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par Antoine Champagne - kitetoa

Grèce : c'est parti mon kiki

Les politiques sont décidément pathétiques. Aux crises majeures, ils n'ont à opposer que leur "same old bullshit". Tout en croyant que la population va prendre ces arguments pour argent comptant. Ahem. Il s'est pourtant passé une ou deux choses ces derniers temps qui laissent penser que le monde a changé. Il y a eu le printemps arabe, il y a eu la révolution espagnole, il y a quelques frémissements en France, il y a eu quelques manifestations aux Etats-Unis. Une sorte de #rev11...

Les politiques sont décidément pathétiques. Aux crises majeures, ils n'ont à opposer que leur "same old bullshit". Tout en croyant que la population va prendre ces arguments pour argent comptant. Ahem. Il s'est pourtant passé une ou deux choses ces derniers temps qui laissent penser que le monde a changé. Il y a eu le printemps arabe, il y a eu la révolution espagnole, il y a quelques frémissements en France, il y a eu quelques manifestations aux Etats-Unis. Une sorte de #rev11... Et pourtant, ça continue encore et encore.

La Grèce est un bon exemple de diffusion massive de "same old bullshit". Les politiques ont un train de retard depuis le début de la crise des subprimes. Ils colmatent les brèches dans le Titanic à coup de scotch©, sans aucun succès, donc. Premier temps, l'économie mondiale est plombée par les banques qui ont fait absolument n'importe quoi, et par les agences de notation qui ont validé ces conneries. Ne parlons même pas des commissaires aux comptes qui n'ont rien vu pendant des années.

Deuxième temps, la bulle explose car, comme le savent tous les banquiers, même s'ils n'ont jamais tenu compte de ce principe de base : les arbres ne montent pas au ciel.

Que faire ? Les banques sont terriblement endettées et ces dettes ne valent plus rien. En plus, elles sont désormais invendables. La chaîne de Ponzi est arrivée à son terme. Dans ces cas-là, les banquiers ont un mot magique : "risque systémique". Ils vont voir les politiques et leur disent, en gros : "injectez des fonds chez nous où nous ferons tous faillite. Et là, c'est la révolution assurée". Ca marche à tous les coups. Crise de l'immobilier, des Savings & Loans, la bulle Internet... A chaque fois, le contribuable est appelé à sauver cette industrie privée qui a déconné.

Bref. La crise des subprimes a muté. Nous avons désormais une crise de la dette souveraine, c'est à dire de la dette des Etats. En Europe, c'est la Grèce qui est tombée la première. Bruxelles et le FMI se sont portés à son secours en lui prêtant de l'argent pour qu'elle puisse faire face à ses échéances. En échange, la Grèce devait appliquer des plans d'austérité drastiques dont les effets sur la population sont désastreux. Les plus pauvres paieront le plus lourd tribut pour éponger les conneries des banques, des Etats, des marchés financiers, des agences de notation, on en passe.

Mais tout cela ne suffit pas. Les plans d'austérité drastiques en question freinent la croissance et enclenchent un cercle vicieux : pas de reprise, pas de recettes, pas de recettes, pas d'amélioration des fondamentaux macro-économiques, pas de croissance, et ainsi de suite.

Cela, tous les économistes sensés l'ont dit. Mais personne ne les a écoutés.

Englués dans leur "old same bullshit", les politiques ont continué de s'époumoner dans un massif déni de réalité : il n'y aura pas besoin d'aider la Grèce. Ah, si, en fait oui. Il n'y aura pas besoin d'une deuxième série d'aides. Ah, si en fait, il en faudra une. il n'y aura pas de restructuration... Ah... Si, en fait, il y en aura peut-être une, mais on l'appellera autrement, du coup, ce ne sera pas une restructuration de la dette grecque.

Pas sûr que les marchés les croient sur parole et quelle que soit la terminologie retenue, les lendemains seront durs. Car quoi qu'en disent les europtimistes, il y aura des conséquences. A l'échèle planétaire. Aujourd'hui, il y a 100.000 personnes dans les rues d'Athènes. Demain ? En outre, si l'on parle aujourd'hui d'un "reprofiling" ou d'un "SLIME" de la dette grecque, on évite d'évoquer ce qui va suivre. C'est à dire, l'Irlande, le Portugal, l'Espagne, pourquoi pas l'Italie et la Belgique ? Que des bonnes nouvelles...

Ce week-end, Nicolas Sarkozy, qui ne voulait pas entendre parler de restructuration, a mangé son chapeau :

«Si la restructuration signifie qu’un pays ne doit pas rembourser ses dettes, c’est non, ce mot ne fait pas partie du vocabulaire français. En revanche, si la question est de savoir comment les investisseurs privés ou les partenaires privés peuvent prendre une part du fardeau, il ne s’agit pas du tout d’une restructuration […] et nous devons avancer dans cette direction.»

Pour ceux qui n'ont pas compris, les investisseurs privés, ce sont les banques. Nicolas Sarkozy, qui n'est évidemment pas à une contradiction près, c'est sa marque de fabrique, leur explique qu'elles vont devoir s'assoir sur une partie de la dette grecque qu'elles détiennent. Il se trouve que le marché valorise ces jours-ci à environ 50-60% la décote. Les banques françaises, qui clament depuis des mois qu'elles ne seront pas impactées par une restructuration de la dette grecque tant leur situation financière et prudentielle est bonne, vont devoir prouver leurs dires. Il y a des chances pour qu'ici aussi le déni se heurte durement à la réalité.

Juste pour mémoire et pour que l'on comprenne bien combien les déclarations des politiques sont sincères, relisons ensembles les récentes sorties sur la crise grecque :

Christine Lagarde le 16 mai : « la restructuration ou le rééchelonnement, qui serait de nature à constituer une situation de défaut, sont pour moi off the table. On n’en discute pas » _Crise grecque : G. Papandréou confiant__ Le premier ministre grec a déclaré dimanche, à l'occasion de son message pour la Pâque orthodoxe, que la Grèce arriverait à sortir de la crise "malgré les difficultés" qui continuent de peser sur le pays, un an après le recours à la zone euro et au FMI. Le président grec, Carolos Papoulias, a souhaité "que la résurrection du Christ aide le peuple grec à surmonter les difficultés". "Les temps sont difficiles. J'espère personnellement qu'on va les surmonter." Ces déclarations interviennent juste un an après le recours du pays à la zone euro et au FMI, qui lui ont prêté 110 milliards d'€ sur trois ans afin de le sauver de la faillite. 25 avril 2011 Nouvelles mesures d'austérité en Grèce Le premier ministre grec  a présenté vendredi les grandes lignes de nouvelles mesures d'austérité, ajoutant qu'elles seraient détaillées après Pâques. L'objectif est en 2015 de "réduire les dépenses de l'Etat à environ 44 % du PIB, dans la moyenne de la zone euro, contre 53 % du PIB en 2009", et "d'augmenter les rentrées à environ 43 % du PIB, contre 38 % en 2009", a précisé M. Papandreou. Georges Papandréou a assuré que cet effort avait "le soutien des citoyens", car "c'est la seule voie" qui s'ouvre au pays. L'autre voie, qui passerait par une restructuration de la dette publique, signifiant un décrochage de la Grèce, "est celle de l'isolation, de la faillite et de l'appauvrissement", a-t-il dit._ _15 avril 2011 "Le risque de voir la crise se propager a été réduit de manière significative, voire a disparu. Cela est très clair au vu de la chute des rendements espagnols" A déclaré Herman Van Rompuy dans un entretien publié mardi par le journal grec Kathimerini, en marge d'une visite à Athènes, durant laquelle il doit rencontrer le premier ministre, Georges Papandreou. Le président du Conseil européen a estimé que l'Europe avait les ressources et la détermination pour combattre et vaincre la crise. "Je peux vous dire que l'Union européenne ne va pas 'gaspiller' la crise. Nous avons lancé la révision la plus radicale en matière de gouvernance économique depuis le lancement de l'euro", a-t-il affirmé. Herman Van Rompuy a insisté sur le fait que les gouvernements de la zone devaient tirer "les bonnes leçons" de cette crise. Selon lui, les états membres ont été trop laxistes en matière de politique budgétaire et ne sont pas parvenus à surveiller leurs banques. "D'ici dix ans, on verra les années 2010-2011 comme des années charnières vers quelque chose de mieux", selon lui. 12 avril 2011_

 

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