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Édito
par Antoine Champagne - kitetoa

Le jour d'après... Changez-vous durablement si vous voulez changer le monde

Après le temps de l'émotion, du sursaut républicain qui montre que nous pouvons tous être juifs, journalistes, musulmans, policiers, ou tout autre chose encore, qu'il y a une chose qui nous unit, notre contrat social, notre constitution, il faut éviter le temps de la haine. Une haine qui pourrait être "naturelle". La haine de celui qui commet l'incompréhensible et de tout ce qui peut lui ressembler, même de très loin.

Après le temps de l'émotion, du sursaut républicain qui montre que nous pouvons tous être juifs, journalistes, musulmans, policiers, ou tout autre chose encore, qu'il y a une chose qui nous unit, notre contrat social, notre constitution, il faut éviter le temps de la haine. Une haine qui pourrait être "naturelle". La haine de celui qui commet l'incompréhensible et de tout ce qui peut lui ressembler, même de très loin. Ils sont déjà nombreux, ceux qui pensent légitime d'attaquer des lieux de culte musulmans. Dix-sept attaques recensées hier soir. A la grenade, aux abats de porcs, à la carabine, à la bombe de peinture. Ils seraient pourtant bien inspirés d'observer que dans l'attaque du magasin casher, un terroriste noir se disant musulman a tué quatre personnes tandis qu'un héros noir musulman, en a sauvé un grand nombre. Aujourd'hui, la France s'est groupée pour dire son unité. Comme en 98 lorsqu'elle se disait black, blanc, beur. Comme en de nombreuses occasions. Ce qui importe maintenant, c'est le jour d'après. Afin d'éviter d'oublier une fois encore que nous étions unis par ce contrat social. Celui qui devrait nous permettre de vivre dans une société apaisée.

Vu l'énorme rassemblement du jour, nous voulons changer le monde. Commençons par nous changer nous-mêmes. En profondeur. Espérons que demain, revenus au sein de leurs entreprises, les Français cesseront de tenter d'écraser leurs collègues pour mieux survivre en milieu hostile.

Espérons que demain, les automobilistes ne se grilleront plus les priorités pour gagner une seconde ou deux, pour passer le premier, parce qu'on le vaut bien... Espérons que demain, tous les patrons d'entreprises feront preuve d’empathie pour leurs salariés au lieu de les pressurer délibérément. Espérons que tous les Français se souriront dans la rue au lieu d'éviter de croiser leurs regards. Et même s'ils ne sont pas capable de la même empathie qu'aujourd'hui, pourront-ils au moins être neutres dans leurs rapports aux autres au lieu d'être défiants, inquiets, agressifs ?

Une autre Voie

Ce rapport aux autres est bien entendu le produit de ceux qui le développent. Mais pas seulement. Il est le produit d'un environnement. De la société dans laquelle les individus évoluent. Quelle société voulons-nous construire pour nous, pour ceux qui nous succéderont ? Avec le concours de quels hommes politiques ? Sauront-ils, eux, laisser de côté leurs petits calculs habituels, renvoyer à leur recherche fondamentale leurs spin doctors ?

Saurons-nous imposer aux hommes politiques une voie ? Une voie différente ?

Si ces attentats sont, comme le disent (à tort) certains analystes, le 11 septembre français, saurons-nous leur imposer d'éviter la voie suivie par George Bush ? Celle qui consiste à doter la démocratie les armes de ses ennemis ? La légalisation de la torture, la guerre permanente, la destruction massive et systématique des relations internationales, le piétinement total des traités internationaux fondateurs du vivre ensemble sur une petite planète. Toutes ces armes qui concourent au cycle de la violence.

Saurons-nous leur faire comprendre que leurs réponses ne doivent pas être précipitées, dans l'urgence, surfant sur l'émotion. Si Paris a aujourd'hui été la capitale mondiale de la liberté et de la fraternité, il convient que ce mouvement se prolonge. Mais déjà tous les tenants de la surveillance, du repli sur soi se répandent dans les médias. Il faut, selon eux, revenir aux contrôles aux frontières, à plus de surveillance.

French Interior Minister Bernard Cazeneuve: ''France has received countless expressions of solidarity from all over the world''

He hosted a meeting on Sunday morning of fellow interior ministers from across Europe, including the UK's Theresa May, to discuss the threat posed by militants.Following the meeting, the ministers issued a statement saying that greater internet and borders surveillance was needed to combat terrorist attacks. (Source BBC)

Tous ceux-là oublient bien entendu que les meurtriers étaient des Français, ayant grandi en France, passés par l'école de la république. Quelque chose n'a pas fonctionné quelque part. Au lieu de rechercher ce qui a dysfonctionné, ils nous parlent de frontières... La surveillance ? Peut-on vraiment faire plus que ce que fait la NSA, ce que fait la DGSE sur les zones où sont présents les cerveaux de ces actes barbares ? Là non plus, cela n'a pas permis d'éviter l'attentat de Boston, ni ceux de Paris, Londres, Madrid...

Une société ne peut être parfaite. Elle ne peut être que fraternité. Il y aura toujours des esprits malades. La tolérance zéro de Nicolas Sarkozy était un leurre. Le zéro terrorisme n'a jamais existé et n'existera jamais. L'empilement de lois grignotant chaque jour un peu plus les libertés individuelles ne résoudra jamais ce problème. Il est peut-être temps de se demander si le projet de société qui a été bâti est le bon ? Si ce n'est pas le cas, c'est au coeur de chaque individu que doit se faire la mutation. Car il ne faut ni attendre que le monde change par enchantement, ni que le changement soit initié par les dirigeants de cette planète.

Demain, le jour d'après, la presse saura-t-elle pour sa part couper les micros à ceux qui font commerce de la division ? Les politiques, les pseudos intellectuels, les commentateurs et autres éditocrates rances ? Saura-t-elle mettre de côté son audimat, ses ventes, pour éviter de contribuer à laisser germer dans les esprits la graine de la division, de la haine, du repli et de la défiance ?

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