Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
par Yovan Menkevick

Ce que les fascismes et leurs avatars disent de nous et de notre époque

Nous avons tenté chez Reflets, de sonder les tentations fascistes d'une frange de plus en plus importante de la droite, ainsi que des courants nationalistes qui gravitent autour. Le terme néo-fascisme semble plutôt bien adapté à cette frange politique : nous sommes au XXIème siècle, et après tout, tout peut se moderniser, même les idées les plus puantes.

Nous avons tenté chez Reflets, de sonder les tentations fascistes d'une frange de plus en plus importante de la droite, ainsi que des courants nationalistes qui gravitent autour. Le terme néo-fascisme semble plutôt bien adapté à cette frange politique : nous sommes au XXIème siècle, et après tout, tout peut se moderniser, même les idées les plus puantes. Après le décès tragique d'un jeune homme militant de gauche (visiblement anti-fa) par des jeune nationalistes révolutionnaires, petit tour de la France très à droite…pour bien saisir où nous sommes arrivés, et de ce que pas mal de monde ne veut ni voir ni vraiment entendre.

 Il n'y a pas d'extrêmes…il y a des systèmes politiques (et des gens qui les activent)

Au centre de a préoccupation de ce qui est appelée extrême droite, il y a la nation. Mais avec cette nation, il y a l'autorité. De l'Etat, entre autres. Et puis la souveraineté. De la nation, mais du peuple aussi, bien entendu. Le bon peuple, cette espèce d'entité indéfinie et mouvante qui constitue le prétexte idéal pour commettre à peu près tout et n'importe quoi en son nom. Pratique, n'est-ce pas ?

Alors, rentrons dans le vif du sujet qui semble troubler une part importante des lecteurs-commentateurs de Reflets et peut-être bien au delà : quel est le problème causé par le décès du jeune Clément, qui s'est fait défoncer le crâne par une brute épaisse déguisée en néo-nazillon ? Celui que des groupe ultra-nationalistes se revendiquant des idées de Mussolini ou d'Hitler, adorateurs du Maréchal, existent et agissent ? Comme l'explique très bien Kitetoa, il serait quand même bien naïf de penser que ces groupes, qui ont pignon sur rue, sont une découverte pour les politiques de tous bords. Non, ce qui est problématique c'est la situation morale, idéologique, sociale du pays des 475 fromages, la France. Ce petit pays qui a au moins un membre dans chaque famille qui était résistant durant la seconde guerre mondiale, alors que les résistants étaient moins d'un 1% de la population. Si on écoute les Français, ils étaient au moins 80% à résister. La réalité historique est un peu moins reluisante.

Cette situation est donc la suivante (dans les grandes largeurs) : une population excédée par sa classe politique, population qui n'arrive plus, dans sa grande majorité, à joindre les deux bouts, même quand elle gagne correctement sa vie. Un pays qui a changé à une telle vitesse dans la dernière décennie, par la course folle vers la modernisation néo-libérale mondialisée, que ceux qui l'habitent ne retrouvent plus leurs repères. Des écrans de télévision, récepteurs de radio et site d'information qui diffusent en permanence des faits divers inquiétants et des nouvelles de chute imminente du pays vers des abîmes de malheur collectif. Le tout désormais appuyé par une certitude bien diffusé du déclin, mais aussi par la prise de conscience qu'une oligarchie s'est mise en place, oligarchie qui saigne la majorité des habitants pour financer son propre système et son propre monde : l'olympe oligarchique, cette deuxième planète uniquement fréquentée par une minuscule élite ultra-riche et apatride. Vous secouez tout ça, vous attendez un peu, vous laissez des énarques mentir impunément et gagner des élections en reniant leurs promesses, et vous avez du Marine Le Pen à 18% aux présidentielles de 2012, de la manif pour tous et du printemps français contre le mariage homo en 2013, mais de façon plus claire : plein de gens pour la défense d'une "France éternelle, bien carrée et surtout de souche". Tout ça accompagné par ceux qui servent de service d'ordre au FN depuis des décennies, et qui se sont déclarés depuis une dizaine d'années en association ou groupes informels et jubilent de voir leurs idées ainsi propulsées sur le devant de la scène.

 Troisième voie,  jeunesses révolutionnaires nationalistes, etc…

Pas la peine de leur faire de la pub gratuite. Et justement, au delà de ces groupes, qui parfois manifestent leurs idées dans la rue, comme récemment en mai à Paris, un constat doit être fait : ceux que l'on appelle d'extrême droite sont aujourd'hui bien plus difficiles à cerner qu'avec ce seul terme légèrement dépassé. Comme pour le FN, des idées altermondialistes essaiment leurs discours : contre l'ordre libéral par exemple, la finance, la mondialisation. Ces militants sont racistes et pensent que l'immigration est l'un des grands problèmes de la France. Mais pas simplement, loin de là. Ils parlent de souveraineté nationale, beaucoup. De démocratie aussi, énormément. De la souveraineté du peuple. Ce qui est gênant, parce que chacun aimerait bien les mettre dans une case simpliste de gros fachos qui veulent instaurer une dictature. Alors que ce n'est pas le discours entretenu. Mais que veulent-ils ? Oh, si peu… Pas beaucoup plus que la Droite forte de ce cher Peltier, en fait, motion qui remporté la palme du vote de nos amis de l'UMP.

Parce que la différence entre les crânes rasés-rangers et le jeune et beau Peltier, tient surtout à ce que les premiers sont mal habillés et sentent la sueur. Alors que le le deuxième sent la violette et porte des chemises élégante et bien repasséess. Mais au fond, ils sont tous fiers d'être Français, de leurs origines, de leur grand pays, et veulent mater à la fois les affreux gauchistes, les arabes, les noirs et les enseignants. Bref : si ils gagnent les prochaines élections, ce sera Sarkozy 2 le retour, il revient et il est très fâché.

Oui, mais le rapport avec l'époque et le néo-fascisme ?

L'histoire du fascisme a été résumée et (un peu) analysée dans un article récent sur Reflets, parce que le fascisme est mal connu et souvent caricaturé. Ce courant politique a réussi à se mettre en place démocratiquement : ses parlementaires ont été élus, leurs chefs ont donc conquis le pouvoir "normalement". Le néo-fascisme est donc prêt à se mettre en place : Nicolas Sarkozy a commencé à le tricoter durant son premier mandat. Il reste maintenant à le formaliser et lui faire gagner des élections pour ceux qui pensent qu'il sera LA Solution à tous nos problèmes. Restauration de l'autorité. D'une justice forte qui punit très fort les délinquants, d'un Etat fort, fier et protecteur. De la sécurité, même au détriment des libertés, (puisque d'après cette théorie, la première des libertés, c'est la sécurité). D'une gestion dure et sans faiblesse des immigrés et des fraudeurs (sociaux et d'origine africaine surtout). L'exaltation du patriotisme et des origines chrétiennes du pays, le contrôle et le maintien sous surveillance de la religion musulmane par des lois laïques interdisant à tous ses pratiquants d'exprimer leur attachement à cette religion dans les espaces autres que personnels.

Bien entendu, tout un chacun, du Front national à la droite forte et autres partis nationalistes, vont s'empresser de condamner les "groupes fascistes" dont celui qui a tué le jeune étudiant de Sciences-Po. Sauf que le danger n'est pas celui de ces groupes, qui de toutes les manières continueront leurs minables parades et provocations politiques. Non, le danger est celui des néo-fascistes estampillés républicains. Que l'ambiance générale pousse à l'arrogance. Et qui donne des ailes aux nazillons. Mais ceux qui gagneront le droit de faire la loi, au final, seront les néo-fascistes. Et si en 2017, si ils gagnent les élections, ils soumettront le pays à un talon de fer. Et là, ce sera autre chose. Vraiment autre chose…

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