqué doivent-elles cacher l’essentiel du débat? La réponse est non pour le SNESUP-FSU (Syndicat national de l’enseignement supérieur), qui dénonce bien sûr le grotesque de la situation, mais estime que la colère doit-être portée bien au-delà de cette -nomination de rattrapage-.

Les valeurs de l'enseignement considérées sous un autre angle.  - Capture d'écran
Les valeurs de l'enseignement considérées sous un autre angle. - Capture d'écran

La fédération syndicale s’insurge et « _demande donc des explications sur la demande expresse évoquée par le Président de l’université Paris 2 qui permettrait à Jean-Michel Blanquer, actuellement toujours rattaché à l’université Paris 3 Sorbonne Nouvelle, de contourner toutes les procédures de recrutement et de mutation des enseignant-es-chercheur-es dans le service public _».

Mais pour le SNESUP-FSU la véritable douleur est ailleurs : « Si la création de postes d’enseignant-e chercheur-e est possible, dès lors qu’un ex-ministre en formule le besoin, elle doit donc également l’être pour répondre aux centaines de milliers d’étudiant-es qui attendent un encadrement de qualité dans leurs formations. Elle doit aussi l’être pour résorber la précarité qui sévit parmi les docteur-es dont beaucoup assurent des fonctions d’enseignement et de recherche sans emploi stable depuis plusieurs années ».

La fédération rappelle les chiffres inquiétants de la note ministérielle sur les projections des effectifs dans l’enseignement supérieur pour les rentrées de 2021 à 2030, et elle s’inquiète des « _33.400 étudiant-es supplémentaires, dont 5.500 en plus à l’université en premier cycle devraient s’inscrire dans les deux prochains mois _».

Enfin décomptant le fameux poste du -profil à moustache-, le SNESUP-FSU en réclame d’urgence « 7.434 autres dans les 37 universités sous-encadrées de notre territoire afin de réduire dès cette année les inégalités de dotations et ne pas dégrader les conditions d’accueil et de réussite des nouveaux et nouvelles étudiant-es ».

Qui a parlé du prestige de l’éducation nationale à la française.. ?

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