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par Antoine Champagne - kitetoa

Florence Parly visite la DIRISI

Une visite "ouverte-fermée" pour la presse

Faire un petit tour dans un datacenter de la Direction interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information, pourquoi pas. Mais l'Armée n'est pas surnommée "la grande muette pour rien"...

La Lumière Rouge - © Reflets - Citation Reflets.info requise

La ministre des Armées, Florence Parly, était en déplacement au Fort du Mont Valérien ce 1 octobre, en visite dans les locaux de la DIRISI. Elle était accompagnée de Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État chargé du numérique, des apéros French Tech, et de BFM Tech. La presse était conviée à suivre cette visite. Ce type de déplacements est généralement d'une grande banalité, les discours prononcés sont creux et lénifiants. Bref, cela n'a aucun intérêt à part pour les ministres qui voient leur nom le lendemain dans le journal par la magie d'une dépêche d'agence.

Pas vraiment la tasse de thé de Reflets, bizarrement. Mais faire un petit tour dans l'un des quatre datacenters de la DIRISI, cela a un peu piqué notre curiosité. Pour plusieurs raisons. La première étant que la DIRISI est une cliente de longue date d'Amesys. Et qui sait, c'était peut-être l'occasion d'en apprendre un peu plus sur l'entité qui assure les communications de l'armée française, une sorte d'équivalent de la DISA ? Reflets a donc fait le déplacement.

Datacenter DIRISI - © Reflets - Citation Reflets.info requise
Datacenter DIRISI - © Reflets - Citation Reflets.info requise

Mais c'était sans compter sur l'armée... Cette grande muette... Elle invite la presse mais l'encadre de très, très près. Pas question de poser des questions aux ministres. Pas question de prendre des photos de telle ou telle armoire, tout ça est sans doute secret-défense. Sauf pour la très grosse équipe de presse interne au ministère qui avait déplacé moult photographes et cameramen pour immortaliser le moindre des gestes de leur ministre. Eux étaient autorisés partout, ben oui, et ont pu suivre tout le déplacement de la ministre, tandis que la presse (cinq journalistes) étaient priés de patienter poliment devant une porte pendant plusieurs épisodes de la visite.

Même en regardant de près, pourtant, il n'y a rien à voir dans les baies interdites de photos. Quelques câbles bien rangés, mais pas aussi bien que dans certains datacenters qui concourent pour le premier prix en matière de cableporn.

Impossible de savoir à quoi servent les armoires présentées dans une petite partie du datacenter qui a été présentée à Florence Parly et à Mounir Mahjoubi. C'est joli, ça clignote, une partie est refroidie, pas l'autre. Autorisation a été donnée de photographier les couloirs rouges (pas refroidis), pas les couloirs bleus (refroidis). Allez savoir pourquoi (il y a pourtant toutes les infos ici)... Blue Team, Red Team ?

Datacenter DIRSI - © Reflets - Citation Reflets.info requise
Datacenter DIRSI - © Reflets - Citation Reflets.info requise

Est-ce que "le-gros-bouton-rouge" permet d'arrêter les Internets ? Et pourquoi quand ça marche, la lumière rouge est-elle allumée tandis que quand ça s'arrête, c'est la lumière verte qui prend le relais ? Logique militaire ? On n'en saura pas plus.

Le-Gros-Bouton-Rouge - © Reflets - Citation Reflets.info requise
Le-Gros-Bouton-Rouge - © Reflets - Citation Reflets.info requise

Florence Parly a observé avec beaucoup d'attention les armoires, tandis que Mounir Mahjoubi semblait primesautier.

Mounir Mahjoubi et Florence Parly - © Reflets - Citation Reflets.info requise
Mounir Mahjoubi et Florence Parly - © Reflets - Citation Reflets.info requise

Il faut dire que sur le petit papier collé sur l'armoire, le texte était amusant. Il s'agit d'un petit manuel titré "Lutte informatique défensive" qui donne la marche à suivre en cas de "découverte ou de suspicion d'incident de cybersécurité". En d'autres termes, que faire quand les hackers russes ou nord-coréens attaquent. Et bien, il faut tout sauvegarder pour les traces (malin) et faire une archive "au format Zip avec mot de passe OBLIGATOIRE : 'virus'".

Après cette ballade dans les entrailles du Mont Valérien, les deux membres du gouvernement sont remontés à la surface pour recevoir des cadeaux offerts par la DIRISI et prononcer des discours.

Florence Parly a reçu une très belle aquarelle et a eu l'air très émue par cette attention des personnels. Mounir Mahjoubi a quant à lui eu droit à des bouquins. Dédicacés ?

Tiens, c'est cadeau ! - © Reflets - Citation Reflets.info requise
Tiens, c'est cadeau ! - © Reflets - Citation Reflets.info requise

Les discours ont été profonds et regorgeaient d'annonces. On a ainsi appris que la DIRSI n'a rien à envier aux plus grandes startups du secteur, que 1,8 milliard d'euros serait consacré cette année aux systèmes d'information et de communication du ministère, que le SOC serait refondu "pour le rendre plus sûr", avec l'aide de la DGA. Qu'il faut "casser les silos absurdes", que "la DIRISI est garante de la supériorité informationnelle et qu'il faut faire face au "défi de la donnée déferlante". Mieux, le ministère, qui vient de "choisir Qwant comme moteur de recherche par défaut" doit "gagner la bataille des talents informatiques", "s'ouvrir aux logiciels libres" et s'appuyer sur des sociétés privées, une base industrielle solide, pour soulager les équipes des tâches les moins critiques_".

Si avec ça on ne gagne pas la cyber-guerre, on sait où venir se pendre.

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