Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
par Eric Bouliere

Du vert au verre : l'abus d'alcool est-il dangereux pour l'écologie ?

De l'urgence climatique à convertir des zones naturelles en terrains constructibles

Des maires, des élus, une grande maison de cognac, un beau château, quelques oiseaux, des procédures, des enquêtes, des intérêts… Agitez le tout pour obtenir un cocktail explosif à base d'un étonnant assemblage de raisins et de raisons.

La campagne anti-boisson qui aura marqué les années 80... - Reflets

Dater précisément chaque épisode de cette épopée s'avère essentiel tant la chronologie des faits prend ici une réelle importance. Mais avant cela, quelques précisions s'imposent pour bien cerner de quoi il retourne. Cette affaire se déroule à Saint-Xandre (17138), une adorable petite commune voisine de La Rochelle. Cernée de plaines agricoles, elle connait actuellement une urbanisation galopante. Ce qui relève de l'aubaine financière pour certains alimente le désespoir écologique chez les autres.

Saint-Xandre (17), la petite commune qui monte, qui monte… - Reflets
Saint-Xandre (17), la petite commune qui monte, qui monte… - Reflets

Parmi les différents travaux en cours de réalisation sur la commune, le chantier du Parc d’activités de l’Aubreçay a généré de sévères tensions entre les "pour" et les "contre". Cette opération fut initialement présentée aux élus locaux en termes choisis: "L’enjeu principal est de répondre au besoin de foncier économique pour une mixité d’activités, dont, des activités artisanales et de petite production".

Habitat, zones d'activités, infrastructure, Saint-Xandre change - Reflets
Habitat, zones d'activités, infrastructure, Saint-Xandre change - Reflets

Par la suite les riverains concernés ont découvert les contours exacts de l'artisanat local: une super-déchetterie intercommunale, un poste source de 12 transformateurs Enedis, des entrepôts et des hangars.

Oublions ce chantier de l’Aubreçay pour nous concentrer sur une toute autre opération appelée à s'implanter sur le sol communal. Il s’agit de la présentation du projet du domaine de la Sauzaie qui va encore faire monter la pression d'un cran ! .

Un banc d’huîtres au château : tout avait si noblement commencé… - Reflets
Un banc d’huîtres au château : tout avait si noblement commencé… - Reflets

Ce projet-là est supporté par la maison Godet, une enseigne réputée sur le marché de l'eau de vie de Cognac. L'entreprise familiale souhaite délocaliser ses entrepôts pour s'installer à proximité du splendide château de La Sauzaie. Ce dernier est partiellement inscrit au registre des monuments historiques pour la beauté de ses façades du 18e, de ses cheminées, ponts, douves et autres portails. Il revêt également un caractère patrimonial pour avoir accueilli le Cardinal de Richelieu durant le siège de la Rochelle en 1627. Ce bâtiment remarquable trônait jusqu'en 2019 en plein centre d'une zone naturelle protégée. Oui, mais voilà…

Le château dans toute sa splendeur, ici photographié en 2018.  - Reflets
Le château dans toute sa splendeur, ici photographié en 2018. - Reflets

Avant d'entrer dans le vif du sujet, gardons en tête un principe de base d'ordre législatif : rien n'est figé dans le temps en matière d'urbanisation. La destination des lieux et des biens varie selon les évolutions du Plan Local d'Urbanisme Intercommunal (le fameux PLUi), qui lui-même varie selon les nécessités ou les envies du moment. A quelques obligations près, et contrairement à ce que l'on s'imagine, une verte étendue sacralisée un jour ne le restera pas obligatoirement toujours. Les règles et les lois sont ainsi faites qu'il devient possible de déclassifier une zone protégée (classée N) en parcelle constructible à vocation économique ou industrielle (zone 1AUX). C'est précisément de cela dont il s'agit à La Sauzaie.

Les abords directs du château: il n'y aura peut-être pas que les panneaux à retirer - Reflets
Les abords directs du château: il n'y aura peut-être pas que les panneaux à retirer - Reflets

Année après année, mois après mois et jour après jour, voici le comment du pourquoi le cognac tourne vinaigre dans un hameau si tranquille…

Le 15 octobre 2002: départ de feu

Le site historique de la maison Godet qui offrait un accès direct à la mer - Reflets
Le site historique de la maison Godet qui offrait un accès direct à la mer - Reflets

Un incendie se déclare au siège historique de la société des Cognacs Godet. Les bureaux et les chais se situent le long du canal Maubec en plein cœur de la vieille ville de La Rochelle. Des milliers de mètres cubes d’alcool pur sont stockés dans les bâtiments du quartier Saint-Nicolas. Le pire est évité, mais face au danger, une fermeture préventive du site est annoncée. La maison Godet se voit dans l'obligation de quitter les lieux.

Les entrepôts Godet à Laleu: une zone industrielle amenée à s'étendre - Reflets
Les entrepôts Godet à Laleu: une zone industrielle amenée à s'étendre - Reflets

Les précieuses et inflammables barriques quittent donc le vieux port dans les années 2005 pour être transférées dans la zone industrielle des Rivauds-Nord de Laleu, en bordure d’une voie express. Un décor qui ne cadre plus vraiment avec l'image de prestige revendiquée par la marque.

Le 29 Aout 2013 : faites passer

Cela commence par la bonne aventure du commerce par mer… - Reflets
Cela commence par la bonne aventure du commerce par mer… - Reflets

Voici un détail certes anecdotique, mais qui permet de mieux appréhender le statut des établissements Godet au sein de la cité Rochelaise. Cette année-là, Maxime Bono, maire en poste, décide de baptiser l'une des plus célèbres passerelles du vieux port du nom du plus célèbre aïeul de la famille Godet. Bonaventure Godet était un négociant hollandais qui émigra à La Rochelle en 1550 pour y faire commerce. Le ton d'un article paru dans la presse locale laisse supposer de l'éminence de la célébration : "Du haut de cette passerelle, cinq siècles nous contemplent. La formule est osée, mais ne devrait pas déplaire à Jean-Jacques Godet, actuel patron de la maison de cognac éponyme qui n’est pas, lui non plus, avare d’adages maison. Exemples sur le site Internet de l’entreprise - Mon cigare, mon chien, mon Godet -, -L’homme fait le Godet, le Godet refait l’homme -, ou -le cognac Godet illumine les femmes, les hommes le boivent- ".

Il faut reconnaître que si ce patronyme est solidement ancré dans la pierre rochelaise, il l'est sans doute plus encore dans le secteur économique du territoire. Les frères en question se sont donnés pour mission de reconquérir un vignoble rochelais anéanti par le phylloxéra en 1878. À cette fin, ils se destinent à planter un premier rang de vigne sur les terres du château. Quinze générations et cinq siècles plus tard, Jean-Jacques Godet, le père, et ses trois fils, Cyril, Maxime et Jean-Edouard, font encore tourner la barrique.

Le 15 mai 2019 : adjugé, vendu !

Placé aux enchères publiques, le château change de main en mai 2019 - Reflets
Placé aux enchères publiques, le château change de main en mai 2019 - Reflets

Le château de la Sauzaie se situe sur la commune de Saint-Xandre. Ses ex-propriétaires ne parvenant plus à honorer leurs dettes furent contraints de s'en séparer. Une première étude notariale se chargea de le soumettre aux enchères publiques en 2017 (mise à prix à 500 000 €), mais la vente ne se réalisera qu'en 2019 avec une offre de départ fixée à 450 000 €. La famille Godet acquiert ce bien pour la "modique" somme de 660 000 €.

Tout est relatif, mais on peut sans gêne parler d'une affaire en or compte tenu du potentiel de la propriété: situation, dépendances, chapelle, terrains de 7,2 hectares, tout ici respire le calme et la grandeur. Le luxe de la nature avec un grand N, comme zone Naturelle, avec en prime un magnifique château pour y loger princièrement sa famille. A cet instant-là le domaine est réglementairement protégé et il demeure impossible d'y construire quoi que ce soit d'industriel ou de commercial.

Le 19 décembre 2019 : écouter le PLUi tomber

Mieux qu'un somnifère pour s'endormir, un PLUi - Capture d'écran
Mieux qu'un somnifère pour s'endormir, un PLUi - Capture d'écran

Suite au Grenelle 2 de l'environnement les autorités locales se sont attachées à redéfinir la destination des terrains sur les 28 communes composant la communauté de l'agglomération Rochelaise. Ce travail titanesque s'est traduit par l'abandon de l'ancien PLU (Plan local d'urbanisme) au profit d'un nouveau PLUi (avec un i pour intercommunal). Le but étant de spécifier la nature de toutes les zones existantes (A : agricole, N : naturelle, AU : à urbaniser, ZH : zone humide…) ainsi que les orientations d'aménagements et de programmation (OAP) envisagées sur telle ou telle parcelle. Ce grand chambardement cadastral n'aura pas été sans incidence sur la classification du domaine, qui est passé de zone protégée à zone classée 1AUX (constructible commerces, bureaux, entrepôts, industries…).

En rouge la description du futur entrepôt en zone 1 AUX. Bien entouré! - Capture d'écran
En rouge la description du futur entrepôt en zone 1 AUX. Bien entouré! - Capture d'écran

Ainsi, dès décembre 2019 et au détour des 8.000 pages de ce pavé législatif, un œil exercé ou averti aurait pu prédire l'avenir dans le PLUi nouveau. Le projet Godet s'y voyait décrit avec une précision d'architecte. On parlait d'une "mise en valeur du site historique et naturel de la Sauzaie. La restructuration des 7 hectares concernés permet la mise en place d'un ensemble oenotouristique dédié. Le projet délimite les emprises constructibles dans la partie sud de l’unité foncière qui ne présente pas de sensibilité paysagère marquée ni de présence de traces historiques liées au château. Les haies présentes en périphérie sont préservées. Les bâtiments ne dépassent pas les hauteurs suivantes : 5 mètres pour les bâtiments de bureau et 10 mètres pour les bâtiments dédiés à la production. Le château et ses dépendances (dont la chapelle) sont conservés dans leur aspect extérieur et ne peuvent qu’être rénovés. Les dépendances évoluent en lieux muséaux. Le château évolue en lieu de réception privée. La chapelle évolue en lieux d’exposition".

En somme, tout, du plafond aux bas-fonds, tout était dit, presque entendu, voire métré au centimètre près. Et cela bien avant que le dossier ne soit clairement porté à la connaissance d'un large public, avant que la moindre autorisation environnementale ne soit délivrée, et avant même que ne soient officiellement déposées les ambitions des propriétaires eux-mêmes. Une chose est sûre, la machine était lancée.

Le 5 février 2020 : la lettre au préfet

Une demande officielle est signifiée à la connaissance du préfet - Capture d'écran
Une demande officielle est signifiée à la connaissance du préfet - Capture d'écran

Les choses s'accélèrent. M. Jean Edouard Godet adresse un courrier au préfet de Charente-Maritime dans lequel il précise les intentions de la SAS Godet-Frères-Cognac : "Nous avons le plaisir et l'honneur de vous transmettre ce jour le dossier de demande d'autorisation environnementale relatif à nos activités de stockage d'alcool de bouche sur notre futur site de Saint-Xandre". On y apprend par incidence que le projet tient la route et qu'il ne tombe pas de la dernière pluie puisque : "il se situera à proximité du château, et a fait l'objet de nombreux échanges avec l'architecte des bâtiments de France". Cette demande d'autorisation porte alors sur la création de 4 chais de stockage offrant une capacité maximale égale à 1175 m3.

Le 24 Mars 2020: le cas du cas par cas

Une sérieuse demande à étudier au cas où… - Capture d'écran
Une sérieuse demande à étudier au cas où… - Capture d'écran

La demande d'examen au cas par cas est un verrou pour obtenir les indispensables autorisations officielles. Ce document se doit d'être précisément renseigné. On peut s'étonner du nombre de chais déclarés sur ce support en comparaison de celui rapporté sur le courrier précédent: "Création d'un site comportant 9 chais de stockage d'alcool d'une capacité comprise entre 130 et 444 m3". Toujours est-il que la liste des installations s'étoffe ici d'un espace de stockage de matière sèche, d'un local technique, d'un espace de production et d'embouteillage, de bureaux, de salles de réunion, de sanitaires, de voies de circulation, d'une réserve incendie pour les pompiers, d'une fosse d'extinction de 150 m3, d'un bassin de rétention étanche de 222 m3 couplé à un tamponnement des eaux pluviales de 353 m 3, d'une noue de débordement de 1208 m3…

En termes simples, un véritable petit complexe industriel. On se rassure en apprenant que "L'activité de stockage d'alcool n'engendre pas de risques sanitaires", et l'on se réjouit d'entendre dire que les constructions ne modifieront en rien l'usage des sols puisque "Le terrain fait déjà partie du zonage 1 AUX de la commune de Saint-Xandre qui destine les terrains à une activité économique". Rien à craindre non plus en ce qui concerne le trafic routier car "Environ 100 camions par an sont attendus par la suite". Une estimation qui, comme le nombre de chais, sera sujette à variation dans le temps.

Menées à deux ans d'intervalle, deux études aux conclusions plutôt floues - Capture d'écran
Menées à deux ans d'intervalle, deux études aux conclusions plutôt floues - Capture d'écran

Deux études environnementales seront jointes à cette première demande d'examen. La première, une expertise botanique réalisée par le laboratoire Biotope, précise : "Au regard de l’ensemble des éléments, il n’apparaît pas nécessaire de procéder à une expertise complémentaire des sols sauf si les services instructeurs le demandaient… seuls les boisements rivulaires observés en bordure de parcelle au droit du réseau hydrographique sont considérés comme zone humide. Eu égard à leur localisation, ils seront probablement exempts des aménagements en projet". Il n'apparaît pas nécessaire, sauf si, à considérer, probablement… ces conclusions s'avèrent aussi peu formelles que la date apparaissant sur le sommaire de l'étude (le 29/03/20178). Un détail peut-être, mais le diable et la nature en connaissent l'importance.

Le second rapport, réalisé deux ans plus tard par une société de conseil en environnement, s'honore d'un verdict tout aussi prudent : "Il ne semble pas y avoir d’enjeux écologiques forts. Cependant, une seconde visite de prospection en fin de printemps, début d’été, est nécessaire pour mieux connaître la flore, et surtout la faune de la parcelle. En effet, la première visite a dû être réalisée sous des conditions peu favorables à l’observation de la faune (période, météo), le but de la prospection étant de dégager les potentialités faunistiques du site, plus que de réaliser un inventaire. La présence de plusieurs passereaux, rapaces nocturnes, reptiles, insectes, est donc considérée comme probable, mais n’a pas pu être vérifiée".

Le 28 avril 2020 : impact, pas un pacte.

Ah oui, pour l'étude d'impact, la réponse est non ! - Capture d'écran
Ah oui, pour l'étude d'impact, la réponse est non ! - Capture d'écran

En avril, l'avis de la Préfète de la région Nouvelle-Aquitaine est requis pour statuer s'il est pertinent d'effectuer une étude d'impact environnemental. D'aucuns suggèrent qu'une analyse plus poussée soit réalisée avant de s'engager plus avant. Les nombreux attendus émis par la haute autorité préfectorale pouvait laisser croire du bien-fondé de la mesure. Toutefois considérant "qu’en tout état de cause, il n’est pas possible de déterminer à ce stade avec certitude la présence ou l’absence de zones humides, qu’il revient ainsi au porteur de projet de réaliser de nouvelles prospections à une période favorable et selon les critères méthodologiques applicables et appropriés, qu’il est de la responsabilité du porteur de projet de prendre toutes les mesures permettant de garantir la non-atteinte à l’environnement naturel avoisinant", la Préfète juge et arrête très officiellement "que ce projet n’est pas soumis à la réalisation d’une étude d’impact". Zéro carbone en 2050, mais zéro discussion en avril 2020…

Le 10 septembre 2020 : un hôtel, ça va, ça vient !

Un logement idéal à proximité immédiate du château - Reflets
Un logement idéal à proximité immédiate du château - Reflets

Une propriété sise au lieu dit -Les Mottais- se tient à un vol de mouette du château de la Sauzaie. Piscine, terrasse, bâtisses de caractère, terrain à l'avenant de 50 000 m2, l'endroit aurait idéalement pu convenir à une activité d'hébergement de grand luxe et qui prendrait tout son sens si une grande marque de cognac s'installait à côté avec son projet oenotouristique. Mais un tel projet se serait heurté aux exigences d'un PLU local lui interdisant tout changement de destination économique ou sociale. En 2018 Les Mottais ont été proposés à la vente sur le marché de l'immobilier pour la somme de 2.5 millions €. Les évidentes prédispositions commerciales de cette habitation ne pouvaient échapper aux éventuels acquéreurs intéressés. Si tant est qu'ils pariaient sur une modification des règles d'urbanisme pour espérer voir évoluer les choses en ce sens. Une solution que seul un PLUi favorable pouvait légalement offrir.

Obtenir l'autorisation de construire un hôtel  - Capture d'écran
Obtenir l'autorisation de construire un hôtel - Capture d'écran

Neuf mois après le vote du PLUi une déclaration préalable de travaux (DP) fut déposée en mairie de Saint-Xandre par des acquéreurs potentiels. Le but de l'opération s'y trouve clairement énoncé : faire des Mottais une résidence hôtelière de standing. Un mémo explicatif joint à cette requête stipule : "Aujourd'hui M. et Mme C. (les propriétaires) souhaitent vendre leur propriété et nous souhaitons poursuivre, avec notre vision, notre projet. Nous imaginons créer un éco-lodge hybride en pleine campagne. Unique sur le territoire…". Cette demande fut toutefois retoquée le 9 novembre par le premier adjoint au maire de Saint-Xandre.

Une correction des statuts est réclamée  - Capture d'écran
Une correction des statuts est réclamée - Capture d'écran

L'affaire semble malgré tout suivre son cours puisqu'une réclamation des mêmes potentiels acquéreurs s'est glissée dans les annexes de la dernière version du PLUi simplifié en date du 4 mars 2021. L'auteur de la réclamation bataille ferme et souligne dans ce texte : "Cet ensemble bâti était classé en zone NP du règlement du PLU de Saint-Xandre approuvé le 23 novembre 2017, au sein de laquelle les édifices bâtis étaient répertoriés et portées au titre de l'article L 189 du code de l'urbanisme. Il apparaît nécessaire de rectifier l'erreur matérielle contenue actuellement dans le plan de zonage du règlement du PLUi de La Rochelle en procédant au déclassement des parcelles AL 13 et AL 16 sur la commune de Saint-Xandre au sein du STECAL "AT" de la zone agricole, et d'identifier les bâtiments existants et protégés au titre de l'article L 151 19 du code de l'urbanisme comme des bâtiments pouvant faire l'objet d'un changement de destination par la matérialisation d'une étoile sur le zonage graphique du PLUi".

L'appel fut pourtant de nouveau réfuté au motif suivant: "Cette observation ne porte pas sur un des objets de la notification simplifiée du PLUi et ne peut être prise en compte dans le cadre de cette procédure". Mais rien ne semble définitivement perdu car : "Cette observation est enregistrée et sera étudiée lors d'une évolution ultérieure du document". A ce jour la vente ne s'est pas réalisée mais une société en gérance a bien été créée ; elle est enregistrée au greffe du tribunal de commerce de La Rochelle sous la dénomination –Les Mottais –. Morgane Motteau et Romain Motteau en sont les gérants. A la ville, Morgane Motteau est Morgane Fountaine, fille de Jean-François Fountaine, et Romain Motteau, son mari, est directeur général délégué du groupe Fountaine-Pajot, un chantier naval créé par Jean-François Fountaine, actuel maire de La Rochelle et président de la communauté d'agglomération.

Le 19 novembre 2020 : un vol de LPO

Quand c'est non, c'est non… - Capture d'écran
Quand c'est non, c'est non… - Capture d'écran

La LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux) découvre le projet. À cette occasion le délégué territorial de Charente maritime rappelle les intentions avouées de l'agglomération Rochelaise à qui veut l'entendre: "Réduire la consommation de terres agricoles, centraliser les activités sur des axes routiers, densifier les parcs d'activité économique, et respecter le cadre de vie des habitants". La position de la ligue est claire et sans appel : "Le projet de développement de l'entreprise Godet dans le village de la Sauzaie nous interpelle, car il entre en contradiction avec ces ambitions et ces finalités. La décentralisation de cette activité industrielle dans un petit village rural de la commune de Saint-Xandre, à proximité de zones Natura 2000, la déclassification de zone naturelle à cette fin, l'artificialisation de 7000 m2 ainsi permise, vont à l'encontre du nécessaire respect de la nature et de la biodiversité". Nous verrons plus loin comment le vice-président de la communauté d'agglo s'autorisera à traduire cette franche opposition.

Le 22 novembre 2020 : un très, très beau château

Et hop! Un petit coup de neuf… - Reflets
Et hop! Un petit coup de neuf… - Reflets

Les premiers permis de construire délivrés par la mairie de Saint-Xandre s'affichent sur la clôture du château. Dans les salons on parle plus volontiers des travaux de restauration du château que de la construction du complexe industriel attenant. Le château sera beau, point à la ligne, l'argument porte et semble suffire. Nombreux sont les élus à y voir un véritable cadeau du ciel.

Le 24 décembre 2020 : la fin, fin prête

A peine arrivé mais déjà prêt à partir en nettoyant les lieux… - Capture d'écran
A peine arrivé mais déjà prêt à partir en nettoyant les lieux… - Capture d'écran

Par un courrier du 5 novembre la société Godet s'engage à respecter les termes de la loi en cas de fermeture de l'installation ou de cessation d'activité. Dans ce cas, les Godet n'en resteraient pas moins propriétaires du terrain. Rapidement à la mi-décembre Madame Evelyne Ferrand, maire de Saint-Xandre, consigne cette évidence et l'obligation formelle de sécuriser l'endroit selon des normes légales. Quoi qu'il se passe, la société s'oblige donc à ce que le site puisse conserver une classification 1AUX, et donc une vocation d'accueil d'activité économique. Manquerait plus que la nature décide de reprendre ses droits…

Le 14 janvier 2021 : quatre chais c'est chic

Vers une réduction notable du nombre de cuves…  - Capture d'écran
Vers une réduction notable du nombre de cuves… - Capture d'écran

Une liste des évolutions du projet est annexée au dossier de demande d'autorisation environnementale. Désormais le nombre de chais est officiellement fixé à 4 cuves. A priori, les raisons de ces modifications qui diffèrent par rapport à la demande originelle d'examen au cas par cas ne semblent guère susciter d'intérêt particulier chez les élus. Il en va différemment chez les porteurs du projet Godet qui ont sans doute compris qu'une classification Seveso de l'entreprise (stockage de matière dangereuse ou inflammable) les conduirait inévitablement à devoir répondre à des contraintes environnementales bien plus drastiques.

Le vice président apporte d'utiles précisions sur le classement Seveso - Capture d'écran
Le vice président apporte d'utiles précisions sur le classement Seveso - Capture d'écran

Rappelons-nous que la demande datée du 24 mars 2020 portait sur la création : " d'un site comportant 9 chais de stockage d'alcool d'une capacité comprise entre 130 et 444 m3 d'alcool pur". Ce qui, mathématiquement parlant, pouvait correspondre à une valeur de stockage comprise entre 1170 et 3996 m3. Et c'est à ce propos que le vice-président d'agglo et maire de la commune de Lagord, Antoine Grau, viendra à préciser : " Sur le plan de la dangerosité le projet a déjà été évoqué, et pour vous dire la production de cognac qui était prévue au départ à hauteur de 2400 m3 par an a été portée à 1200 m3, et si vous voulez des références: supérieur à 5000 m3 on est sur du Seveso seuil haut, supérieur à 2500 m3 on est en Seveso seuil bas, inférieur à 500 on est juste soumis à déclaration, et entre 500 et 2000 on est soumis à autorisation avec enquête publique, voilà, ceci était pour préciser et peut-être relativiser la dangerosité de la situation ". Pile poil dedans avec 1200 m3 seulement. Finalement quatre chais c'est déjà bien.

Le 26 février 2021 : rien n'est permis

Les choses sérieuses peuvent commencer - Capture d'écran
Les choses sérieuses peuvent commencer - Capture d'écran

Après les premières restaurations de la toiture et des abords du château, c'est à la construction des cuves de stockage qu'il convient de s'atteler. La demande officielle de permis de construire est déposée en mairie de Saint-Xandre. Le sésame sera délivré en retour le 25 juin.

Les permis de construire s'additionnent mais rien n'est officiellement autorisé.  - Reflets
Les permis de construire s'additionnent mais rien n'est officiellement autorisé. - Reflets

Aucun coup de pelle ne devra toutefois être donné avant la délivrance d'une autorisation environnementale officielle et définitive. Une réalité légale propre à rassurer ceux qui s'offusquent de l'affichage des permis de construire qui s'amoncellent comme autant de feux vert sur les grilles de la propriété.

Le 7 juin 2021 : Conseil municipal à Saint-Xandre

Deux traits de route pour définir d'un périmètre…?  - Capture d'écran
Deux traits de route pour définir d'un périmètre…? - Capture d'écran

Une convention de projet urbain partenarial (PUP) avec la SAS Godet Frère Cognac est inscrite à l'ordre du jour. Compte tenu du passage programmé de véhicules lourds, la mairie s'oblige à réhabiliter des infrastructures routières et autres équipements publics. Les travaux envisagés sont estimés à 152 195 € HT. Le recours au principe d'un PUP permet de répartir ces frais entre la municipalité et l'entreprise à qui les travaux profiteront nécessairement. Les termes de cette convention sont adoptés sur un vote unanime des élus de la municipalité.

Il y aurait-il un comptable qui ne soit pas sous emprise…? - Capture d'écran
Il y aurait-il un comptable qui ne soit pas sous emprise…? - Capture d'écran

On peut une nouvelle fois relever un certain manque de soin et de rigueur dans la rédaction de cette procédure. Car sur le papier, et toutes additions faites, le compte n'y est pas. En effet le tableau d'affectation des sommes qui incombent à la municipalité fait état de 40 614,00 €. Ce total hors taxes ne correspond pas à l'addition des montants affichés. Ce qui s'avère regrettable pour un exercice comptable de cette importance, pourrait s'avérer fort dérangeant au moment de régler la note. Car légalement, qui de la commune ou de l'aménageur Godet, de la chose écrite ou de l'erreur ponctuelle, acceptera de s'acquitter de cette différence de 5246,50 € correspondant aux frais d'études préalable. N'oublions pas que des dizaines d'élus ont, eux, signé un chèque en blanc sur présentation de ce document.

Le 10 juin 2021: Conseil Communautaire

Une élue de l'agglo pas d'accord avec le principe de la confiance aveugle - Reflets
Une élue de l'agglo pas d'accord avec le principe de la confiance aveugle - Reflets

Après avoir été présenté à la municipalité de Saint Xandre, le fameux PUP se voit défendu au sein du conseil communautaire. Le président et maire de La Rochelle, Jean-François Fountaine enchante son discours : "C'est un beau projet, parce que produire du cognac sur notre région c'est revenir à notre histoire. Je veux féliciter tous celles et toutes ceux qui ont travaillé pour permettre d'aboutir sur ce beau projet. Il y a beaucoup de choses inexactes sur ce dossier, je vois ça circuler, mais moi je me félicite qu'on puisse aller vers l'aboutissement de ce beau projet…" Mises aux voix des conseillers, les dispositions du PUP seront adoptées à la majorité des suffrages exprimés. De leur côté les élus EELV s'étonneront du manque global de transparence du dossier en termes de transmission des dossiers d'étude environnementale. Le groupe EELV votera contre cette délibération par la voix de Mme Océane Mariel, conseillère d'opposition et attachée parlementaire du député Benoît Biteau.

Le 12 juin 2021 : l'appel aux amis…

l'association –les amis de la Sauzaie- conteste - Capture d'écran
l'association –les amis de la Sauzaie- conteste - Capture d'écran

Une manifestation citoyenne est organisée dans le but de médiatiser l'affaire. Depuis cette action, restée sans véritable lendemain, le collectif –Les amis de la Sauzaie- enchaîne les démarches pour mieux exposer leurs inquiétudes. Après avoir déposé un recours gracieux, l'association prévoit de multiplier les procédures en contentieux. Le 7 septembre 2021, la ministre en charge de la transition économique est interpellée. La réponse de Barbara Pompili revient par l'intermédiaire de sa cheffe de cabinet : "Le gouvernement a pour objectif la trajectoire du zéro artificialisation nette… l'enjeu aujourd'hui est donc de ralentir l'artificialisation des sols et de laisser plus de place à la nature en ville… une circulaire à été envoyée aux préfets en leur demandant de veiller, dans les faits, au respect du principe de lutte contre l'artificialisation dans les dossiers d'exploitation commerciale…". Mais en politique les éléments de langage ne sont pas toujours ponctués d'effets immédiats.

Le 23 juin 2021 : PUB au PUP

Un convention tripartite pour se partager les frais - Capture d'écran
Un convention tripartite pour se partager les frais - Capture d'écran

En juin tout le monde s'accorde autour des qualités du PUP. La Communauté d’Agglomération (CdA) se réjouit d'un si bel accord, Saint-Xandre se félicite d'économiser sur la facture des travaux de voiries à réaliser, et la SAS Godet y gagne un échelonnement de sa quote-part étendu jusqu'en 2023. Ce règlement total de 106 334,50 €, payable en deux fois, est de plus assorti d'une exonération de la taxe d'aménagement intercommunal sur dix ans. Ce qui selon les calculs du vice-président Antoine Grau représenterait une enveloppe "d'environ 76 000 € non versés à la CdA". Au final, l'aménageur ne déboursera qu'environ 30 334 €. Les bons comptes font les bons PUP.

Le 19 juillet 2021 : re-Conseil municipal

Second passage à la caisse… - Capture d'écran
Second passage à la caisse… - Capture d'écran

Le PUP ne couvrirait-il pas toutes les dépenses à engager? La question peut se poser face à de cette demande de participation financière lancée au département. En effet la commune sollicite son aide afin de sécuriser le carrefour à l'intersection de la RD 202E3 et de la VC 4. Il est dit que cette voie communale dégradée doit être réhabilitée et réaménagée. Cela tombe à pic puisque c'est justement l'endroit où se trouve une aire de jeux pour enfants, et aussi, incidemment, l'endroit où des camions-citernes seront peut-être prochainement amenés à venir y jouer. Ces travaux sont chiffrés à hauteur de 39 000 € dont 50 % seront pris en charge par la commune.

Le 28 juillet 2021 : Préfectoral courriel

Les services de Mr Basselier, actuel préfet de Charente-Maritime, apportent quelques précisions sur le déroulement interne de la procédure : "Une enquête publique sera organisée courant septembre 2021 ( La durée et les dates ne sont pas encore fixées). Le préfet prendra prochainement un arrêté portant ouverture de l'enquête publique qui fera l'objet des publicités réglementaires…"

Rappelons que le dossier est ouvert depuis février 2020. Le cas du Conseil Départemental des Risques Sanitaires et Technologiques (CODERST) est également évoqué. Il s'agit d'une commission administrative à caractère consultatif pouvant être appelée à se prononcer sur les dangers ou des nuisances d'un projet. Le CODERST est compétent pour statuer sur la santé, la nature, la sécurité, la salubrité publique, l'agriculture, la protection de la nature, l'environnement, la conservation des sites et monuments…

Il semble bien que cette liste à la “pré-verre “ réponde au mieux à la poésie du projet Godet. D'où cette docte remarque préfectorale en guise de conclusion : "Par ailleurs, je vous précise qu'à l'issue de l'enquête publique, après examen du service instructeur, ce dossier pourra être présenté pour avis au Conseil Départemental des Risques Sanitaires et Technologiques ".

Le 5 Aout 2021 : on mène l'enquête

Et vous, qu'en pensez-vous de tout ça..? - Capture d'écran
Et vous, qu'en pensez-vous de tout ça..? - Capture d'écran

Une enquête publique est une procédure offrant, à tous et sans restrictions, le moyen de s'informer et de formuler des observations sur la nature d'un projet. À cette fin un registre est librement ouvert (en mairie et en ligne) afin de recueillir les différents avis. Un commissaire-enquêteur, désigné par le préfet en qualité de tiers indépendant, reçoit la charge de compiler ces ressources afin d'émettre un avis favorable, favorable avec préconisation, ou défavorable. L'opération s'est ici déroulé du vendredi 3 septembre au 24 septembre sous la houlette d'Elisabeth Balmas, ingénieure horticole, paysagiste conseil, et ex-conseillère municipale de La Flotte en Ré en retraite. Interrogée sur son rôle et sa fonction, elle nous informera de l'intérêt du public pour cette enquête : "Nous en sommes à 180 observations, c'est beaucoup, c'est vraiment beaucoup, et nous avons même prolongé l'enquête d'une semaine. Il y a un temps réglementaire d'un mois, mais pour un projet de cette nature c'est 15 jours, la préfecture a pensé qu'il y aurait beaucoup de réactions et qu'il fallait donner à tout le monde les moyens de s'exprimer". Ses conclusions devraient être déposées autour du 24 octobre. Au cours de notre entretien Mme Balmas nous confirmera par ailleurs de la prochaine saisine du CODERST, comme évoqué par les services de la préfecture.

Le 16 septembre 2021 : re-Conseil Communautaire

On prend les mêmes et on revote… - Reflets
On prend les mêmes et on revote… - Reflets

Ce jour, le vice-président de la communauté d'agglo, Antoine Grau, lance les débats (vidéo intégrale ici à partir de 3.53.50): "Un avis nous est demandé, c'est une demande d'autorisation environnementale d'exploitation… nous sommes actuellement dans le cadre dune enquête publique…". Le déroulement de cette procédure en cours ne modère en rien son évidente force de conviction : "Tout cela nous amène à pouvoir formuler, si vous le voulez bien, un avis favorable au projet". Manque de chance la réponse de la principale intéressée, la maire de Saint-Xandre, restera parfaitement inaudible faute à une malencontreuse panne irréparable de micro lors de sa prise de parole sur le sujet (à 4.00.35). Mais le ciel s'ombrage soudain sur le conseil lorsqu'une conseillère de la majorité s'élance dans un courageux plaidoyer en "presque défaveur" du projet (4.03.40): "Et puis, quand même, ce que j'aimerais dire, c'est qu'il n'y a pas de projet anodin, il n'y a jamais de projet anodin pour l'environnement, les conséquences environnementales, les conséquences écologistes, elles existent pour tous les projets… Je voudrais qu'on soit courageux, je voudrais qu'on puisse refuser un projet qui nous parait important, séduisant parce qu'il s'inscrit dans un développement économique qui nous tient à cœur, mais où ce projet résonne à court terme, je souhaite qu'on change de braquet, et que l'on pense à l'avenir…"

La foudre tombe avec la douloureuse intervention de Mr Soubeste, conseiller départemental EELV, qui rappelle que le projet a évolué et que le thème initial basé sur de l'oenotourisme vert s'est chargé de seules vertus industrielles (4.15.20) : "Vous allez me dire, il y a un projet économique… mais aujourd'hui ce projet économique je ne le visualise pas, je n'en ai pas lecture, fait-on seulement venir des camions avec du cognac, et on embouteille ce cognac pour ensuite le revendre ailleurs ? Ce n'est pas clair, ce n'est pas clairement dit. Nous sommes sur un projet qui n'est pas abouti, et aujourd'hui on nous demande de donner un avis sur un projet qui ne correspond pas, du tout, aux orientations d'aménagement de départ et aux enjeux nouveaux du territoire. Nous donnerons un avis défavorable à ce projet".

La nature et les oiseaux s'invitent également aux débats (4.08.50) par l'intermédiaire de Thierry Tougeron, conseiller de l'opposition sous étiquette du député Falorni: "La Ligue de protection des oiseaux s'inquiète des atteintes qui seront faites de plus ou moins près, de plus ou moins loin, aux zones qui entourent le projet…". Cette réflexion permettra au vice-président de se hasarder dans une prédiction d'avenir : "La LPO en accord avec Cognac Godet envisage de créer un refuge LPO sur le site !". Contactée à ce propos, la Ligue démentira formellement cette affirmation et nous précisera n'avoir eu aucune discussion en ce sens avec la famille Godet. Probablement un élan d'enthousiasme mal contrôlé…

Qui est pour, qui est contre: la force de la majorité l'emporte.  - Reflets
Qui est pour, qui est contre: la force de la majorité l'emporte. - Reflets
La séance s'achève cette fois encore sur un vote quasi unanime, à quelques abstentions près, et moins les deux votes contre du groupe vert. Le président-maire de La Rochelle clôture la discussion sur ces mots bien avisés : "Merci pour cette position très claire de notre collectivité".

Le 27 septembre 2021 : re-re-Conseil municipal

Le 1er adjoint, Mr Dlubak, avait des choses importantes à dire - Capture d'écran
Le 1er adjoint, Mr Dlubak, avait des choses importantes à dire - Capture d'écran

L'avis des élus est de nouveau réclamé à Saint-Xandre. Madame la maire, Evelyne Ferrand, considère alors que le projet ne créera pas de nuisances pour le voisinage et que le trafic routier restera modeste. Elle nous signalera en aparté : "Ce sera 4 camions par jour, et pas une vingtaine comme on l'a entendu, c'est Monsieur Grau qui l'a annoncé…". Pourtant, était précédemment prévu le passage d'une centaine de camions/an, soit 0.39 véhicule lourd par jour ouvré". Pas tout à fait pareil…

Madame Ferrand profite de ce conseil pour replacer le projet dans son contexte : "Il doit être ramené à sa juste dimension, son emprise au sol reste mesurée. Elle représente moins de 7 % d'un site de 6.5 hectares. Cette emprise peut-être également relativisée, l'urbanisation reste la première source d'artificialisation des sols dans le hameau, dont un récent lotissement de plus de 9000 m2 pris sur des terres agricoles et lancé en 2015 (NDLR : Entendre sous la précédente majorité)". Mais il s'agissait là d'un lotissement d'habitation et non d'un site industriel. Son premier adjoint, Mr Dublak, apporte sa pierre à l'édifice: "Le projet est une excellente opportunité, aujourd'hui les bateaux qui arrivent au port de la Pallice, via des autobus, partent sur Cognac. Demain certains, peut-être beaucoup, s'arrêteront à la Sauzaie, pour nous, cela nous fera des ressources financières pour la commune" [NDLR : des bateaux de croisière débarquent des cars entiers de touristes qui vont visiter les chais Hennessy]. Quatre camions par jour donc, et peut-être beaucoup de bus aussi.

Le 5 oct 2021: Conseil municipal à Dompierre-sur-Mer

Une grosse voix contre, mais un vote pour... - Reflets
Une grosse voix contre, mais un vote pour... - Reflets

Toutes les communes situées à moins de deux kilomètres de Saint-Xandre ont reçu ordre de rendre un avis au plus tard 15 jours après la clôture de l'enquête publique. Sainte-Soulle s'est déclarée favorable au projet, les élus de Villedoux s'y sont clairement opposés, revenait à la municipalité de Dompierre-sur-mer de débattre du sujet. Ce conseil là mériterait d'être conté par le menu mais il faudrait pour cela prendre le temps et les mots de commenter les 45 minutes d'échanges intenses qui s'y sont tenus. Denis Thibaudeau, le 2eme adjoint municipal en charge de l'équité et de la justice sociale, a tenu à exposer longuement sa vision des choses: "Il faut savoir que le conseil communautaire a déjà voté ça, il l'a déjà voté, J'allais dire c'est la première entorse préalable à l'expression démocratique, parce qu'un conseil communautaire qui ne tient pas compte de l'avis des principaux concernés, et qui s'exprime avant ceux-ci, avant Saint-Xandre, avant Sainte-Soulle, avant Villedoux, avant Dompierre, ça pose un petit problème. Alors c'est une vraie question de crédibilité pour nous, on vient nous demander de donner un avis qui ne pèsera pas dans la décision du préfet !"

S'ensuivit une description sévère de la plupart des procédures engagées: invisibilité du projet au sein du PLUi, déclassement d'une zone naturelle en site industriel, dispense de l'étude d'impact, fiabilité des études environnementales… La critique est totale et féroce. L'élu s'efforce de prévenir: "Pour que ce précédent n'en soit pas un, je propose que l'on donne un avis défavorable à ce projet, pour que demain on ne s'appuie pas sur -ce précédent- pour déclasser d'autres espaces naturels, car après tout, pourquoi eux et pas nous..?"

Le maire, Guillaume Krabal, s'obligera à davantage de retenue dans son argumentaire. Il n'hésitera cependant pas à lancer quelques pavés sur le chemins des camions-citernes Godet: "Ce projet est un projet Saint-Xandrais qui a été adopté de façon tout à fait légale, avec des études tout à fait légales… mais quand je lis les études, j'ai certains doutes, et certains questionnements, ce que je vous propose ce soir c'est de donner un avis favorable globalement, en émettant des doutes…". De cette frêle défiance jaillissent de solides recommandations: effectuer une analyse plus efficiente du trafic automobile, considérer le bruit et les vibrations induites par l'activité, interdire l'extension de la surface et de la capacité de stockage, interdire le changement de destination d'activité en cas de revente, instaurer des points d'étape et des concertations annuelles, entretenir une communication régulière ayant trait à l'incidence environnementale de l'activité…

Autant d'intéressantes obligations de nature à impacter la gestion effective et future du site de stockage. Le ton parait sincère mais le précédent verdict de Mr Thibaudeau en modère inévitablement l'incidence et la portée: "un avis qui ne pèsera pas...". Le vote aura donc raison des déclarations d'intention puisqu'au final une large majorité d'élus se déclarent favorable au projet. La contradiction s'affichera malgré tout avec deux abstentions et de sept voix contre.

Et hélas pour finir...

Le 9 aout 2021 : l'avis du GiEC

A quand la fin de tous les abus …? - Capture d'écran
A quand la fin de tous les abus …? - Capture d'écran

Les 38 experts du GIEC, le Groupe international sur l'évolution du climat, se sont réunis autour d'un verre d'eau. Leur dernier rapport est lourd de sens en ce qui concerne l'impact de l'industrialisation massive de la planète. Les membres des conseils municipaux d'ici ou d'ailleurs entendront-ils ce message ou vont-ils s'inquiéter de savoir s'il ne resterait pas une ou deux huîtres à déguster avec un bon verre de pineau… pendant qu'il en est encore temps.

Making-of

Contacté, Jean-François Fountaine, n'a pas répondu à notre demande.

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