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par Ju

Damas, le Monopoly et les sanctions

Quelle étrange idée ! Fabriquer une monnaie quasi dévaluée dont personne ne veut. Y aurait-il quelques personnes que cela aiderait ? Il faut dire que pour le banquier syrien moyen, ce n’est pas vraiment la joie. D’abord, l’Europe s’apprête à adopter de nouvelles sanctions visant à asphyxier un peu plus l’Etat Syrien. Outre l’interdiction de nouveaux investissements pétroliers -les anciens ne sont pas menacés-, la Banque centrale de Syrie ne peut plus se fournir en billets et pièces.

Quelle étrange idée ! Fabriquer une monnaie quasi dévaluée dont personne ne veut. Y aurait-il quelques personnes que cela aiderait ? Il faut dire que pour le banquier syrien moyen, ce n’est pas vraiment la joie.

D’abord, l’Europe s’apprête à adopter de nouvelles sanctions visant à asphyxier un peu plus l’Etat Syrien. Outre l’interdiction de nouveaux investissements pétroliers -les anciens ne sont pas menacés-, la Banque centrale de Syrie ne peut plus se fournir en billets et pièces.

Transferts internationaux, ça coince

L’Europe a les moyens d’appliquer très facilement cette sanction puisque c’est elle qui a la main sur la planche à billets, la vraie,la monnaie syrienne étant imprimée en Autriche, en Allemagne et en Belgique.

Et le reste de l’Occident semble décidé à suivre. Un expatrié vivant en Syrie nous rapportait qu’il avait croisé un homme voulant transférer de l’argent à son fils au Canada. Réponse des banques et des compagnies de transfert internationaux : pas question. La Livre syrienne reste en Syrie. Reste le change : Pour les vrais billets, pour l’instant, pas de problème. Pour les faux, mal imités, impossible d’en obtenir quoi que ce soit.

Retour vers le futur

C’est aussi l’import de voitures étrangères qui a été stoppé depuis peu. Pas graves, répondent les importateurs qui troquent leurs contrats et costumes contre une casquette de contrebandier : « Les mecs vont bosser comme il y a dix ans, ça passera par le Liban… » La Syrie reviendrait donc à la période protectionniste d’Hafez ? Peu importe, ils savent faire.

Pas facile de s’en sortir pour d’autres, dans un pays où le taux de chômage est évalué à 20%. Sans compter que la saison touristique est un peu pourrie… Pas vraiment l’été à aller manger du poisson à Lattaquié.

Du fric, donc, il n’y en n’a plus beaucoup. Let’s go, fabriquons-en du nouveau ! La vie est simple, finalement en Syrie. Mais qui donc aurait intérêt à transformer du PQ Syrien en billets de Monopoly  (voir ci-dessous en images) ?

Les grosses entreprises ?

Du côté des grosses boites, on supprime des postes. Syriatel, par exemple, vient de licencier massivement : 250 personnes se retrouvent sans emploi, une grande chaîne d’hôtel dont les établissements sont bien vides, a aussi supprimé 300 postes.

Qui dit import-export gelé, qui dit devises arrêtées à la frontière, qui dit embargo pétrolier, dit du mal à payer les employés et les charges.

Mouais, on n’est qu’à demi convaincu.

Bachar ?

Notre Moustachu préféré ferait de nouveau des siennes ?

Ca coûte combien 60 000 hommes dans une armée sur six mois ? Ça mange, ça boit, ça a besoin de se soigner, ça achète des armes, ça a besoin de véhicules, de petits casques, de jolis uniformes qu’il faut changer souvent parce que le sang, ça tache… Au bout d’un moment, ça doit coûter cher, non ?

Sans compter la Shabeeha, les Moukabarats qui représentent deux Syriens sur trois, ça commence à faire beaucoup, les employés administratifs, les œufs pour jeter sur les murs des ambassades, les médecins dans les hôpitaux publics qui, semble-t-il, sont pas vraiment aux 35 heures, les médicaments, les bandages, les pansements, et tout le matériel qu’ils peuvent utiliser…

En fait, ça coûte cher une guerre civile.

Les banques, pour rester à flot, ont augmenté le crédit immobilier de 15%... Pas facile de payer, surtout que le propriétaire, moustachu moyen, a certainement perdu son emploi. Il perdra bientôt sa maison, revendue une bouchée de pain à quelques fortunes du pays.

Les prix des denrées alimentaires ont aussi augmenté et la Syrie connaitra bientôt une nouvelle vague de manifestants : ceux qui ont déjà faim et qui auront tout perdu dans un ou deux mois. Et là, ce ne sont plus les 40% de population que Bachar el-Assad évoque sur la télé nationale, mais l’ensemble du pays qui, la faim au ventre, pourrait descendre dans la rue et cette fois y rester n’ayant rien d’autre à perdre que la vie.

Mauvaise langue que je suis !

Bachar se prépare aujourd’hui non pas à affronter la rue mais simplement à payer salaires, traites, factures avec ce nouvel argent qui vient d’apparaître.

Les pauvres ? ça s’achète.

Quelque chose me dit que les rotatives vont bientôt se remettre en marche.

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