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par Antoine Champagne - kitetoa

Regardez ce mur blanc, il est noir

Selon où l'on se place sur l'échiquier politique, philosophique, religieux, que sais-je, on voit une orange là où il y a une pipe, un mur noir quand il est blanc, un tableau de Yves Klein vert quand il est bleu... En passant en revue les tweets que me signalait Twitter, je suis tombé sur celui de Aurore Bergé. Elle y défend l'idée que si la France emprunte à des taux négatifs, c'est que la gestion de Nicolas Sarkozy et François Fillon a été une franche réussite. Pourquoi pas, après tout.

Selon où l'on se place sur l'échiquier politique, philosophique, religieux, que sais-je, on voit une orange là où il y a une pipe, un mur noir quand il est blanc, un tableau de Yves Klein vert quand il est bleu...

En passant en revue les tweets que me signalait Twitter, je suis tombé sur celui de Aurore Bergé. Elle y défend l'idée que si la France emprunte à des taux négatifs, c'est que la gestion de Nicolas Sarkozy et François Fillon a été une franche réussite.

Pourquoi pas, après tout. Imaginons que nous soyons des encartés UMP. Si les investisseurs sont prêts à payer pour placer leur argent en dette française, c'est que -forcément- le pays a une économie en béton. Seule l'Allemagne a réussi cette "prouesse" ces derniers mois, au beau milieu d'un champ de ruines, tout le monde a lu au moins un article sur la terrible crise qui secoue l'Europe et partant, le reste du monde.

Et si l'économie de la France est en béton, au point que les investisseurs soient prêts à payer pour obtenir des titres de la dette française, c'est -forcément- que Nicolas Sarkozy et François Fillon ont fait un boulot en or.

Juste pour mémoire, Nicolas Sarkozy est le leader charismatique, guide spirituel des encartés UMP qui disait :

« inutile de réinventer le fil à couper le beurre. Toutes ces théories économiques… moi-même, parfois je suis un peu perdu. Ce que je veux c’est que les choses marchent ».

Avec ce genre de déclarations, au moins, on sait où l'on va et cela permet d'anticiper les futures réussites de l'auteur sur le plan macro-économique.

Aurore Bergé pourrait, si elle n'était pas encartée UMP, se souvenir que le chômage a explosé sous Nicolas Sarkozy. Elle pourrait noter que la France a perdu son triple A pendant le mandat de ses mentors. Elle pourrait voir que Nicolas Sarkozy mené une vingtaine de sommets de la dernière chance pour sauver l'Euro et qu'à chaque fois, en dépit de ses déclarations martiales et triomphatrices, il s'est lamentablement planté.

Mais non. Aurore Bergé est encartée. Et ses connaissances en macro-économie sont visiblement un peu courtes. A peu près aussi courtes que celles de ceux et celles qui ont retweeté son message. Valérie, Nadine, si vous nous lisez...

Voilà ce que l'on peut voir quand on n'est pas encarté lorsque l'on observe un pays de la zone euro prêter à des taux négatifs en pleine crise...

Embarquez avec Reflets, on va décrypter en quelques lignes.

Il ne s'agit pas d'être de droite. Nicolas Sarkozy et ses amis ne sont plus aux affaires, ni de gauche puisque nous allons démonter le mythe d'une économie française forte (sous Hollande) qui attirerait les investisseurs au point de les voir payer pour acheter de la dette.

Observez les marchés actions. Ils se portent généralement bien au beau milieu de la tourmente. Et les commentateurs (politiques, journalistes, économistes) ayant pignon sur rue de répéter en boucle : "les marchés ont repris confiance".

Oui, mais non.

Il y a d'autres indicateurs en macro-économie que les marchés actions.

La trouille au ventre

Par exemple, les CDS qui montrent le niveau de trouille des investisseurs. Par exemple aussi, les taux servis pour la dette souveraine des pays.

Lorsqu'un zinzin (un investisseur institutionnel) est prêt à payer pour parquer ses liquidités, c'est qu'il est mort de trouille. Ça, Aurore Bergé ne le voit pas et c'est bien dommage, parce que ça devrait l'inquiéter terriblement.

L'investisseur qui paye pour parquer ses fonds, anticipe un écroulement total du système. Il cherche alors le placement le moins risqué parmi la foultitude de placements très risqués (selon son appréciation du moment). Et le truc le moins pire, c'est, selon lui, de payer, comme il achèterait l'utilisation d'un coffre fort, pour détenir des titres qui ne finiront peut-être pas -mais ce n'est pas sûr- en confettis.

Il achète de la dette allemande ou de la dette française et il paye pour ça. C'est moins pire que de détenir des actions d'entreprises qu'il anticipe en faillite totale dans quelques mois ou années. C'est moins pire que de détenir du dollar ou du yen. Mais c'est pire quand même. Parce que dans la tête d'un zinzin, payer pour placer son argent, c'est contre nature.

S'il se résout à faire cela, c'est qu'il a la trouille au ventre. A un point qui devrait faire flipper Aurore Bergé au delà du raisonnable.

Mais Aurore est encartée. Alors elle ne voit pas tout ça. Et bientôt, "la crise" va s'inviter à sa table de petit déjeuner et lui gâcher la journée assez lourdement. Elle ne l'aura pas vue venir parce qu'elle croit dur comme fer que Nicolas Sarkozy a sauvé la France.

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