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Édito
par drapher

Electricité libre : la transition énergétique, c'est maintenant

L'article sur la propagande pro-nucléaire de  l'EGE (Ecole de guerre économique),  soulève de nombreuses questions sur la problématique de la production électrique, et de l'énergie en général en France. Serions-nous condamnés à consommer de l'électricité produite par fission ou à termes par fusion nucléaire ? Quelle est la part de production/consommation électrique dans l'ensemble de la consommation d'énergie sur le territoire ? Qui consomme le plus ? Pourquoi ?

L'article sur la propagande pro-nucléaire de  l'EGE (Ecole de guerre économique),  soulève de nombreuses questions sur la problématique de la production électrique, et de l'énergie en général en France. Serions-nous condamnés à consommer de l'électricité produite par fission ou à termes par fusion nucléaire ? Quelle est la part de production/consommation électrique dans l'ensemble de la consommation d'énergie sur le territoire ? Qui consomme le plus ? Pourquoi ? Le problème ne viendrait-il pas de la passivité des citoyens, incapables de se libérer des structures d'Etat ou des entreprises pour leur consommation électrique personnelle ? L'électricité libre est-elle une utopie, ou bien est-ce l'avenir ?

Le parallèle entre logiciel libre et production libre d'électricité n'est pas sans intérêt. Personne n'imaginait il y a 30 ans qu'un système d'exploitation d'ordinateur puisse être quelque chose de libre, gratuit, modifiable et évolutif sans qu'aucune entreprise d'informatique ne soit derrière. La production d'électricité libre est au même stade que celui du logiciel libre au milieu des années 80 : elle existe, elle est embryonnaire, mais elle est possible. Le problème majeur n'est ni technologique, ni réglementaire, mais capitalistique et privatif. Exactement comme les systèmes propriétaires et le logiciel libre.

Maintenir la dépendance

Produire de l'énergie électrique en toute indépendance et en totale autonomie dérange les puissances politiques et économiques. Non pas parce que cette option pourrait remodeler entièrement le paysage de production d'électricité en France, mais parce que cela démontre l'inverse de ce que ces décideurs martèlent depuis des années : la production électrique (et d'énergie en général) doit être centralisée, appartenir à l'Etat ou a à des entreprises triées sur le volet. Les citoyens doivent être dépendants de ces systèmes productifs. Au point de leur faire croire que produire de l'électricité est tellement compliqué, qu'il faut construire et maintenir des usines à fission nucléaire, capables de détruire la moitié de l'Europe si elles venaient à exploser. La dangerosité de l'énergie nucléaire n'est plus à démontrer, les accidents de Tchernobyl,  Fukushima sont bien réels. L'Allemagne l'a très bien compris, a éteint ses 8 réacteurs, et décidé de basculer dans la production électrique sans nucléaire. Sauf que le fond du problème ne se situe pas uniquement sur ce plan. Bien qu'un pays sans centrales nucléaires soit plus rassurant.

Qui consomme quoi ?

En France, les différentes politiques menées depuis des décennies ont mené à l'installation de chauffages électriques dans un nombre croissant de logements. Le discours dominant a été celui d'une indépendance énergétique très importante du pays grâce à une production électrique massive, peu chère, assurée par l'industrie nucléaire. Au point d'être le seul pays au monde à produire 75% de son électricité avec l'atome. Mais quelle est la part de la consommation électrique dans l'ensemble de la consommation d'énergies en France ? Le site d'EDF suivant l'indique de façon très précise:

conso-parts
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L'électricité primaire correspond à 44% de la consommation totale de l'énergie en France. Elle comptabilise le nucléaire, l'hydraulique, l'éolien et le photovoltaïque. Comme la part des renouvelables est de 18,6 %,  le nucléaire a une part réelle de 36% dans l'énergie électrique primaire consommée. Et en réalité, encore un moins, puisqu'il faut retirer les 25% restants issus des centrales thermiques. Mais qui donc consomme cette électricité ?

conso-elect-repartition
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Il est intéressant de constater que les plus gros consommateurs sont les particuliers et le secteur tertiaire. Pas les industriels, ni les transports ou l'agriculture. Ces particuliers, en termes globaux, consomment 47% de l'énergie produite en France, selon EDF :

Le chauffage électrique est l'un des facteurs aggravants de cette hyper-consommation, mais pas seulement puisque s'il reste très élevé, il est en baisse (page 12 de ce document de RTE FRance) depuis quelques années.

Selon l'institut d'Etudes européen de la consommation électrique, entre 25 et 40% de la consommation des ménages pourraient être économisée. Les 36% (27% en réalité) de parts du nucléaire dans la production d'énergie pourraient donc être réduites à 20% voire…à 15%. Une autre étude démontre que20% des Français consomment 51% de l’électricité consommée dans le secteur résidentiel en hiver.

Mais toutes ces études, statistiques, bien que démontrant la possibilité de réduire la part du nucléaire dans la production d'électricité, ne vont jamais dans un sens bien plus important et bien plus intéressant : celui de l'électricité libre.

Electricité libre : indépendance individuelle électrique de son domicile

La vocation de l'Etat en matière de production électrique est de conserver le contrôle, à tous les étages. Que ce soit avec l'atome ou les renouvelables. Les aides de l'Etat pour l'installation de systèmes de production électrique photovoltaïque individuels sont par exemple conditionnées à leur mise en place par un professionnel, et bien entendu de l'obligation de raccordement au réseau EDF. Si vous voulez consommer votre propre énergie, sans la revendre à EDF, ne pas être raccordé au réseau, vous pouvez le faire, mais l'Etat ne vous aidera pas. Toutefois, rien ne vous empêche de produire votre propre électricité, sans raccordement au réseau électrique : vous êtes simplement considéré par l'administration comme…n'ayant pas l'électricité. Dans le cas d'une habitation neuve, c'est la possibilité de faire soi-même l'électrification intérieure : aucun consuel (payant) ne passera pour vérifier la conformité des installations, vous n'êtes pas raccordé au réseau, vous n'existez pas pour EDF, et le consuel étant une entreprise qui se préoccupe de vous "protéger" en cas de problèmes électriques venant du réseau…EDF…il ne vous connaît pas.

L'intérêt de concevoir sa propre centrale électrique, à base de panneaux photovoltaïques, complétés par une éolienne pour les trois mois d'hiver peu ensoleillés dans la partie nord du pays, est très grand : le dimensionnement de l'installation correspond à vos besoins, puisque vous le déterminez vous-même. La consommation et les économies d'énergie deviennent naturelles, puisque si vous faites n'importe quoi en terme de consommation, vous risquez de vider vos batteries trop vite, et de les user prématurément. Vous ne devez rien à personne, votre énergie électrique est libre : exactement comme le logiciel du même nom. Vous pouvez modifier votre système, l'améliorer, l'étendre, le réduire : aucune limite, ni aucun contrôle ne s'exerce à votre égard. Et votre habitation, équipée d'appareils à basse consommation (frigidaire, lave-linge, ampoules led, ordinateurs, écran led), est alimentée en 220 V, toute l'année, 24/24, 7/7. Comme n'importe quelle habitation. Enfin presque, puisque dans les cas de coupure sur le réseau à cause des intempéries, vos voisins n'ont plus d'électricité, alors que vous, si.

Sortir de la passivité et ouvrir les yeux ?

Il est possible de se ré-emparer d'un nombre croissant de productions auparavant réservées à des secteurs industriels ou d'Etat. La production électrique en fait partie. Si la majorité de la population ne peut pas facilement produire son éléctricité librement et se chauffer au bois, tous ceux qui décident de construire une maison individuelle, ou en achètent une, le peuvent. C'est un choix. Mais il est profondément politique. Il démontre que les individus n'ont pas besoin d'être asservis à l'Etat ou des multinationales pour pouvoir s'éclairer et faire fonctionner les objets électriques de leur quotidien. Fabriquer de l'électricité libre n'a rien d'exceptionnel, ni de compliqué aujourd'hui, et les monstres de béton bourrés de matières radioactives censés nous assurer une électricité "fiable" et déclarée peu chère, seront à termes des antiquités ridicules. Les générations futures risquent de se poser des questions quand ils apprendront que pour fabriquer des bombes pouvant détruire la planète entière, la France avait choisi de faire tourner des turbines avec ces mêmes matières…pour produire de l'électricité. Ces matières radioactives qui tuent et rendent malades des milliers de Japonais depuis 3 ans, et contaminent les océans, l'air et les sols. En Allemagne, la clef de la transition énergétique passe par ce types de réflexions (source : http://www.sortirdunucleaire.org/Allemagne-la-transition-energetique-ca-marche ) :

"Contrairement aux craintes souvent exprimées, l’Allemagne n’a pas connu de black-out depuis l’arrêt de 8 réacteurs.

La fermeture progressive des réacteurs allemands et l’arrivée massive d’électricité d’origine renouvelable sur le réseau électrique nécessite de passer à un autre modèle de production d’électricité, reposant sur un plus grand nombre de petites installations de production, variables mais prévisibles. Cette transition nécessite des ajustements mais elle n’est pas insurmontable. Le projet "Kombikraftwerk" (centrale combinée) a montré qu’on pouvait garantir un approvisionnement électrique sûr et 100% renouvelables 24h/24, tout au long de l’année uniquement grâce à une multiplicité d’installations situées dans tout le pays.

Le principal enjeu n’est pas technique, mais économique : mettre fin au monopole des gros fournisseurs capitalistiques pour passer à un système reposant sur une diversité de petits producteurs."

Sur ce sujet, le Physicien nucléaire, polytechnicien, Bernard Laponche est très clair. Son interview de 2011 en dit long sur la voie française du tout nucléaire. Mais au final, en France, ne serait-ce pas surtout les mentalités qui doivent changer ?

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