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par Antoine Champagne - kitetoa

Printemps arabe, deux poids, deux mesures

Il y a révolution et révolution. Il y a la révolution tunisienne, pour laquelle Nicolas Sarkozy proposait, via Michèle Alliot-Marie de fournir au dictateur le savoir faire en matière de lutte anti-émeutes. Il y a la révolution égyptienne. A ce stade, Nicolas Sarkozy n'avait toujours pas, en dépit de ses six cerveaux très bien irrigués, compris ce qui se passait. François Fillon, voyageait pour sa part aux frais d'Osni Moubarak, comme Michèle Alliot-Marie l'avait fait aux frais de Zine Ben Ali.

Il y a révolution et révolution. Il y a la révolution tunisienne, pour laquelle Nicolas Sarkozy proposait, via Michèle Alliot-Marie de fournir au dictateur le savoir faire en matière de lutte anti-émeutes. Il y a la révolution égyptienne. A ce stade, Nicolas Sarkozy n'avait toujours pas, en dépit de ses six cerveaux très bien irrigués, compris ce qui se passait. François Fillon, voyageait pour sa part aux frais d'Osni Moubarak, comme Michèle Alliot-Marie l'avait fait aux frais de Zine Ben Ali. Puis il y a eu la révolution Libyenne. Là, le président sauveur du monde a compris que s'il continuait à évoluer à contre courant de la juste aspiration des peuples pour plus de liberté, il risquait d'avoir des soucis d'image. Les Français aiment bien les révolutions libératrices et on est en pleine année de présidentielle... Et puis il y a les révolutions oubliées. Oubliées de la communauté internationale, des peuples du reste du monde.

Avec la Libye, Nicolas Sarkozy a tourné casaque. Jusqu'ici, il avait de très bons rapports avec Mouammar Kadhafi. Il avait obtenu la libération des infirmières bulgares, un point de communication très important dans sa stratégie. Il avait invité le colonel à Paris et l'avait reçu en grandes pompes pour essayer de lui vendre une centrale nucléaire, des Rafales, et toutes sortes de babioles amusantes qui tuent des gens. Il avait par la suite autorisé et fait superviser par les services secrets français l'installation d'une énorme centre de surveillance électronique via la filiale de bull Amesys. Le QG de Tripoli regorgeait de documents siglés Amesys, de FAQs sur les murs pour arriver à faire marcher le GLINT...

La Lybie est un pays riche. Notamment en pétrole. On peut comprendre l'intérêt d'une "libération" et anticiper des retombées commerciales. Mais pour ce faire, il faut embarquer avec soi la communauté internationale. C'est la caution pour éviter que les mauvais coucheurs mentionnent ces aspects commerciaux. Kolwezi est un mauvais souvenir... Il faut aussi une excuse "humanitaire". Ce qui est simple puisque Kadhafi, contrairement à ce que voulait laisser entendre la communauté internationale, n'a jamais cessé d'être un dictateur sanguinaire particulièrement instable psychologiquement. La répression est donc sanglante. On ne se refait pas.

Mais le point très positif pour une telle opération de "libération" est que la Libye ne dispose pas d'appuis "extérieurs" importants et que ses capacités de nuisance sont faibles. Son armée n'est pas particulièrement puissante (nous avons fourni des avions que nous pouvons donc battre facilement) et elle ne dispose plus de relais "terroristes" trop dangereux qu'elle pourrait activer en représailles.

 

Tu l'as vu le grand frère de Bahreïn ?

 

On ne peut pas dire la même chose de Bahreïn où pourtant, la répression a été particulièrement sanglante et délirante.

 

Le petit royaume a fait extraire des hôpitaux des blessés pour les achever, les équipes médicales ont été prises à partie. Même la place symbolisant la révolte a été rasée... C'est dire si le royaume a décidé de faire le vide.

 

 

Si Bahreïn peut continuer à trucider en paix et avec une violence inouïe, c'est qu'il a un grand frère assez balaise. Or comme chacun sait, le courage politique de Nicolas Sarkozy est proportionnel à sa taille. Beaucoup de moulinets, pas mal d'invectives et de coups de menton, mais peu d'actes.

Lorsque la contestation commençait à prendre corps dans le royaume, Bahreïn a appelé à la rescousse l'Arabie Saoudite. Celle-ci a prêté ses chars et ça a un peu calmé tout le monde. Les contestataires, mais aussi la communauté internationale. Qui voudrait se mettre à dos le premier exportateur mondial de pétrole ? Un pays qui est par ailleurs, comme chacun le sait, un véritable exemple flamboyant de démocratie.

Tant pis pour les habitants du royaume. Ils sont seuls face à une répression tout aussi horrible que celle du colonel Kadhafi, mais là, personne ne viendra à leur secours. Le peuple peut attendre.

 

Et celui de la Syrie, tu l'as vu ? Il est gonflé aux stéroïdes...

 

Dans l’échelle ouverte de la répression sanglante de Tyranus Maladus, il y a, bien sûr, aussi la Syrie. Des morts, encore des morts. Des torturés, encore des torturés... Et qui s'en émeut ? Ah, si, le malin Alain Juppé qui a dit cette semaine (mieux vaut tard que jamais, n'est-ce pas) que ce qui se passait en Syrie était inacceptable. Dommage, parce que entre Bachar el-Assad et Nicolas Sarkozy, c'était aussi le grand amour il n'y a pas si longtemps. Le dictateur était invité d'honneur pour le défilé du 14 juillet en 2008, etc. France 24 signait début septembre un accord financier pour raconter des salades sur ce gentil pays, nous apprend le Canard Enchaîné...

Reflets est bien placé pour le savoir, la répression en Syrie est extrêmement violente. #OpSyria a permis de créer un canal de communication avec des Syriens qui nous parlent sur l'IRC de ce qui se passe chez eux. Ce n'est pas très rassurant.

Mais pour la Syrie, comme pour Bahreïn, il  faut compter avec le grand frère... Et les petits cousins...

D'une part, la Syrie est excessivement proche de l'Iran, d'autre part, elle a encore un certain poids sur le Hezbollah et le Djihad Islamique. Du coup, tout le monde se pose plein de question avant d'envoyer des troupes ou des avions. Et si l'Iran le prenait mal ? Avec son président un peu dingue, on ne sait jamais ce qui pourrait se passer. Et si Bachar el-Assad décidait de demander à ses copains du Hezbollah ou du Djihad Islamique de reprendre du service contre le méchant occident envahisseur ? Ça fout la trouille. Même si Hassan Nasrallah et l'Iran commencent à prendre leurs distances avec le dictateur syrien, sous la pression de l'opinion arabe. En revanche, même si l'on peut saluer ce petit mouvement de retrait, personne ne semble encore prêt à prendre le pari de ce qu'ils feraient si la Syrie était attaquée...

Le peuple syrien attendra.

 

Le Yémen : silence au nom de la lutte anti-terroriste

 

Le Yémen est un cas particulier. Ce pays est extrêmement complexe. Une société tribale semblable à la société libyenne, mais aussi un pays divisé en bloc religieux à l'irakienne : chiites et sunnites. Un pays qui héberge depuis longtemps une rébellion zaïdistes dans le nord ... Et un pays qui héberge un succursale de Al-Qaïda : AQPA ( Al Qaïda dans la péninsule arabique ).  Et si le président Ali Abdullah Saleh a pu réprimer dans le sang et en toute tranquillité sa population, c'est qu'il lutte contre AQPA sur son sol avec l'aide des puissances occidentales. Celles-ci ont donc tout intérêt à ce que la situation perdure. On sait ce que l'on perd, pas ce que l'on gagne, dit-on.

Rappelons nous ... Le 3 juin 2011, alors que la situation de la révolution yéménite semble bloquée à cause de l'intransigeance de Saleh, un attentat vise la mosquée où celui-ci vient prier. Le président yemenite est grièvement blessé et se réfugie en Arabie saoudite pour se faire soigner. Il va déléguer le pouvoir à son premier ministre. Celui-ci va faire le choix de re-entamer le dialogue avec l'opposition. Les évènements semblent se calmer ... mais pour combien de temps.

Cette situation aura duré 3 mois et demi approximativement. Malgré la médiation entamée par l'ONU la répression reprend de l'ampleur en début de semaine. 57 morts depuis le début de la semaine. Encore 2 femmes tuées par des snipers ce matin.

Le peuple yéménite attend toujours ...

 

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