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Dossier
par Antoine Champagne - kitetoa

Manifestation des gilets jaunes, 21 septembre 2019 à Paris

Reportage photo et vidéo

Le préfet a mis les petits plats dans les grands pour cette "rentrée" de plusieurs mouvements (gilets jaunes, marche pour le climat). Tout a été fait pour éviter la mise en place d'une vraie manifestation. A quel prix ?

Pochoir croisé à plusieurs reprises, clin d'oeil à Hong-Kong - © Reflets

Tout avait commencé la veille au soir. Le groupe de gilets jaunes qui déclare les manifestations en préfecture depuis un bon moment a annoncé vendredi soir que toutes ses propositions de parcours avaient été refusés par la préfecture. Un signal. Le préfet à poigne, Didier Lallement, donnait ainsi le ton. Pas de manifs encadrées. Il ne laissait qu'un choix aux manifestants : renouer avec les manifs sauvages. C'est pratique parce que cela, aux yeux de l'exécutif et des chaînes d'info en continu, cela justifie les dispersions systématiques et pourquoi pas violentes, de tous les attroupements. Cela évite aussi de montrer dans la capitale, toujours visitée en cette fin septembre ensoleillée par bon nombre de touristes, un long cortège jaune, s'étalant sur des kilomètres. Pire, que ce cortège de gilets jaunes rejoigne celui de la marche pour le climat, ce que nombre d'organisations souhaitaient.

Plusieurs rassemblements étaient prévus ce 21 septembre 2019 - Copie d'écran
Plusieurs rassemblements étaient prévus ce 21 septembre 2019 - Copie d'écran

Eh bien la stratégie a fonctionné. Dès 7h30, la police était place de la Madeleine ou le premier rendez-vous avait été donné. Fouilles systématiques, filtrage, interdiction de rester sur la place... Quelques gilets jaunes s'étaient attablés au café. Contrôle d'identité... Peu après 9h, un premier attroupement se forme mais est rapidement dispersé.

Le cortège de quelques dizaines de personnes s'éparpille puis se reforme. Finalement, les forces de l'ordre poursuivent les manifestants. Quelques lacrymogènes sont utilisés devant la gare Saint-Lazare. A cet instant, la stratégie des forces de l'ordre pour la journée est exposée : nasse systématique de tout attroupement, puis le mot d'ordre "on percute" qui sous-entend : on disperse avec beaucoup de testostérone parce qu'on le vaut bien.

Ce jeu du chat et de la souris, les gilets jaunes vont le jouer toute la matinée sur les Champs-Elysée, quitte à épuiser les forces de l'ordre. Elle ont des consignes et ne laissent rien passer. Le moindre attroupement, le moindre chant entonné, déclenche immédiatement une nasse, puis une dispersion vers les rues perpendiculaires aux Champs. Parfois à coup de boucliers, souvent a coups de lacrymos.

Il faut reconnaître aux gilets jaunes une certaine détermination. Les centaines de blessés, les centaines de personnes poursuivies sur le plan judiciaire, la stratégie de la peur utilisée depuis des mois, l'annonce d'une journée tendue où toute tentative de manifester sur les Champs-Elysées serait réprimée, rien n'y a fait. Ils étaient là, encore et toujours pour demander le départ d'Emmanuel Macron.

Du côté du parc du Luxembourg, la manif pour sauver le climat a également révélé la volonté, dans la salle de commandement, de pourrir la situation. Prétextant la présence de black bloc dans la manifestation (ce n'est pas la première fois pourtant depuis novembre 2018), les forces de l'ordre ont arrosé la manifestation de gaz lacrymogènes. Résultat, la manif est repartie dans l'autre sens, retour à la case départ. Car à Luxembourg, une nasse est organisée pour bloquer les manifestants. Ceux-ci se retrouvent donc bloqués tandis que derrière eux, les lacrymos pleuvent. L'air devient vite irrespirable et a plusieurs reprises, le cordon policier rompt. Le pire aurait pu arriver avec un mouvement de foule. Il y avait des enfants et des vieillards. Peu à peu, les manifestants sont invités à s'exfiltrer par les côtés. Ils ne se font pas prier tant la situation (chaleur, gaz) est compliquée. Même les organisateurs appellent à arrêter la manif, qui n'a même pas commencé. Il est environ 16h quand nous mettons un terme à notre reportage.

Sur le papier, cette stratégie est gagnante pour le préfet Didier Lallement, pour Christophe Castaner, pour Edouard Philippe et Emmanuel Macron. Pas de grosse manifestation, pas de jaune partout sur les images (peu portaient leur gilet). Mais sur le fond, l'exécutif s'est mis à dos les manifestants plutôt calmes de la marche pour le climat, les gilets jaunes qui sont toujours aussi énervés et en ont toujours autant assez de respirer des gaz lacrymogènes et de ne pas pouvoir manifester. La cocotte continue de chauffer, le couvercle est toujours aussi bien vissé.

Place de la Madeleine, dès potron-minet, les fouilles sont légion - © Reflets
Place de la Madeleine, dès potron-minet, les fouilles sont légion - © Reflets

Contrairement aux idées reçues, chez les gilets jaunes aussi, le climat est une problématique - © Reflets
Contrairement aux idées reçues, chez les gilets jaunes aussi, le climat est une problématique - © Reflets

Défilé Robocop lors de la Fashion Week - © Reflets
Défilé Robocop lors de la Fashion Week - © Reflets

Promenade matinale des troupes dans la gare Saint-Lazare. Une spécificité de l'entraînement "à la française"... - © Reflets
Promenade matinale des troupes dans la gare Saint-Lazare. Une spécificité de l'entraînement "à la française"... - © Reflets

La cité interdite (Zǐjìnchéng). Pas âme qui vive... - © Reflets
La cité interdite (Zǐjìnchéng). Pas âme qui vive... - © Reflets

Quand le slogan publicitaire se télescope avec la réalité... - © Reflets
Quand le slogan publicitaire se télescope avec la réalité... - © Reflets

Quand soudain... - © Reflets
Quand soudain... - © Reflets

Sur les Champs, de petits groupe qui entonnent des champs font courir les forces de l'odre qui ont visiblement comme consigne de ne rien laisser passer - © Reflets
Sur les Champs, de petits groupe qui entonnent des champs font courir les forces de l'odre qui ont visiblement comme consigne de ne rien laisser passer - © Reflets

Quand ca ne chante plus en haut, ça chante en bas, et vice-versa. Chef, chef, on nasse, on percute ! - © Reflets
Quand ca ne chante plus en haut, ça chante en bas, et vice-versa. Chef, chef, on nasse, on percute ! - © Reflets

L'écusson de droite aurait été fait en réaction à l'attentat du Bataclan. Pourquoi Guy Fawkes ? On n'a pas obtenu de réponse. - © Reflets
L'écusson de droite aurait été fait en réaction à l'attentat du Bataclan. Pourquoi Guy Fawkes ? On n'a pas obtenu de réponse. - © Reflets

Les voltigeurs, déjà présents à la Madeleine à 9h, ont beaucoup circulé, sur les Champs, mais aussi autour de la marche pour le climat. Vroum-vroum... - © Reflets
Les voltigeurs, déjà présents à la Madeleine à 9h, ont beaucoup circulé, sur les Champs, mais aussi autour de la marche pour le climat. Vroum-vroum... - © Reflets

On a bien essayé de monter en croupe, mais il parait que deux c'est le maximum... Une autre fois... - © Reflets
On a bien essayé de monter en croupe, mais il parait que deux c'est le maximum... Une autre fois... - © Reflets

Quelques arrestations de dangereux agitateurs. Ca fait des chiffres pour les chaines et les radios d'info en continu. Sur le terrain, ce sont loin d'être des casseurs. Un pauvre gars en short et sa femme collés au mur, une jeune fille qui criait un peu trop fort (sur la photo)... - © Reflets
Quelques arrestations de dangereux agitateurs. Ca fait des chiffres pour les chaines et les radios d'info en continu. Sur le terrain, ce sont loin d'être des casseurs. Un pauvre gars en short et sa femme collés au mur, une jeune fille qui criait un peu trop fort (sur la photo)... - © Reflets

Chef, ça chante là-bas, on percute ? - © Reflets
Chef, ça chante là-bas, on percute ? - © Reflets

Un cow-boy surgit d'un nuage de lacrymos... - © Reflets
Un cow-boy surgit d'un nuage de lacrymos... - © Reflets

Le désormais fameux joueur de guitare de l'extrême qui entonne ses chansons au beau milieu des affrontements. Cette fois, croisé sur les quais entre deux manifs. - © Reflets
Le désormais fameux joueur de guitare de l'extrême qui entonne ses chansons au beau milieu des affrontements. Cette fois, croisé sur les quais entre deux manifs. - © Reflets

A la marche pour le climat, l'ambiance est un peu plus festive. - © Reflets
A la marche pour le climat, l'ambiance est un peu plus festive. - © Reflets

Mais très vite, les lacrymos vont tuer la marche dans l'oeuf. Bilan, les manifestants pour le climat résistent beaucoup moins bien aux lacrymos que les gilets jaunes. Question d'habitude, ça va venir... - © Reflets
Mais très vite, les lacrymos vont tuer la marche dans l'oeuf. Bilan, les manifestants pour le climat résistent beaucoup moins bien aux lacrymos que les gilets jaunes. Question d'habitude, ça va venir... - © Reflets

En vidéo... (Ne ratez pas la fin)...

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