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par Yovan Menkevick

Plateau climatique : les océans bloquent le réchauffement

Alors que le dernier rapport du Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat vient d'être rendu public, la communauté scientifique continue de tenter de comprendre les raisons du "plateau climatique" observé depuis une quinzaine d'années. Explications. Ce sont des colloque et des publications dont le grand public n'a le plus souvent pas connaissance, mais qui agitent les cerveaux des experts et perturbent le consensus scientifique établi autour du changement climatique.

Alors que le dernier rapport du Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat vient d'être rendu public, la communauté scientifique continue de tenter de comprendre les raisons du "plateau climatique" observé depuis une quinzaine d'années. Explications.

Ce sont des colloque et des publications dont le grand public n'a le plus souvent pas connaissance, mais qui agitent les cerveaux des experts et perturbent le consensus scientifique établi autour du changement climatique. La "pause "dans le réchauffement climatique —qui il y a encore quelques années était réfutée par le Giec et sa communauté scientifique —est désormais une réalité reconnue. La température globale a cessé d'augmenter depuis 1998. Les chercheurs qui adhéraient à cette thèse — les climato-sceptiques, reviennent un peu sur le devant de la scène : les "forçages naturels" qu'ils défendaient sont désormais pris en compte par le Giec, bien que l'organisation a toujours affirmé avoir évalué le changement climatique par l'effet de serre en tenant compte de ces variables naturelles. Si ce n'était pas vraiment le cas, c'est en tout cas chose faite aujourd'hui.

 Chaleur manquante

 La prestigieuse revue Nature a publié en janvier 2014, sous la plume de Jeff Tollefson, un article  établissant la réalité du plateau climatique et apportant les pistes scientifiques pour l'expliquer.

"Le plus grand mystère actuel des sciences du climat a peut-être pris corps, alors qu'il était ignoré jusque là, avec un affaiblissement subtil des vents tropicaux qui soufflent sur l'Océan Pacifique à la fin de l'année 1997. Normalement, ces vents poussent les eaux réchauffées par le soleil vers l'Indonésie. Lorsqu'ils faiblissent, l'eau chaude est reversée vers l'Amérique du Sud, ce qui se traduit par un phénomène connu sous le nom d'El Niño - la température moyenne du globe a atteint une valeur record en 1998 - puis le réchauffement s'est arrêté."

Le journaliste scientifique, spécialiste du climat, continue son exposé sur ce qu'il nomme le hiatus, et qui correspond dans le langage usuel à la pause ou plateau climatique :

"Les sceptiques du climat ont tiré parti de la tendance des températures comme un élément de preuve que le réchauffement climatique s'était arrêté. Pendant ce temps-là, les scientifiques savent que la chaleur doit quand même augmenter quelque part dans le système climatique mais ils se sont trouvés en difficulté pour expliquer où cette chaleur s'en allait si ce n'était pas dans l'atmosphère. Certains ont commencé à se demander s'il n'y avait pas quelque chose de faux dans leurs modèles."

Si le doute a bien envahi les chercheurs sur cette surprenante pause dans le réchauffement, des explications semblent avoir été trouvées. Elles confirment une hausse des températures causée par l'effet de serre, mais avec une chaleur "capturée" par les océans :

 "A présent, alors que le hiatus du réchauffement climatique entre dans sa seizième année, les scientifiques sont enfin rentrés bille en tête dans la problématique de la chaleur manquante. Certains ont pointé le soleil, les volcans et jusqu'à la pollution chinoise en tant que responsables mais des études récentes suggèrent que ce sont les océans qui sont la clef de l'anomalie."

La pause ne durera pas

Malgré ces bonnes nouvelles qui contredisent les prévisions alarmistes  du Giec sur une hausse certaine des températures durant cette dernière décennie et celles à venir, il n'est pas encore l'heure de se réjouir. La capture de la chaleur est temporaire selon les scientifiques cités par le journaliste de Nature. Ceux-ci en expliquent les raisons de façon très claire :

 "L'événement El Niño de 1997 à 1998 a été le déclenchement pour des changements dans le Pacifique et je pense que c'est très probablement le début du hiatus" dit Kevin Trenberth qui est un climatologue au NCAR (Centre National pour la Recherche Atmosphérique) de Boulder au Colorado. Selon cette théorie, le Pacifique tropical pourrait sortir de sa torpeur prolongée de période de froid dans les années à venir. "A la fin", dit Trenberth, "il rebasculera dans l'autre direction"

Ces découvertes ne doivent donc pas relativiser la gravité de la situation : les scientifiques le rappellent, même si les effets des gaz à effet de serre ont peut-être été surestimés, les périodes de chaud et de froid peuvent très bien se produire sous leur effet :

"L'explication la plus simple pour le hiatus et pour la divergence avec les modèles est la variabilité naturelle. Tout-à-fait comme il y a des variations entre le chaud et le froid dans le temps qu'il fait d'un jour sur l'autre, les fluctuations chaotiques du climat peuvent propulser les températures vers le bas ou vers le haut d'une année sur l'autre ou d'une décennie sur l'autre. Les données sur les climats du passé montrent des vagues de chaleur ou de froid qui ont duré longtemps et les modèles du climat suggèrent que ceci peut se produire quand le monde se réchauffe sous l'influence des gaz à effet de serre."

 La nature refroidit les abus de l'homme

L'article de Nature admet que ce "hiatus" climatique n'a jamais été prévu par les modèles du Giec :

"Mais aucune des simulations du climat effectuées pour le GIEC n'a engendré ce hiatus particulier à cette période particulière. Ceci a conduit les sceptiques - et quelques scientifiques - à la conclusion controversée que les modèles auraient pu surestimer les effets des gaz à effet de serre et que le réchauffement futur pourrait ne pas être aussi fort que ce qui était redouté"[...]."

Cette conclusion controversée mettant en cause les précisons sur un réchauffement modéré, voire nul de la planète ne doit pas  occulter la responsabilité des gaz à effet de serre sur le réchauffement climatique. De nombreuses théories sont à l'œuvre pour expliquer ce phénomène de refroidissement empêchant le réchauffement prévu —de s'opérer. La plus probable, serait celle-ci :

"La variation de la température océanique connue sous le nom d'Oscillation Pacifique Décennale (PDO Pacific Decadal Oscillation), [qui] pourrait être une pièce cruciale du puzzle posé par le hiatus. Le cycle se renverse tous les 15 à 30 ans et, lors de sa phase positive, l'oscillation favorise El Niño qui tend à réchauffer l'atmosphère. Après avoir relâché de la chaleur pendant quelques décennies à partir du Pacifique Est et du centre, la région se refroidit et entre dans la phase négative de la PDO. Cet état tend à favoriser La Niña qui apporte des eaux fraîches venant des profondeurs le long de l'équateur tendant à refroidir la planète. Les chercheurs ont identifié la signature de la PDO en 1997 mais ce n'est que récemment qu'ils ont commencé à comprendre comment elle s'articule au sein du processus général de la circulation océanique et dans quelle mesure elle peut aider à expliquer le hiatus."

Si les réponses sur ce mystérieux refroidissement généré  par les océans ne sont pas encore parfaitement établies, elles tendent à se préciser. Heureusement la nature est là pour corriger les erreurs de l'humanité. Mais comme le précise l'article de Nature :

 "Tôt ou tard, cette tendance va inévitablement se renverser. "Vous ne pouvez pas continuer à empiler des eaux chaudes dans le Pacifique Ouest" dit Trenberth "Il arrivera que l'eau montera si haut que la tendance va se renverser". Et quand ceci se produira , si les scientifiques sont sur la bonne piste, la chaleur manquante va réapparaître et les températures vont remonter de nouveau."

Espérons que même si les scientifiques sont sur la bonne piste le Giec se trompera encore, en gardant en mémoire que de toutes les manières, tout doit être fait pour baisser nos émissions de gaz à effet de serre qui sont la cause principale du réchauffement climatique : la nature ne nous protégera pas éternellement de nos propres erreurs.

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