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Édito
par drapher

Etat du monde en 2017 : un pas de côté

Pouvons-nous comprendre l'état du monde après cette année écoulée ? Est-elle particulière ? Y a-t-il un cap franchi, des événements majeurs indiquant une charnière politique , sociologique ou économique importante en 2017 ? À l'impossible, nul n'est tenu, et bien que l'exercice soit périlleux, il y a un pas de côté nécessaire à effectuer pour tenter de dégager un bout de sens global à cette année 2017 franchement… difficile et inquiétante. Suivez le guide.

Pouvons-nous comprendre l'état du monde après cette année écoulée ? Est-elle particulière ? Y a-t-il un cap franchi, des événements majeurs indiquant une charnière politique , sociologique ou économique importante en 2017 ? À l'impossible, nul n'est tenu, et bien que l'exercice soit périlleux, il y a un pas de côté nécessaire à effectuer pour tenter de dégager un bout de sens global à cette année 2017 franchement… difficile et inquiétante. Suivez le guide.

Vivre sous la menace de pantins aliénés

Le premier fait marquant, qui déclenche une cascade de changements à l'échelle planétaire est bien entendu la prise de fonction de Donald Trump en janvier dernier. Puis sa première année de présidence désormais bientôt écoulée. L'arrivée à la Maison Blanche d'un bouffon raciste et misogyne, un sale type, vulgaire, imbécile, milliardaire, lié aux suprémacistes blancs, soutenu par le pire de ce que les États-Unis d'Amérique peuvent engendrer en termes d'idéologie et de vision du monde, de modèle de société, a été un choc. Puis, rapidement, un sentiment de véritable inquiétude a prévalu dans le monde entier : le nouveau chef d'état américain est-il fou ? Malade ? Inconscient, aliéné ? Manipulé ? Décalé ? Les différents épisodes de la [très délirante] série "Donald à la Maison Blanche" ont permis de valider toutes ces hypothèses. Le président qui tweete est réellement un aliéné, qui voit le monde comme une émission de télé-réalité dans laquelle il aurait le premier rôle. La mégalomanie doublée d'inculture crasse de Donald-président a failli a plusieurs reprises mener le monde au bord du gouffre, nucléaire, entre autres. Ce fils-à-papa, magnat de l'immobilier par héritage, qui n'a jamais eu à lever un petit doigt pour se hisser dans sa tour d'ivoire d'ultra-riche, joue désormais avec le monde. Comme un sale gosse, ravi de la bonne blague qu'il a réussi à faire.

En face d'un tel abruti à la compréhension des réalités parfaitement dérangées, il fallait bien opposer un autre imbécile mégalomane et bien décalé : Kim Jong-un. Un autre fils à papa, élevé en Suisse, dans les meilleures écoles du pays des banques et du chocolat, pris en charge par des domestiques depuis son plus jeune âge et adepte des jeux vidéos débilitants. Un milliardaire-geek, fils de dictateur, et jeune dictateur à son tour depuis 2010.

Comme cette année 2017 semble avoir été celle de la copie dans le monde réel des séries dystopiques à tendances totalitaires, apocalyptiques et catastrophiques, nous avons donc subi pendant des mois la menace d'un hiver nucléaire, déclenché par deux fils de milliardaires mythomanes et narcissiques, aux intellects limités. Avec un peu de recul, après la séquence de cette année entre Donald et Kim, la guerre froide des années 60 et 70 devient un parcours de santé sous contrôle de gens respectables et sensés. Nixon, ou Reagan deviennent des types recommandables et leurs alter ego soviétiques des grands intellectuels hyper apaisés.

Le néo-fascisme xénophobe-nationaliste : nouvelle norme ?

L'année écoulée, bien que sous influence des délires de Trump, ne s'est pas contentée de suivre gentiment ses tweets et autres déclarations aux relents ataviques. D'autre s'y sont mis. La parole "s'est libérée", comme l'expliquent désormais les nouveaux observateurs des arènes populaires numériques. Une parole libérée pour des chefs d'état, et par ricochet pour les populations. Nous avons donc eu un président philippin élu, qui continue à appeler les citoyens à faire leur propre justice (pour régler les problèmes de ventes de drogue dans le pays) et se vante d'être lui-même un assassin. Erdogan en Turquie continue sa purge, qui est en réalité est l'organisation d'une dictature policière aux moyens décuplés par les technologies numériques, tout comme en Egypte où le général putchiste Sissi fait enfermer et torturer toute voix dissidente grâce aux technologies "d'écoutes" françaises de l'entreprise Nexa, ex-Amesys.

AiIleurs, la tendance n'est pas meilleure, puisque la permission d'être inhumain, xénophobe et de jouer aux nazis (mais sans la croix gammée et sans la performance industrielle du IIIème Reich) a été déclarée "acceptable". Le Yemen voit donc des millions de personnes déportées, affamées, bombardées, emportées par le choléra sous l'intervention des "chers amis saoudiens" d'une majorité des grandes puissances composant le G8, France et Royaume-uni en tête, avec appui militaire du pays de Donald. Macron, un peu gêné par la situation vient tout juste d'énoncer "sa préoccupation" aux Saouds. Pas certain qu'il aille plus loin. Les musulmans Royinghias sont déportés ou massacrés (au choix) par les sbires de la gentille militante birmane qui continue de sourire aux caméras pour éviter de répondre des exactions qu'elle couvre. C'est beau l'humanisme et la défense des minorités, quand ça ne touche que les siens…

En Hongrie, Orban continue de proposer de créer une société néo-fasciste fermée sur elle-même qui interdit la liberté de la presse et glorifie les valeurs de la patrie contre les "invasions de migrants". En Bulgarie, le virage a été pris dans le même sens, comme en Pologne. Les électeurs lèvent le poing (voire le bras), pas pour un monde meilleur et plus humain, mais au contraire pour un monde plus autoritaire, plus surveillé, plus régenté, qui se donne le droit de maltraiter les plus faibles, les plus en difficulté. L'Allemagne — particulièrement celle de l'ex RDA — a poussé 92 députés néo-nazis au Parlement. L'Autriche a fait de même, les néo-nazis sont au gouvernement.

Or donc, les réactionnaires à tendance nationaliste et xénophobe, autoritaristes et populistes crasseux ont eu le vent en poupe cette année. Les gens les plébiscitent dans les urnes, quand ils ne les acclament pas. Comme la police, devenue une sorte de phare citoyen, rempart protecteur des braves gens contres les méchants délinquants et autres terroristes. Un plébiscite populaire qui perdure même quand son racisme affiché (à la police) et assumé n'arrive plus à être caché par les autorités politiques. La tendance nationalo-réactionnaro-fascisto-xénophobe est donc une tendance de fond, il semble.

Grandes tendances : influence de masse et contrôle de l'information

Si l'on sort de l'aspect purement politique des mesures néo-fascistes appliquées en "démocratie" — avec par exemple un Gérard Collomb qui gère les personnes réfugiées en France avec un humanisme très proche de celui de Pétain — l'année 2017 reste celle de la communication et du contrôle de l'information. L'innovation, les "alertes", les appels à avancer, à lutter contre les fake news, ont recouvert avec brio les débats et autres pseudo projets de société. Partout sur la planète le monde numérique a envahi le champ social : tout va changer et change déjà, braves gens. Facebook a atteint les 2 milliards de comptes, Twitter n'a pas cessé d'inciter à créer du buzz facho-compatible, Google devient le garant de la Vérité Absolue aidé par les hipsters du Monde en plein complexe de "Pravda-Decodex".

Oui, en 2017, le monde entier a découvert effaré (enfin, surtout le "grand public") que l'information pouvait être manipulée. Que les réseaux dits "sociaux" étaient une arène propagandiste sous influence permanente qui orientaient les esprits, voire pouvaient même les formater. En masse. Un phénomène que Reflets analyse et décrypte depuis plusieurs années est donc devenu mainstream : encore un.

La réaction générale ne s'est pas fait attendre, habituelle et attendue : reprise en main par le complexe politico-économique (surtout économique) avec mesures de contrôles et invention de nouvelles censures en ligne. La création de systèmes orwelliens de contrôle de la qualité de l'information, en 2017, est l'une des nouveautés qui risque de s'amplifier dans le temps. Le principe sera donc de décider pour le bien des "citoyens ordinaires" ce qui est vrai de ce qui est faux ou non fiable. Des organismes privés (mais aidés par les Etats pour les organes de presse) commencent donc à déterminer ce qui peut être lu en toute confiance et est censé être impartial et juste, de ce qui ne peut pas se voir accorder de crédit et n'est pas fiable.

Orwellien disions-nous…

Un monde de notoriété et de communicants

La nouvelle ère qui s'annonce et qui a fait la démonstration de sa prégnance future en 2017, est celle des communicants et de la "notoriété pour tous". Les élections de Macron, de Trump, comme toutes celles qui vont arriver, sont un condensé de neuro-marketing activé tant sur les chaînes de télévision, que sur Internet. Tout est désormais pensé en termes de découpage des idées force adaptées aux désirs du public et de mise en abîme des individus dans cette extraordinaires capacité qu'ont les outils en ligne à créer des sensations de notoriété artificielle, très addictives. Si au moment de la coupe du monde de football il a y 20 millions de téléspectateurs et autant de spécialiste et d'arbitres de ce jeu, il y a en réalité autant de spécialistes en économie, politique, société, etc, qu'il y a d'internautes activant des comptes Twitter ou Facebook. Chacun estimant que son avis, son opinion, sa sensation, son analyse, ont un intérêt, sont écoutées, sont partagées. Plus la personne a de followers ou d'amis, plus elle se persuade que sa notoriété a une influence, que ses avis comptent. Ce nouveau monde qui explose particulièrement depuis un an est une aubaine pour les populistes. Un enfer pour une vie en société démocratique apaisée et constructive. Résultat : la polarisation des discours est devenue la règle. Avec son lot d'empaillages quotidiens et de polémiques permanentes…

Pour finir ce léger pas de côté sur le bilan de l'année 2017, il semble intéressant de regarder qui a gagné la palme du bourrage de crâne. Il semble, selon une analyse faite à la louche et sans aucuns indicateurs, que sans conteste, ce soit un principal concept qui l'emporte haut la main : l'IA, ou Intelligence artificielle. Il va sans dire que les promoteurs de la bestiole n'y sont pas allés avec le dos de la cuillère numérique, mais tout en insistant bien sur un phénomène que les esprits du plus grand nombre ont dû forcément assimiler : celui de l'inéluctabilité. Oui, l'IA est déjà un peu là, elle s'installe partout, elle va tout envahir, elle va vous foutre au chômage, elle va faire mieux que les humains, et c'est… I-N-E-L-U-C-T-A-B-L-E.

There Is No Alternative. Une fois de plus. Et pour notre plus grand malheur, puisque malgré les prophéties sur la super médecine en mode IA ou les avancées scientifiques les plus folles qui devraient émerger selon ses promoteurs, l'IA est aussi vendue comme une vraie saloperie potentielle. Par ceux-là mêmes qui la vendent. C'est assez unique et surprenant, mais c'est aussi la "recette de 2017" : tout est permis, tout est possible, et l'indécence étant au pouvoir un peu partout, pourquoi se priver ?

A bientôt. En 2018. Une année magique, qui laissera 2017 loin derrière en termes de dépassement des limites de la décence la plus élémentaire ? Nous verrons bien…

En attendant, l'auteur de ces lignes a décidé que la première résolution qu'il allait tenir pour 2018 était de supprimer son unique compte de réseau social, celui de Twitter. Une sorte de mise en conformité entre la pensée… et les actes.

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