Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
par Antoine Champagne - kitetoa

Allo Amesys, Bull, Alten, le gouvernement français ? Savez-vous ce que vous avez fait au Maroc ?

A l'heure où le site d'informations Lakome est censuré au Maroc, sans doute sur ordre du pouvoir en place, la question de l'installation d'un Eagle pour surveiller toute la population marocaine nous revient à l'esprit. Un outil de ce type, au Maroc, est un outil rêvé pour filtrer l'information à laquelle les dirigeants laisseront les marocains accéder. Dans les mains d'un pouvoir zélé, un Eagle est une véritable arme d'asservissement.

A l'heure où le site d'informations Lakome est censuré au Maroc, sans doute sur ordre du pouvoir en place, la question de l'installation d'un Eagle pour surveiller toute la population marocaine nous revient à l'esprit.

Un outil de ce type, au Maroc, est un outil rêvé pour filtrer l'information à laquelle les dirigeants laisseront les marocains accéder. Dans les mains d'un pouvoir zélé, un Eagle est une véritable arme d'asservissement. Cet outil, vendu avec la bénédiction des autorités françaises comme du matériel grand public est aujourd'hui actif sur le territoire marocain.

Si aucun élément ne nous permet pour le moment d'affirmer qu'il est bien utilisé pour censurer les sites arabophones et francophones de Lakome, il faut conserver à l'esprit qu'il est potentiellement en mesure de traquer et d'identifier tout marocain souhaitant accéder à ces sites. Il représente donc un risque potentiel important pour des personnes désireuses de s'informer, qui pourront alors être taxées arbitrairement, comme Ali Anouzla, le dirigeant de Lakome (privé de liberté depuis le 17 septembre 2013), de faire l’apologie du terrorisme.

Peut-on raisonnablement accepter l'idée que les dirigeants d'un pays mettent en place un outil leur permettant d'avoir accès à tous les échanges (mails, chats, consultations Web, téléphonie IP, etc.) de ses citoyens ? Est-ce éthiquement acceptable ?

Bull et Amesys ont installé un tel outil au Maroc, plus précisément à Rabat. Nom de code : Pop Corn.

Cette installation est sans doute désormais prise en mains par AMESys, (Advanced Middle East Systems), dirigée par Stéphane Salies, lui-même actionnaire de Crescendo, la holding qui détient Bull et Amesys. Les opérations sur place sont toujours, sans doute, sous contrôle de Renaud Roques, responsable des développeurs d'Eagle.

Lors de la mise en place de Pop Corn, la SSII Alten a activement participé avec une ribambelle de jours/hommes achetés par Amesys.

Nombreux sont ceux qui réclament une réglementation plus contraignante pour encadrer la vente de ces produits. Y compris des dirigeants de sociétés actives dans ce secteur comme Thibault Bechetoille (Qosmos), un moyen de faire du whitewhashing à peu de frais.

La question n'est peut-être pas là. Il s'agit simplement d'un problème d'éthique. Celle-ci n'est ni de droite, ni de gauche, ni capitaliste, ni libérale, ni communiste, ni religieuse. Elle touche au bon sens. Doit-on produire de tels outils massifs ? Avec une visée claire qui est de surveiller et d'identifier les utilisateurs d'Internet ?

Comment peut-on mettre ce type d'outils sur le marché ? Comment peut-on vendre ce type d'outils à des Etats policiers, des dictatures ? Un petit plus pour la balance commerciale peut-il effacer les ennuis terribles qui vont s'abattre sur les opposants politiques et les militants des Droits de l'Homme dans ces pays ?

A toutes ces questions, ni le cabinet de Jean-Marc Ayrault, ni Bull, ni Alten, interrogés ce matin par email, n'ont souhaité répondre. Plus précisément, nous avons demandé au service de presse du premier  ministre de fournir l'autorisation ministérielle nécessaire pour la vente d'un Eagle au Maroc. Silence sur toute la ligne.

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