Journal d'investigation en ligne et d'information‑hacking
Édito
par Antoine Champagne - kitetoa

Alerte : les drones survolant Paris sont pilotés par des clowns maléfiques !

Si vous ne savez pas que des drones survolent Paris ces jours-ci, c'est que vous vivez dans une grotte en Afghanistan. La presse couvre ce non événement comme s'il s'agissait la dernière frasque de Nabilla l'accession au pouvoir de Marine Le Pen si les politiques avaient trouvé une solution à la crise financière si un OVNI avait atterri place de la Concorde.

Si vous ne savez pas que des drones survolent Paris ces jours-ci, c'est que vous vivez dans une grotte en Afghanistan. La presse couvre ce non événement comme s'il s'agissait la dernière frasque de Nabilla l'accession au pouvoir de Marine Le Pen si les politiques avaient trouvé une solution à la crise financière si un OVNI avait atterri place de la Concorde. Cette couverture médiatique de quelque chose d'insignifiant n'est pas sans rappeler l'importance donnée il y a quelques mois à la multiplication d'apparition de clowns pseudo effrayants dans les rues. Les autorités faisaient monter la sauce, la presse relayait. On en était à interdire des manifestations de peur d'y voir débarquer des armées de clowns inquiétants. C'est dire si l'affaire était grave. Plus personne ne parle des clowns, mais fort heureusement les drones sont apparus dans le ciel pour permettre à la presse de faire son métier. Informer sur des sujets qui en valent la peine.

Ce n'est pas comme s'il y avait d'autres sujets valant la peine d'être approfondis. Quel intérêt pourrait avoir la presse à creuser les révélations Snowden et le rôle de la France dans l'espionnage massif, les LuxLeaks, les SwissLeaks, le High Frequency Trading, les affaires de corruption, on en passe.

Ce qui nous amène à réexpliquer les choix éditoriaux de la presse...

La loi de proximité pousse les rédacteurs en chef à privilégier des faits qui se déroulent près de leur lectorat. Le mot à la mode ces temps-ci est "concernant". Il faut que les articles soient "concernants". Une invention linguistique pour dire que les lecteurs doivent se sentir concernés par les faits évoqués dans l'article. Sur le papier, c'est assez logique. Mais la presse a une idée préconçue de ce qui est "concernant" et de ce qui ne l'est pas. Elle ne prend, pense-t-elle, aucun risque sur ce point. Il est pourtant difficile de contenter tout le monde. Qu'importe, les drones, c'est concernant. Les LuxLeaks, moins.

Cuisine interne

La presse ne donnera pas non plus les ingrédients de ses recettes internes. Par exemple, Le Monde ne vous racontera pas que la personne qui traite les sujets comme les LuxLeaks est une journaliste qui entretient depuis le début de sa carrière les meilleures relations avec le secteur bancaire et des assurances. A quoi bon ? Elle connait le sujet, non ?

La hiérarchie de l'information est l'autre composante qui préside lors de la fabrication de votre journal. Les rédacteurs en chef décident de l'importance d'un sujet. Selon le sens du vent, la position des étoiles et l'haruspicine, ils décident de ce que le lecteur va vouloir lire ou pas, de ce qu'il convient de traiter largement ou par une brève. Mieux, ils décident de la place de l'article dans le journal. A gauche en bas, ça se voit moins, en haut à droite un peu plus.

Oui, les drones, c'est un sujet concernant qui mérite des tonnes de papiers. En haut à droite s'il vous plaît. Et s'ils sont pilotés par des clowns maléfiques, hop, à la Une.

En attendant, si la presse se meurt, c'est la faute à ces imbéciles de lecteurs qui vont se fournir sur le Net. Pas aux choix rédactionnels.

0 Commentaires
Une info, un document ? Contactez-nous de façon sécurisée