Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
par Yovan Menkevick

Message au PS sur la neutralité du net et l'exception culturelle

(le Parti Socialiste français,  cette "fédération de clubs de groupies ©" comme le résumait si bien un lecteur de Reflets ©, travaille sur le numérique. Ils ont même une ministre de la chose. Comme l'UMP. C'est bien. C'est grand. C'est beau. Mais peut-on véritablement espérer quelque chose de différent de l'ancien gouvernement, au niveau de la neutralité du net et de "l'encadrement des pratiques numériques" ?

(le Parti Socialiste français,  cette "fédération de clubs de groupies ©" comme le résumait si bien un lecteur de Reflets ©, travaille sur le numérique. Ils ont même une ministre de la chose. Comme l'UMP. C'est bien. C'est grand. C'est beau. Mais peut-on véritablement espérer quelque chose de différent de l'ancien gouvernement, au niveau de la neutralité du net et de "l'encadrement des pratiques numériques" ? Même si les raisons invoquées pour "contrôler Internet", ne seront bien entendu, pas les mêmes que celles du parti de Nicolas Sarkozy, le plus-grand-président-de-tous-les-temps…)

Reflets ©, par le biais de Fabrice Epelboin ©, a pris la ministre de l'économie numérique ©  la main dans le pot de confiture de l'exception culturelle © et du socialisme dirigiste©, dans sa vocation de "garant Etatique de la bonne marche du pays", grand défenseur des attaques étrangères à l'encontre de notre merveilleux patrimoine.

Cette petite sortie, de la ministre  (quoi qu'en pensent les fan-boys du PS, ex-trotskistes-maoistes convertis à l'économie de marché par cooptation) est révélatrice d'une tendance idéologique et politique very interesting. (Pour les allergiques aux anglicismes, vous remarquerez que l'origine de l'anglais est très empreinte de français…)

Les chevaliers blancs socialistes…

Si vous voulez réfléchir à Hadopi, au concept de surveillance et punition des internautes qui partagent des fichiers sur le réseau mondial, que vous êtes une grande âme socialiste (humaniste, épris de culture, amoureux du bien commun, toutes ces choses si belles que la gauche socialiste charrie avec elle comme d'autres charrient des sacs de plâtre) qui donc embauchez-vous ? Vous embauchez un type qui a aidé à monter la première chaîne de télévision cryptée à péage, qui en a été le PDG, un type qui traîne dans tous les milieux du business de "l'industrie culturelle" et qui surtout, est administrateur d'une société suisse (si, si) de sécurité numérique, spécialisée dans la convergence (TV connectée etc…).

Le type c'est Pierre Lescure (le bien nommé) missionné par Moi-Président pour organiser le débat autour du futur d'Hadopi. La multinationale suisse où Pierre Lescure officie en tant qu'administrateur est Kudelski, dont la filiale, Nagravision, spécialisée dans les solutions informatiques et électroniques pour la télévision payante et les accès sécurisés a une importante part du marché des décodeurs pour la télévision (site).

Mais oui, mais oui, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, vous dit-on. Hadopi, outil de surveillance par excellence est donc entre les pattes d'un administrateur de multinationale qui fait son beurre grâce aux outils d'accès aux contenus culturels verrouillés, totalement antinomiques avec l'accès libre  à un réseau neutre ou au droit à partager des fichiers.

Le vilain cheval de Troie américain

La sortie de la ministre socialiste Fleur Pellerin est liée au choix de Pierre Lescure pour débattre d'Hadopi. Parce que nous parlons alors d'une reprise en main, par l'Etat, d'un secteur qui lui échappe, depuis le départ, celui d'Internet. La distribution aux amis des majors, et autres firmes d'ayants droits des marchés futurs à venir sur les contenus numériques, les modalités d'accès à ces contenus, sont donc intimement liés à cette vision des choses.

Mais pas seulement. L'exception culturelle française appelée à la rescousse de chevaux de Troie américains qui la ruineront est un très mauvais procès fait à l'encontre de ces firmes : nous ne parlons pas, dans le cas de l'économie numérique, de culture. Nous parlons de marchés. D'innovation. De circulation de données dans des tuyaux. Si les firmes américaines apportent des technologies innovantes sur le réseau, comment la France peut-elle réagir ? En stimulant le tissu économique des PME spécialisées dans l'internet ? En finançant mieux et de façon plus intelligente la recherche publique ? En cherchant à promouvoir le libre dans les cursus scolaires, dans les services publics pour amener une génération à développer des applications plutôt qu'à savoir utiliser Office sous Windows ?

Non, l'Etat français va se défendre contre les "attaques" américaines en verrouillant au maximum l'accès aux contenus. Ce qu'on appelle un contrôle d'Etat. Ni plus ni moins. Et pour le bien de qui ? Oh, disons que les socialistes sont en majorité convaincus que ce sera pour le bien collectif, pour préserver la "création française", mais si on suit le fil rouge de cette affaire, avec par exemple le chargé de mission de la nouvelle Hadopi, vous voyez où tout cela nous mène. Certains parlent de Stalinisme capitaliste. C'est une piste. Pas inintéressante.

La neutralité du net, ça n'intéresse pas les dirigistes

Réguler les secteurs qui écrasent les citoyens par leur course aux bénéfices est une bonne chose. La finance dérégulée nous le démontre avec une certaine efficacité ces temps-ci.

Mais dans le cas d'un réseau mondial qui s'est développé durant 40 ans avec la participation de millions d'acteurs bénévoles, passionnés, qui a toujours su s'adapter face à toutes les tentatives de contrôles, il est assez malvenu de vouloir lui faire subir une quelconque régulation. Parce que s'il y a bien une entité actuelle qui est citoyenne, libre, créatrice de véritables ressources culturelles, d'échanges entre les peuples, c'est Internet.

Chère Madame Pellerin : comparer Internet à la diffusion de films sur les chaînes de télévision française ou de musique sur les ondes radio est aussi absurde que de comparer la qualité d'un hamburger McDonald avec un Roquefort AOC. Mais peut-être n'est-ce pas là votre problème ?

Votre problème ne serait-il pas plutôt de permettre à l'Etat de reprendre le contrôle, c'est-à-dire revenir à un socialisme planifié, dirigiste et  inquisiteur ? Ce qui est très dommage dans votre approche, qui nous l'espérons se modifiera, c'est de penser que la culture se "fabrique" et se répand comme n'importe quel produit. La neutralité du réseau, chère Madame Pellerin, est l'unique garantie que cette culture puisse se créer et se diffuser de la manière la plus citoyenne qui soit. Par les gens, avec ou sans les grosses firmes, dans ce que l'humanité à de plus grand : la diversité.

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