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par bluetouff

#Prism, entre consternation, agacement et lassitude

Devant la masse d'articles publiés sur le pseudo scandale PRISM que tout le monde aimerait savoir restreint à la politique américaine en matière de surveillance, il devient de plus en compliqué d'y voir clair. De nombreux médias, assez involontairement, ajoutent du "bruit" là où tout le monde attend un peu de lumière. Aussi modeste soit notre petit média, ce n'est pas l'envie de les secouer un bon coup qui nous manque.

Devant la masse d'articles publiés sur le pseudo scandale PRISM que tout le monde aimerait savoir restreint à la politique américaine en matière de surveillance, il devient de plus en compliqué d'y voir clair. De nombreux médias, assez involontairement, ajoutent du "bruit" là où tout le monde attend un peu de lumière. Aussi modeste soit notre petit média, ce n'est pas l'envie de les secouer un bon coup qui nous manque.

Peu après les révélations d'Edward Snowden, les plus optimistes se disaient que la prise de conscience serait tout aussi massive et innéluctable que les interceptions elles mêmes. Deux semaines après ces révélations, il faut se rendre à l'évidence, il n'en est rien. Nous pourrions vous dire que nous en sommes étonnés, mais non, ce n'est pas le cas. Certes il y a bien quelques signaux encourageants, comme cette progression du nombre de requêtes du moteur de recherche DuckduckGo, résultant en grande partie de l'érosion toute relative des parts de marché de Google, mais on est encore bien loin du raz de marée que l'on aurait pu espérer.

L'énigmatique et fascinant Edward Snowden semble capter le gros de l'attention. Où est Edward Snowden ? Pourquoi sa petite amie a un blog ? Edward Snowden existe t-il vraiment ? Puis la diplomatie s'en mêle, les USA accusant Moscou et Pékin de complicité dans sa fuite supposée et Pékin de se gausser qu'Edward Snowden ait fait tomber « le masque moralisateur de Washington ».

Quand quelques médias s'essaient à des recettes de sorciers qui prétendent "sécuriser les communications pour se prémunir des écoutes de Prism", on confine souvent à l'hérésie technique et à la désinformation la plus totale. Ainsi, on ira vous expliquer que l'arme absolue contre un système de surveillance comme Prism, c'est le chiffrement. C'est un bon début, certes, mais c'est tout de même une réponse très partielle aux effets d'un système qui :

  • intercepte
  • stocke
  • analyse à posteriori (car on se doute bien qu'un jour où l'autre ces données seront déchiffrées).

On omettra donc naturellement de vous expliquer les vertus de l'anonymisation des flux IP et donc des mesures de protection de contexte sans quoi le chiffrement ne sert plus à grand chose dans le cadre de l'analyse de metadonnées. On vous indiquera des solutions de chiffrement sur votre téléphone mobile issues de l'Apple Store, ou le meilleur VPN pour aller raconter votre vie sur Facebook… On se dit que ça risque d'être long d'expliquer à la presse avec tout ce qu'elle relaie comme bêtises. Comment expliquer à TF1 que quand on filme l'ambassadeur de France en Syrie en train de contacter des dirigeants rebelles syriens, on ne filme pas son Windows avec sa fenêtre Skype sur laquelle on devine le pseudonyme de l'interlocuteur ! (19e minute)… bordel !! Oui TF1, tu es vraiment trop con !!! Quand comprendras-tu que les autorités syriennes n'ont pas besoin d'écouter une conversation ou de lire le contenu d'un message pour localiser des chefs rebelles sur le terrain ! Quand comprendras tu que Skype, n'est pas du tout une solution de communication sécurisée ?!

D'autres médias, plus risibles encore, poussent le bouchon jusqu'à vous expliquer comment jouer à la NSA avec les services de Google.

Quand les politiques s'expriment sur le sujet en faisant mine de découvrir ce que nous avons pourtant sous le nez depuis plus d'une douzaine d'années, ce en admettant que l'on omette totalement l'UKUSA et Echelon, c'est l'agacement qui nous gagne. Oui, ils nous mentent, et non contents de mentir, ils le font tellement mal que c'en devient ridicule. Peu importe après tout, si la presse joue le jeu, alors les masses les croiront, sans demander de comptes sur les agissements de leur propre pays en matière de surveillance de masse, ou en matière de business de ces technologies de surveillance de masse.

Chère, très chère presse, par pitié, fais ton travail, mais fais le correctement. Souviens toi qu'il y a des pays dans lesquels tes imprécisions peuvent coûter la vie à des gens... essaye de te documenter un peu et de te concentrer sur les problématiques soulevées par PRISM au lieu d'envoyer tes reporters à la Havane pour tirer le portrait d'Edward Snowden dont tout le monde se cogne. Vas poser les questions qui fâchent aux autorités de ton pays au lieu de relayer les inepties d'un ministre qui invoque la pertinence d'un "cloud souverain" en réponse à PRISM. Fais ton travail d'information en vérifiant et reprenant tout ce que nous te mettons sous le nez dans nos modestes "blogs".

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