Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
par Yovan Menkevick

12 cigarettes (2)

Partie 2 : Petite enfance La première bouffée de la première cigarette plonge le fumeur dans un chaos de sensations. La tête tourne, la gorge s'enflamme, le monde s'amplifie comme si la fumée le rendait plus réel. C'est un moment étonnant, et j'aime le revivre, chaque matin. Je découvre le monde. Ma naissance est celle du monde, je me confonds avec lui et cette première fumée d'origine. La petite boite en argent ne contient plus que 11 cigarettes. Le ciel a changé de couleur. Il est bleu.

Partie 2 : Petite enfance

La première bouffée de la première cigarette plonge le fumeur dans un chaos de sensations. La tête tourne, la gorge s'enflamme, le monde s'amplifie comme si la fumée le rendait plus réel. C'est un moment étonnant, et j'aime le revivre, chaque matin. Je découvre le monde. Ma naissance est celle du monde, je me confonds avec lui et cette première fumée d'origine. La petite boite en argent ne contient plus que 11 cigarettes. Le ciel a changé de couleur. Il est bleu. Jusqu'à ce que j'allume la deuxième cigarette. Celle de la petite enfance. A 10h. Cette deuxième cigarette est toujours âcre, bien que mon palais ait gardé le goût de la première. Elle dégage plus d'arôme, se diffuse plus profondément en moi. Je crois que je l'apprécie encore plus que la première. La deuxième cigarette, celle de la petite enfance est une cigarette de l'exploration. Des sens, de l'espace. Je regarde la porte blanche qui ferme la pièce à travers le nuage de fumée et je souris. Il ne peut plus rien m'arriver. Ni à moi ni à personne. Je ferme les yeux et aspire une nouvelle bouffée.

*   *

— « Vous pouvez m'expliquer pourquoi nous ne pouvons rien, comme vous dites, pour les cigarettes ? » Elle s'était reprise, avait calmé sa respiration. Elle ne devait pas s'emballer, elle le savait. Combien de fois avait-elle répété cette situation ? 20, 30, 50, 100 fois ? Elle devait réussir. Immanquablement. elle regarda le médecin droit dans les yeux et lui parla d'une voix calme. La plus apaisante qu'elle pouvait. — « Il y a cette boite en argent qui contient les 12 cigarettes et les 12 allumettes. Vous la trouvez tous les matins remplie, n'est-ce pas ? » Le médecin sembla hésiter, puis répondit comme à contrecœur : — « Oui » — « Et ça ne vous inquiète pas ? Vous ne trouvez pas ça étrange, inquiétant ? » — « Comment pouvez-vous savoir ? » — « Je vous le dirai quand j'aurai la garantie d'avoir un accès jusqu'à lui. Mais vous ne m'avez pas répondu : vous n'êtes pas inquiet pour les cigarettes ? » Le médecin cligna des yeux. Une goutte de sueur perlait du haut de son front, elle commença à glisser vers le sourcil gauche. Il n'y avait aucun bruit. Il lui répondit d'une voix neutre. Peut-être trop neutre. — « Je ne suis pas là pour parler de mes émotions, vous le savez bien. Il fume les cigarettes, et je n'ai pas de doute sur le fait qu'il les fumera encore demain » Elle répondit du tac au tac : — « Et bien moi, je crois que c'est là que vous trompez gravement, docteur, justement » — « Pourquoi ? » — « Parce que nous sommes le 3 février. Et que par conséquent, demain nous serons le 4…»

Le médecin regarda plus attentivement le visage de la femme assise en face de lui et se dit que ses traits lui disaient quelque chose. Mais quoi ? Une rencontre ? Le réseau ? Une publicité ? Peut-être autre chose. Comme un déjà-vu. Oui, c'était certainement ça. Un déjà-vu. La troisième cigarette devait être déjà allumée. Avant 11 heures. Immanquablement.

0 Commentaires
Une info, un document ? Contactez-nous de façon sécurisée