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Dossier
par Jacques Duplessy

Gilets jaunes : En attendant la parole de Jupiter

Qui malheureusement ne servira probablement à rien

La presse est suspendue au discours d'Emmanuel Macron. Le peuple, lui, c'est moins sûr... Les mots de Macron risquent bien de n'avoir aucun effet sur la colère qui se répand.

Policiers le 8 décembre 2018 sur les Champs-Elysées - Reflets

Le pays est désormais suspendu à la parole du Président. Attention, Jupiter va parler. Alors attendons. Et regardons ce qui se passe. Les violences à Paris ont été relativement faibles, et on ne peut que s’en réjouir. Mais elles se sont déplacées en province. Les chiffres de la mobilisation au niveau national sont les mêmes que ceux du samedi précédent. Pourtant le gouvernement a joué à fond sur la peur des violences et dramatisé à outrance pour dissuader les citoyens de manifester.

Il est donc très probable que le mouvement continue. D’autant que gilets jaunes et gilets verts commencent à se rencontrer avec ce slogan « Urgence climatique et urgence sociale, même combat ! ». Dans le même temps, les médias matraquent sur les pertes financières pour les commerces, sur la mauvaise image à l’étranger pour le tourisme, etc. Ce n’est pas faux, mais on ne change pas un système sans perturbations, avant d’arriver à un nouvel état de stabilité. Ces arguments - consciemment ou non – ont pour effet d’éviter un changement qui ne peut s’obtenir sans une mobilisation massive. Comme si, au fond, il n’y a avait aucune autre alternative (le fameux TINA de Margareth Thatcher), qu’il n’y a avait rien à inventer, sauf à la marge.

L’impression est que beaucoup voudraient siffler la fin de la récréation. Mais est-ce si juste ?« Ceux qui ont pris tout le plat dans leur assiette, laissant les assiettes des autres vides disent avec une bonne figure, avec une bonne conscience, nous, nous qui avons tout, on est pour la paix. Vous savez ce je dois leur crier à ceux-là : les premiers violents, les provocateurs de toutes violences, c’est vous ! » Ce cri d’indignation de l’abbé Pierre résume bien la situation de ceux qui appellent au calme et à la sagesse, la sagesse étant bien sûr d’accepter des mesures cosmétiques.

Le Président des riches peut-il encore être crédible ?

Ce n’est pas une vue de l’esprit que de dire qu’Emmanuel Macron est le président des riches. L’enquête du JDD qui a épluché les comptes de la République en Marche (LREM), révèle que l’épopée présidentielle d’Emmanuel Macron a été financée pour moitié par… 913 personnes seulement, qui ont versé 6,3 millions d’euros. On apprend que les dons en provenance de Suisse (95.000 euros) ont rapporté plus d’argent à En Marche que ceux venus… de Marseille (78.364 euros), la deuxième ville de France ! Avec seulement 18 bienfaiteurs mais 105.000 euros octroyés, les Libanais ont fortement contribué à l’émergence du macronisme, davantage que les 250.000 habitants de Bordeaux et 230.000 habitants de Lille réunis ! Après Paris, la deuxième ville la plus participative n’est autre que… Londres. Avec 800.000 euros de dons, le Royaume-Uni rapporte plus que l’ensemble des dix plus grandes villes françaises de province !

Difficile de ne pas penser que la suppression de l’impôt sur la fortune n’est que le renvoi d’ascenseur à ceux qui ont financé son élection.

Autre problème, on retrouve les fameux "premiers de cordée" d'Emmanuel Macron dans les Panama Papers, dans les Paradise papers ou accusés de fraude fiscale. Carlos Goshn accusé de fraude fiscale et d’abus de biens sociaux, à l’ombre au Japon, Serge Dassault avec ses affaires en rafales et décédé avant que la justice ne le juge, Alexis Kohler, le secrétaire général de l’Elysée suspecté de conflit d’intérêt en raison de liens familiaux avec le croisiériste MSC, Bernard Squarcini, mis en examen pour « abus de confiance » car il est suspecté d’avoir privatisé les services de la DGSI pour LVMH et son patron Bernard Arnault. Ce dernier a "fait appel à au moins huit cabinets de conseil différents pour localiser ses actifs dans six paradis fiscaux différents", affirme Le Monde... Il y a aussi les cadeaux fait aux entreprises avec un bilan emploi calamiteux. Les premiers de cordée, c’est Game of fraude.

Autre sparadrap qui colle aux chaussure du Président, le mépris des gens ordinaires. Il y a ces petites phrases et la pédagogie du gouvernement que Coluche résumait déjà ainsi : « Dites nous ce dont vous avez besoin et on vous expliquera comment vous en passez ».

Après Vizir et ses vizirettes, Manu et ses mesurettes ?

Jupiter doit parler. On peut malheureusement penser que sa stratégie va être donner (très peu ou peu, suivant le curseur), de reconnaître quelques maladresses… pour surtout ne rien changer. On parle d’une prime de Noël, un petit cadeau sous le sapin. Muriel Pénicaud appelle les entreprises à augmenter les salaires face à l’urgence sociale, tout en excluant une véritable augmentation du Smic. Malheureusement, on peut craindre que le Président ne prenne la mesure de la crise profonde. Et pourtant, dans la situation cette intervention, il n’a pas le droit de se rater. Il faut sans doute des mesures symboliques comme le rétablissement de l’ISF, mais surtout une véritable feuille de route pour réformer en profondeur notre démocratie.Sans un véritable plan efficace de rétablissement d'une équité sociale, il est peu probable que la grogne retombe, les aspirations étant très élevées sur ce point.

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