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par Antoine Champagne - kitetoa

Coucou, c'est Liliane, je vous fais une blague qui le vaut bien...

C'est l'histoire d'une dame un peu âgée, très riche, qui se pointe ces derniers jours en racontant à qui veut l'écouter, qu'elle voudrait bien payer plus d'impôts, qu'elle voudrait participer à une sorte d'effort national pour sortir le pays de la crise économique et financière dans laquelle il est plongé.

C'est l'histoire d'une dame un peu âgée, très riche, qui se pointe ces derniers jours en racontant à qui veut l'écouter, qu'elle voudrait bien payer plus d'impôts, qu'elle voudrait participer à une sorte d'effort national pour sortir le pays de la crise économique et financière dans laquelle il est plongé. Sur le mode Warren Buffett, mais en moins classe, Liliane Bettencourt a co-signé un appel de quelques patrons très fortunés qui souhaitent payer une contribution exceptionnelle (faudrait pas que ça dure, non plus) sur leurs revenus.

Reflets a une proposition pour Liliane (ou ceux qui gèrent son petit pécule)...

Au lieu de réclamer une taxation exceptionnelle pour aider ce pays, Liliane pourrait commencer par  payer ce qu'elle doit. Ainsi, elle pourrait commencer par arrêter de dissimuler au fisc certains avoirs ou, plus joliment dit, arrêter de faire de "l'optimisation fiscale" qui se traduit par quelques millions planqués dans des paradis fiscaux.

Petit retour en arrière : lorsque "l'affaire Bettencourt" battait son plein, les écoutes de ses conversations avaient révélé qu'elle disposait de quelque 100 millions d'euros (pour arrondir) placés en Suisse à l'insu du fisc français. Un redressement de 30 millions lui a été adressé, selon Marianne. Liliane avait également monté une structure particulièrement opaque pour cacher son acquisition de l’Ile d’Arros aux Seychelles. Une façon de contribuer à l'équité tant évoquée ces jours-ci, sans doute...

Pour mémoire, Hervé Martin, dans le Canard Enchaîné daté du 21/07/2010 (p.3) expliquait, avec l'aide de Pascal Wilhelm, l’avocat de Patrice de Maistre (ex gestionnaire de la fortune de Liliane) que celle-ci était imposée sur ce qu'elle dépense, et non pas sur ce qu'elle gagne. Son impôts sur le revenu représente "9 % des dividendes qu’elle a encaissés de L’Oréal. C’est-à-dire le même taux d’imposition que celui d’un salarié lambda (dans la même situation de famille, soit une part et demie) gagnant 3 000 euros par mois", selon le Canard Enchaîné (voir ci dessous). Explication : Liliane Bettencourt a recours, comme de nombreux contribuables fortunés à "l'optimisation fiscale" : Elle dispose d'une « holding de patrimoine ». Hervé Martin précise :

Les quelque 31 % du capital de L’Oréal propriété de Liliane Bettencourt ne sont plus directement détenus par elle – c’est là l’astuce – mais par une société lui appartenant intégralement, la holding Téthys, qui encaisse les dividendes du groupe. Lesquels ont déjà été soumis à l’impôt chez L’Oréal. Pour éviter une double imposition, le fisc français exonère donc ces dividendes de toute nouvelle ponction quand ils atterrissent dans la holding de Liliane. Notre milliardaire ne paie donc l’impôt sur le revenu, les CSG et CRDS que sur les fonds sortis de Téthys pour couvrir ses besoins personnels – 145 millions en 2009, quand même. C’est ce montant seul – diminué d’un abattement spécifique de 40 %, et d’une partie de la CSG et de la CRDS payées en 2008 – qui est soumis à l’impôt sur le revenu. Soit, à l’arrivée, 80 millions imposables. Quant aux 135 millions non utilisés par Mme Bettencourt et qui demeurent dans les actifs de la holding, le fisc n’en voit pas la couleur et ils peuvent fructifier en toute tranquillité. « Normal, a expliqué Me Wilhelm au “Canard”, ces fonds appartiennent non pas à Mme Bettencourt, mais à Téthys »… qui appartient à Liliane.

Dans un encadré lié à cet article, le Canard Enchaîné donne quelques chiffre sur ce que le bouclier fiscal a rapporté à Liliane Bettencourt :

C’est au total 100 millions d’euros que Liliane Bettencourt s’est vu rembourser par le Trésor public, ces quatre dernières années, au titre du bouclier fiscal, a indiqué au « Canard » Pascal Wilhelm, l’avocat de Patrice de Maistre, gestionnaire de la fortune de la milliardaire. Les premiers remboursements sont intervenus en 2007, avec la création du bouclier fiscal par Dominique de Villepin. En 2008, son amélioration par Sarko a permis à Liliane Bettencourt de se faire reverser 30 millions d’euros. On attend avec impatience le prochain cru.

La contribution de 3% proposée par François Fillon représenterait, sur 145 millions, quelque 4,35 millions de plus pour Liliane. A moins qu'elle ne décide de dépenser 4,35 millions de moins cette année. Désolés, on a mauvais esprit.

Récapitulons... D'un côté Liliane récupère 100 millions d'euros de la part du fisc au titre du bouclier fiscal. De l'autre, elle risque de payer une contribution exceptionnelle de 4,35 millions.

C'est ce qu'on appelle de la com' pas chère.

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