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par Rédaction

Operation Safekids : oui... mais en fait non

Comme annoncé précédemment, nous avons discuté en interne pour savoir quoi faire du papier relatant l'opération de lutte contre les comptes de supposés "pédocriminels" sur Facebook, lancée par des supposés Anonymous. Nous avons convenu qu'il était nécessaire d'apporter à cet article un certain nombre d'informations et de questions (parfois sans réponses) permettant au lecteur de mieux mesurer les implications de cette opération. C'est ce que nous allons tenter de faire ici.

Comme annoncé précédemment, nous avons discuté en interne pour savoir quoi faire du papier relatant l'opération de lutte contre les comptes de supposés "pédocriminels" sur Facebook, lancée par des supposés Anonymous. Nous avons convenu qu'il était nécessaire d'apporter à cet article un certain nombre d'informations et de questions (parfois sans réponses) permettant au lecteur de mieux mesurer les implications de cette opération. C'est ce que nous allons tenter de faire ici. Bien entendu, rien n'est jamais blanc ou noir, tout est gris. Y compris la Démocratie. Pour autant, il est toujours dangereux de demander à Paulo et ses copains du Bar des Amis de prendre la place de la Justice ou de la Police. Juge, c'est un métier. Et un métier très complexe. Cela ne s'improvise pas. Pas plus que l'on ne peut se déclarer cyber-policier du jour au lendemain. En outre, les fausses pistes possibles sur le réseau sont légion...

C'est avant tout dans le monde réel que la lutte contre la pedocriminalité doit être menée. Internet est un outil puissant pour révéler des téléchargeurs ou des fournisseurs de contenus pédocriminels. Mais la suite se passe dans le monde réel.

Cela peut sembler paradoxal à certains, mais pour travailler efficacement, les forces de police et la justice ont besoin de travailler en silence. La médiatisation est souvent leur pire ennemi. Alerter, par une telle opération publique, les fournisseurs de contenus risque de couper un lien qui est nécessaire pour leur traque dans le monde "réel". Et c'est dans le monde réel que les pédocriminels sont interpellés. Quelques membres de l'équipe de reflets ont travaillé aux côtés de MOGIS, une association, d'origine allemande, de victimes d'abus de la part de pédocriminels. MOGIS, avait pris fermement position contre le filtrage, expliquant que le blocage et le filtrage de sites ne servaient à rien et équivalaient à fermer les yeux. Seule une action sur le terrain, débouchant sur le retrait effectif des contenus et l'interpellation des pedocriminels est efficace et évitera à d'autres enfants d'être des victimes.

Allons plus loin. Cette action DOIT être condamnée. Au mieux, elle parasite les travaux des forces de police, au pire, cette action permettra à certains pédocriminels d'aller faire d'autres victimes sur Facebook ou ailleurs.

On peut, avec des talents informatiques particuliers, récolter des données qui seront exploitées par les groupes de policiers qui luttent contre la pédocriminalité. De nombreuses opérations qui ont fait la "Une" de la presse une fois rendues publiques parce que "bouclées", ont bénéficié d'apports extérieurs. Certes, des "preuves" récoltées "illégalement" ne peuvent être produites (ou difficilement) devant un tribunal, mais elles permettent parfois de faire un bond dans l'enquête.

Ceci dit, cette opération est peut-être aussi un concours de circonstances. En trouvant par hasard un premier compte de ce genre, des anonymes ont peut-être commencé à remonter une piste et levé d'autres lièvres. D'où le réflexe consistant à prévenir Facebook.

L'entreprise américaine, s'il se confirme qu'elle a fermé ces comptes dans la précipitation, a agi de manière stupide et les policiers chargés de la lutte anti pédocriminalité vont se mordre les doigts. Facebook a un rôle, comme tout fournisseur de service en ligne, de prévention, de modération et de collaboration avec les autorités sur des sujets aussi sensibles, pour lesquels le signalement aux autorités devrait être la norme.

En même temps, cette opération aura eu le mérite de rendre publique la problématique des réseaux sociaux comme moyen de diffusion de contenus pédocriminels.

Ensuite, on peut comprendre qu'une telle opération draine des cyber-justiciers de toutes sortes. Des mères de familles, peut-être, mais aussi des gamins trop heureux de pouvoir "faire le bien" sans trop de difficultés. D'où, sans doute, les fuites vers la presse d'images terribles. On appate facilement le journaliste avec ce genre de choses. Mais l'effet est désastreux. Les images sont publiées, floutées peut-être (ou pas) et ce sont des douleurs indicibles pour les parents, et parfois, pour les victimes elles-mêmes.

Reste enfin à savoir si dans toute cette opération, il n'y a pas une part de manipulation. Elle pourrait viser une destabilisation de Facebook, une destabilisation d'Anonymous, générer une demande ou une acceptation de lois sécuritaires... Impossible à dire à ce stade. Quant aux "Anonymous", ils sont par nature anonymes. Rien ne dit que cette opération reflète la position de l'ensemble du groupe... bien au contraire, à en croire nos sources.

La seule opération d'Anonymous concernant Facebook est un appel à supprimer les comtpes sur ce réseau. Dès lors, il nous apparait erroné d'attribuer à Anonymous l'opération Safekids qui semble plus être le fait d'une minorité du groupe, un courant libre, qui en outre, utilise les outils que l'ensemble du groupe appelle à boycotter. Facebook est un réseau où les Anonymous ne s'aventureront pas pour des questions plus qu'évidentes d'anonymat et de respect de la vie privée.

Anonymous défend certaines valeurs, sinon nous verrions proliférer des images pornoinfantiles sur des skyblogs et des pages Facebook au nom d'anonymous et au nom de la liberté d'expression... une porte ouverte au n'importe quoi, comme anonymous sur Facebook.

Le sujet de la pédocriminalité a, semble t-il, été abordé à de très nombreuses reprises au sein d'Anonymous. Nos sources nous indiquent que ce genre d'actions ne seraient pas du ressort du groupe. La personne ayant lancé cette opération l'aurait donc fait contre l'avis des autres.

Anonymous c'est tout le monde mais pas n'importe quoi. Anonymous est tout le monde, Anonymous est personne, Anonymous n'est pas un club de bridge, Anonymous a cependant des outils permettant un certain consensus sur les opérations à mener. Anonymous suit tout de même une ligne directrice et l'opération Safekids n'en faisait manifestement pas partie.

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