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Dossier
par Rédaction

#Amesys : #LesDix qui font les 0,5%

Depuis un an, Reflets a pas mal disserté sur Amesys et ses différents marchés. L'installation d'un système d'écoute globale de la population en Libye, bien entendu, mais aussi au Maroc où Amesys a vendu une installation qui coûte, à l'achat par ServiWare, la filiale de Bull, quelque 2 millions de dollars. Tout ça pour chasser les pédophiles, comme l'a indiqué le directeur commercial d'Amesys lors d'une interview télévisée.

Depuis un an, Reflets a pas mal disserté sur Amesys et ses différents marchés. L'installation d'un système d'écoute globale de la population en Libye, bien entendu, mais aussi au Maroc où Amesys a vendu une installation qui coûte, à l'achat par ServiWare, la filiale de Bull, quelque 2 millions de dollars.

Tout ça pour chasser les pédophiles, comme l'a indiqué le directeur commercial d'Amesys lors d'une interview télévisée.

Repassons-nous cette vidéoet célébrons à nouveau son potentiel tragi-comique...

 

Dans son esprit, et dans celui de son entreprise, un système de ce genre ne sert pas, dans les mains d'un dictateur, à chasser les opposants. Non. Ça sert à pister les pédophiles.

Normal.

Nous pourrions vous abreuver d'informations sur les projets d'Amesys et de sa galaxie. Cette fois, nous allons plutôt faire un peu de philosophie.

Dans un récent communiqué, Bull a annoncé son intention de se séparer de son activité Eagle©. C'est à dire ce ce "logiciel" qui permet de mettre sur écoute l'ensemble d'un pays. Préventivement.

Au cas où les pédophiles se multiplieraient.

Pour mémoire, le Deep Packet Inspection peut peut-être servir à faire de la gestion de réseau (mais il y a d'autres manières moins intrusives) ou de l'écoute légale (quand elle est encadrée par des juges) ou encore, à surveiller les terroristes opposants pédophiles de tout un pays. Nous allons nous concentrer sur les cas où Amesys vend un système d'écoute globale, à l'échelle d'un pays, à un dictateur sanglant ou à un dirigeant d'un Etat policier.

 

Selon les chiffres parus ici ou là, cette activité concernerait "une dizaine de personnes au sein d'Amesys".

Philosophons, maintenant que le décor est posé.

Tentons de nous mettre dans la peau de ces dix personnes. Qu'est-ce qui peut bien servir de moteur aux dix pour développer ou vendre un tel produit là où même un enfant de dix ans comprendrait qu'il va servir à traquer des opposants ?

Interrogés sur Twitter, amis lecteurs, vous avez évoqué plusieurs sources de motivation.

Trop de la balle le challenge technologique

 

 

Premier point évident, pour un développeur travaillant pour Amesys, il y a le challenge technologique.

Il s'agit là de prendre un protocole, par exemple celui de Skype (c'est dur, peut-être même impossible, donc motivant)  et de faire en sorte que Eagle puisse écouter les conversations.

Fort bien. Mais lorsque l'on développe un tel "addon" pour un produit qui est vendu à des dictateurs, on ne peut pas ignorer que cela servira à stocker les conversations Skype des opposants.

On ne peut pas ignorer que ces conversations serviront à arrêter et torturer des gens.

Bien entendu, avant que l'AmesysGate ne soit dévoilé dans les colonnes du Wall Street Journal, d'Owni ou de Reflets, on peut imaginer qu'il existe au sein d'Amesys un cloisonnement visant à tenir chacun dans l'ignorance de l'utilisation finale et du lieu où sera implanté le logiciel.

D'une part, c'est assez méprisant à l'encontre des développeurs en question, qui ne sont probablement pas idiots. D'autre part, une fois que l'AmesysGate est public, on se demande ce qui continue de les motiver.

En outre, même dans le cas d'un cloisonnement complet, les commerciaux qui se déplaçaient avec Philippe Vannier en Libye, eux, savaient à qui serait vendu le logiciel.

Les brouzoufs

 

 

L'autre moteur évoqué par les lecteurs est l'argent. Ces développeurs et ces commerciaux pourraient refuser de voir les conséquences de leur travail parce qu'ils seraient grassement payés.

Pour certains, c'est peut-être le cas. Mais pour la majorité les salaires sont relativement bas. Parfois même très faibles.

A tel point que l'on peut se demander si Amesys ne prend pas un risque. A la place de Philippe Vannier, nous les augmenterions grassement. Chacun sait, dans le milieu du renseignement si cher au patron de Bull, qu'il est plus aisé de "corrompre" quelqu'un qui gagne peu que quelqu'un qui gagne beaucoup.

Si l'on en croit DaHubbleVisionPowa©, dans la liste des personnes qui se sont récemment déplacées à Rabat, pour le projet PopCorn, (Eagle au Maroc), les montants sont peu concluants comme outils pour faire oublier à quoi servira ce machin dans un Etat policier.

Bien entendu, il y a chez Amesys des salaires très élevés (vraiment très élevés). Mais les personnes concernées sont-elles affectées à cette activité ?

La seule personne dont l'éthique personnelle pourrait éventuellement être "modifiée" par un salaire important est celle dont le nom était affiché dans le centre d'écoute de Tripoli et dont le nom a été révélé par le Wall Street Journal.

Mais même s'il est très confortable, ce salaire est loin des plus élevés chez Amesys.

La vente d'armes numérique à des dictateurs : même histoire que la politique ?

Arrivés à ce point, Reflets ne trouve pas de réponse satisfaisante. Reste une possibilité que nous avons du mal à envisager. De la même manière que, par exemple, un sarkozyste fanatique ne peut pas comprendre, quels que soient les arguments et les faits qui lui sont présentés, que son candidat est un danger pour le pays, un salarié peut défendre son entreprise envers et contre tout.

 

 

Nous pourrions être face à des "croisés de l'entreprise", pour qui des arguments comme "si c'est pas nous, ce sont des américains qui le feront", sont recevables. Pour qui, "si le directeur commercial le dit, c'est que c'est vrai".

Putain de pédophiles, heureusement qu'il y a Eagle© quand même...

 

 

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