Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
par Antoine Champagne - kitetoa

OpStayinAlive, S01E01 : Kitetoa, tu vas bientôt disparaître

Aujourd'hui est un jour de deuil pour tous les vieux croutons. Robin Gibb, la voix des Bee Gees s'est éteint. L'un des titres essentiels, de ceux qui marquent l'histoire d'un art à jamais tellement c'est kitsch, est Stayin' Alive. En mémoire de feu Robin Gibb, nous baptisons cette petite série d'articles "OpStayinAlive". Vous allez comprendre pourquoi. Le dimanche 26 octobre 1997, je me promène dans le VIIIème arrondissement de Paris.

Aujourd'hui est un jour de deuil pour tous les vieux croutons. Robin Gibb, la voix des Bee Gees s'est éteint. L'un des titres essentiels, de ceux qui marquent l'histoire d'un art à jamais tellement c'est kitsch, est Stayin' Alive. En mémoire de feu Robin Gibb, nous baptisons cette petite série d'articles "OpStayinAlive". Vous allez comprendre pourquoi.

Le dimanche 26 octobre 1997, je me promène dans le VIIIème arrondissement de Paris. Cela fait plusieurs années que j'erre sur les réseaux informatiques. Des Bulletin Board Systèmes, puis Internet, puis le Web. Ce jour là, donc, je croise un SDF qui a construit sa propre "maison" autour de la devanture d'une agence Foncia. Je fais une photo, je rentre chez moi et je publie ça sur une page Web unique, hébergée chez Mygale :

Le site est né, ce sera "Kitetoa", à l'adresse http://www.mygale.org/~kitetoa

Peu à peu, le site s'étoffe de nouveaux articles. D'autres auteurs viennent compléter mes propres publications. Tout le monde publie avec le même pseudonyme : Kitetoa.

Le temps passe, Mygale se meurt, Internet et le Web changent. Kitetoa devient Kitetoa.com, s'héberge ailleurs, paye pour obtenir de l'espace disque, de la bande passante, des emails@kitetoa.com. Puis l'hébergeur est racheté par France Telecom. A l'époque (et ça n'a pas beaucoup changé), FT fait tout pour freiner le développement d'Internet (le vrai, pas Internet by Orange) et je ne veux pas être hébergé par "l'opérateur historique". Je déménage donc tout mon bardas dans une nouvelle maison d'où je ne bougerai plus. En Suisse, chez un merveilleux hébergeur que je vous recommande chaudement : Infomaniak.ch.

J'y ai construit, avec son aide, ma maison sur Internet.

Ce n'est pas rien ma maison sur Internet. C'est un foutoir improbable, une auberge espagnole remplie de milliers (sans doute) d'articles qui sont une sorte de chronique des débuts d'Internet en France, des ratés des grosses sociétés qui l'ont investi (mal), de la vie politique, artistique de 1997 à 2011, date de naissance de Reflets.info.

Ce "repository", c'est un peu ma base arrière, celle avec laquelle j'ai vécu pas mal d'aventure pas toujours drôles, parfois épiques, bref, gagné des batailles improbables, milité pour la prise de parole responsable. On peut dire des choses qui dérangent, dures, critiquer violemment, mais on assume. Peu importe le pseudonymat, en cas de procès, c'est le Webmaster qui viendra s'expliquer. Et c'est ce qui s'est passé avec Tati.

 

 

Kitetoa.com, c'est aussi mon serveur de mails. L'adresse kitetoa@kitetoa.com est affichée sur chaque page de mon serveur et chacun peut m'écrire. Je lis tous mes mails dans un délai très raisonnable, et j'y réponds.

Un vieux truc de dinosaures me tient à coeur, la Netiquette.

Ce qui m'a fasciné avec Internet, au tout début, vers 1995/1996, c'est que l'on pouvait parler sans aucune barrière à des gens auxquels  on n'aurait jamais eu accès auparavant, sans une tripotée de barrages. Toutes ces personnes répondaient, prenaient du temps. Vous offraient leur savoir, sans contrepartie. Depuis, j'ai toujours répondu à tous ceux qui me posaient des questions. Et j'ai publié tout ce que je pouvais sur Internet dans un but de partage non marchand. Ce que j'ai appris, je le rend public, je le partage. Internet, ce n'est pas, à mon sens, un endroit où l'on puiserait des choses sans contrepartie. On peut puiser un peu, mais il faut aussi contribuer. Et pas en postant des choses sur des serveurs incontrôlés qui risquent de disparaître, avec votre contenu (Facebook, si tu nous lis...).

Bref, si demain on m'annonçait que Kiteoa.com ne m'appartient plus, je serais très, mais vraiment, très énervé. Cela voudrait dire, pour faire une comparaison, qu'un malotru s'est introduit dans mon domicile, a changé les serrures, m'en a interdit l'accès, qu'il récupère ma boite aux lettres, etc. Dans ce cas improbable, des milliers d'articles montrant la connerie de centaines d'entreprises, des interviews de hackers mythiques, des commentaire sur les sombres années Bush (pour ne parler que de ça) s'évaporeraient (temporairement).

Du coup quand des petits malins tentent de faire en sorte que je perde la propriété de Kitetoa.com, une baraque marrante et amicale que j'ai mis près de 18 ans à construire, ça me met en rogne.

Vraiment.

Le dernier qui m'a vu en rogne s'en souvient et s'en souviendra longtemps.

Le 14 mai, j'ai reçu ce mail de la part de Gandi, le registrar qui gère mes noms de domaines :

 

Bonjour,

Une réclamation vient d'être déposée à votre encontre

via le formulaire de contact du département Abuse de

la société Gandi.net dont vous êtes client.



Vous trouverez ci dessous le texte de la plainte

en question dont nous vous demandons de bien

vouloir prendre connaissance.



Nous vous prions de bien vouloir nous indiquer

par retour de courriel la réponse que vous comptez y apporter.



 - Nom de domaine concerné : kitetoa.com



Gandi Abuse département.



N'hésitez pas à contacter notre service client

en cas de problème ou pour toute

autre question :

http://www.gandi.net/faq/contact_support



Nous vous remercions de votre confiance.



Cordialement.



--



GANDI - http://www.gandi.net

 

Premier souci, le texte de la "plainte" me concernant n'est pas joint au mail. La plainte n'est pas non plus détaillée dans le mail.

Je ne sais donc pas ce que l'on me reproche. Sauf à en juger par le titre du mail : "Whois incorrect".

On est en revanche dans la rubrique "Abuse". Cela sous-entend que j'ai fait quelque chose de grave et que quelqu'un en a parlé à Gandi en lui laissant penser, par exemple, que je ne respecte pas les règles liées aux informations déclinées dans la base de données Whois, celle où figurent les informations personnelles des détenteurs de noms de domaines.

Cela peut mal finir : la propriété de mes noms de domaines (tous) peut être remise en cause. Bien entendu, ce serait un processus un peu long et l'issue serait assez évidente, j'en reprendrais possession, mais ce serait compliqué, cela impliquerait probablement un procès coûteux. En bref, une tonne d'emmerdes.

Mais qui peut bien avoir fait une chose pareille ?

D'autant que les données permettant de me contacter qui figurent dans la base Whois, sont correctes. L'adresse de courrier classique est opérationnelle et j'y reçois tout le courrier lié à mes sites Internet. Les adresses mail sont actives et je réponds aux mails que j'y reçois. La preuve, j'ai immédiatement répondu à Gandi.

A ce stade, il me fallait trouver une solution pour que mes sites restent en vie (Stayin Alive, haaa, haaa, haaa, haaa..). Et vite. Gandi m'a prévenu, j'ai quinze jours pour me "mettre en conformité".

Dans l'épisode 2 de la saison 1 de #OpStayinAlive, vous découvrirez qui a envoyé sa petite "lettre anonyme" à Gandi...

 

0 Commentaires
Une info, un document ? Contactez-nous de façon sécurisée