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Dossier
par Jacques Duplessy

A Gaza, « on voit la peur dans les yeux des enfants »

Les bombardements israéliens ont fait jusqu'à présent 144 morts et 1200 blessés.

Dans cette nouvelle guerre entre Israël et les Palestiniens, nul ne sait quel sera le dénouement. Islam Idhair, un Palestinien de la bande de Gaza qui a travaillé pour de nombreux médias, témoigne pour Reflets de la situation dans l'enclave palestinienne sous les bombes.

L'immeuble qui accueillait la presse à Gaza, bombardé par l'armée - © Islam Idhair

« C'est fou ce qui se passe ici en ce moment, raconte Islam Idhair. C'est la cinquième tour de Gaza qui a été détruite hier. J'étais près de cet immeuble qui abrite les bureaux de l'agence Associated Press et de la télé Al-JAzira. Le propriétaire a reçu un coup de téléphone de l'armée israélienne : vous avez une heure pour évacuer avant que nous le bombardions. Au bout d'une heure, il y a eu une première frappe de drone contre l'immeuble pour faire fuir les gens. Et puis 10 minutes après trois bombes ont touché le bâtiment. Il n'y a pas eu de morts, juste quelques blessés plus loin blessé par des éclats. »

Al Jazeera a publié sur son compte twitter une vidéo de ses journalistes récupérant du matériel juste avant le bombardement, après avoir été prévenus :

Islam Idhair qui a travaillé pour plusieurs médias comme « fixeur », une personne chargée dans le jargon journalistique de préparer les reportages et de traduire les conversations, dénonce une volonté d'Israël de menacer les médias. « Les Israéliens interdisent aux journalistes étrangers d'entrer dans la bande de Gaza. Ils cherchent à aveugler la vérité, à ce que les images ne sortent pas d'ici. »

L'immeuble des médias après le bombardement - © Islam Idhair
L'immeuble des médias après le bombardement - © Islam Idhair

Autre vue de l'immeuble après le bombardement - © Islam Idhair
Autre vue de l'immeuble après le bombardement - © Islam Idhair

Guerre de l'information sur Twitter
Guerre de l'information sur Twitter

Islam Idhair décrit la tension qui règne dans l'enclave : « Souvent les bombardements commencent après minuit. On dit chez nous : "Ça y est, la fête commence !" C'est fou, mais nous, on n'a plus peur. On a dépassé ce cap psychologique. Mais on voit la peur dans le regard des enfants. Souvent, la nuit, une personne de la famille veille pendant que les autres dorment pour les réveiller s'il y a un danger. Hier, 10 personnes d'une même famille ont été tuées dans le camp de réfugiés Al Shati, huit enfants et deux femmes. Seul un bébé a survécu. Ce bébé aura beaucoup de mère... Pourtant il n'y avait aucun combattant dans cette famille. »

Ces attaques aériennes poursuivent, selon lui, une véritable stratégie : « L'armée israélienne ne bombarde pas que des cibles militaires, elle bombarde pour faire pression sur le peuple pour qu'il fasse pression sur la Résistance pour arrêter le combat. Dans le nord de la bande de Gaza, les destructions de maisons ont été très importante. Beaucoup de familles ont été se réfugier dans les écoles gérées par l'Unrwa, la mission des Nations Unies pour la Palestine en espérant être en sécurité. Mais c'est une illusion : en 2014, Israël a déjà bombardé une de ces écoles. Les agriculteurs qui ont des champs près du territoire israélien n'ont pas le droit d'aller travailler. Il n'y a rien d'officiel, mais s'ils y vont, ils se vont tirer dessus. »

Le dernier bilan des bombardements dans la bande de Gaza fait état ce dimanche 16 mai de 144 morts dont 47 enfants, 29 femmes et 1200 blessés parmi les Palestiniens. Côté israélien, on dénombre 10 morts et plus de 500 blessés. « La situation dans les hôpitaux de Gaza est très tendue. Déjà, nous avons l'épidémie de Covid qui met le système de santé sous tension, et maintenant nous avons les blessés des bombardements. Heureusement l’Égypte a ouvert sa frontière et a annoncé qu'elle soignerait nos blessés. 1.200 soignants du Caire ont été envoyés dans les hôpitaux égyptiens près de la frontière pour renforcer leurs hôpitaux du nord du Sinaï. »

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